3.
« La verge à la main »,dit le Seigneur, «je visiterai leurs iniquités, et je frapperai leurs péchés, mais je ne retirerai point de lui totalement ma miséricorde1». De qui? De ce même David à qui j’ai fait de telles promesses, que j’ai oint de mon huile sainte plus que tous ceux qui partagent sa gloire2.
Connaissez-vous celui à qui Dieu ne retirera point sa miséricorde ? Que nul dans sa crainte aie vienne dire : Puisque c’est du Christ que le Seigneur promet de ne point retirer sa miséricorde, que. deviendront les pécheurs? Le Seigneur a-t-il donc promis qu’il ne leur retirerait point sa miséricorde ? « La verge à la main », dit-il, «je visiterai leurs iniquités, et je frapperai leurs péchés ». Tu attendais, pour te rassurer, qu’il dit : « Mais je ne leur retirerai point ma miséricorde ». Il est vrai qu’on le trouve dans quelques exemplaires, mais non dans les plus corrects : et même quand on le trouve, le sens n’en est pas changé. Comment est-ce en effet que Dieu ne retire point sa miséricorde à son Christ? Ce Sauveur de tout son corps a-t-il commis quelque faute dans le ciel ou sur la terre, lui qui est assis à la droite de Dieu, intercédant pour nous3? Et pourtant c’est du Christ qu’il ne la retire point, mais du Christ dans ses membres et dans son corps, qui est l’Eglise. Le Prophète nous donne en effet comme importante la promesse de ne point retirer de lui sa miséricorde, comme si nous ne connaissions point le Fils unique qui est dans le sein de son Père: car ce n’est point comme un homme qu’il nous faut le regarder ici, mais il n’est qu’une seule personne, qui est l’Homme-Dieu. Il ne retire donc point de lui sa miséricorde, puisqu’il ne ta retire point de son corps ni de ses membres; qu’il souffre en eux persécution sur la terre, quoiqu’il soit dans le ciel. C’était du ciel qu’il criait: « Saul, Saul », non point: Pourquoi persécuter mes serviteurs; non: Pourquoi persécuter mes saints; non: Pourquoi persécuter mes disciples; mais : « Pourquoi me persécuter4? » Comme donc, étant assis dans le ciel où nul sans doute ne le persécute, il s’écria : « Pourquoi me persécuter ? » parce que la tête alors ne désavouait point ses membres, et que la charité ne séparait point la tête du reste du corps : ainsi ne point retirer de lui sa miséricorde, c’est ne point la retirer de nous qui sommes son corps et ses membres. Toutefois il ne faut pas nous en prévaloir, pour pécher sans crainte, et pour nous promettre témérairement de ne point périr, quoi que nous fassions. Il est en effet certains péchés, certaines iniquités, au sujet desquels il nous est impossible de rien dire, de rien affirmer; et la chose fût-elle possible, il serait trop long d’en parler. Nul en effet ne saurait dire qu’il est sans péché; l’affirmer, ce serait mentir. « Dire que nous sommes exempts de péché, c’est nous tromper nous-mêmes, c’est n’avoir point en nous la vérité5». Chacun donc est nécessairement châtié pour ses péchés : mais Dieu ne lui retire point sa miséricorde, s’il est chrétien. Evidemment si tu descends à de tels excès, que tu repousses loin de toi la verge qui te frappe, si tu rejettes la main qui te châtie, si la punition de Dieu te porte au murmure, si tu fuis un Père qui use de sévérité, si tu renies ton Père parce qu’il ne t’épargne point dans tes égarements; toi-même tu t’éloignes de l’héritage, et ce n’est point lui qui te rejette si tu demeurais quand il te châtie, tu ne serais pas à jamais déshérité. « Quant à ma miséricorde, je ne la retirerai point de lui, je ne démentirai point ma vérité». Dieu donc ne retire point sa miséricorde qui délivre, afin que sa vérité ne nuise point, quand il châtie.