7.
« Votre indignation s’est appesantie sur moi1», ou « votre colère », comme on lit dans certains exemplaires, ou « votre fureur », comme on lit en d’autres. Car l’expression grecque Tumos, a été traduite différemment. Quand on lit orgué dans le grec, nul traducteur n’hésite à traduire ira, colère, mais quand on rencontre Tumos, la plupart ne veulent point traduire par colère, bien que les grands auteurs de l’éloquence latine, dissertant sur les philosophes grecs, aient traduit en latin ce mot par ira, ou colère. Ne nous y arrêtons pas plus longtemps, et si nous devons employer une autre expression, je préfère le mot indignation à fureur, car dans la langue latine, fureur ne se dit ordinairement pas des hommes rassis. Comment donc entendre : « Votre colère s’est appesantie sur moi », sinon dans le sens de ceux qui ne connaissaient point le Seigneur de la gloire2? Ils croyaient que la colère de Dieu, non-seulement était soulevée, mais encore appesantie sur lui, puisqu’ils avaient pu le livrer à la mort, non point à une mort telle quelle, mais à ce genre de mort qu’ils avaient le plus en horreur, à la mort de la croix. De là cette parole de l’Apôtre: « Le Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, en se faisant malédiction pour nous: car il est écrit: «Maudit soit Celui qui est suspendu au gibet3 ». Aussi quand il veut nous faire apprécier son obéissance jusqu’à la mort: « Il s’est humilié », nous dit-il, « en se faisant obéissant jusqu’à la mort4». Et comme cela lui paraissait peu, il ajoute : « Et jusqu’à la mort de la croix ». Aussi le Prophète, après ce qui précède, a-t-il ajouté : « Et toutes vos suspensions » ; ou selon d’autres traducteurs, « tous vos flots » ; ou selon d’autre encore, « tous vos élans, vous les avez fait fondre sur moi ». Il est écrit dans un autre psaume : « Toutes vos suspensions et tous vos flots sont venus sur moi5», ou comme d’autres on traduit avec plus de raison, « ont passé sur moi ». Il y a dans le grec, dielthon, et non eiselthon. Et quand on trouve les deux expressions, « suspensions » et « flots », on ne saurait mettre l’une pour l’autre. Or, nous avons assigné aux suspensions le sens de menaces, et aux flots le sens d’afflictions. Les unes et les autres viennent selon le jugement de Dieu. Mais là il est dit qu’ « elles sont passées », ici « vous les avez appelées sur moi ». Là donc, bien que plusieurs menaces soient accomplies, tous les maux qu’il a voulu comprendre dans cette expression, « ont passé sur moi », dit le Prophète. Ici: « Vous les avez amenées sur moi. » Passer, se dit en effet de ce qui n’atteint pas, comme les suspensions, et de ce qui atteint comme les flots. Mais quand il s’agit « des suspensions », il ne dit point : Elles ont passé sur moi; mais: «Vous les avez amenée sur moi », pour montrer que toutes les menaces se sont accomplies ; or, tout cela était suspension sur lui, tant que la prophétie renfermait, comme une menace pour l’avenir, tout ce qui s’est accompli dans la suite au temps de sa passion.