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Works Augustine of Hippo (354-430) Discours sur les Psaumes
DISCOURS SUR LE PSAUME XCIII .

1.

Nous avons écouté avec beaucoup d’attention la lecture du psaume, écoutons aussi ce qu’il plaît à Dieu de nous révéler des mystères qu’il y a cachés. Si Dieu en effet a jeté le voile du mystère sur quelques passages des Ecritures, c’est moins pour nous les dérober, que pour nous forcer à frapper à la porte pour en obtenir l’entrée. Si donc vous frappez avec une tendre piété et une charité sincère, Dieu vous ouvrira m, lui qui voit ce qui vous excite à frapper. Chacun de nous sait qu’il y eut autrefois beaucoup de murmurateurs contre la patience de Dieu (et puissions-nous n’être point de ce nombre), des hommes qui s’affligeaient de voir les méchants et les impies vivre sur la terre, et même y obtenir de la puissance; et ce qui est plus impénétrable encore, de leur voir contre les bons assez de puissance pour les opprimer; de voir enfin les méchants dans la joie, les bons dans l’affliction; les méchants dans la gloire, les justes dans l’humiliation. A la vue de ces désordres, et ils sont nombreux dans le genre humain, des hommes d’un esprit faible et impatient se persuadent que c’est en vain qu’ils sont vertueux, puisque Dieu détourne, ou semble détourner les yeux des bonnes oeuvres que font les hommes pieux et fidèles, et augmenter encore les jouissances des méchants. Asses faibles dès lors pour se persuader que c’est sans profit qu’ils lâchent de vivre saintement; ou bien ils sont portés à imiter les désordres de ceux qu’ils voient en quelque sorte fleurir ici-bas; ou bien, si quelque faiblesse de caractère ou de conscience les fait reculer devant le mal, ils sont retenus plutôt par la crainte des lois humaines, que par l’amour de la justice, ou plus clairement, ils craignent d’encourir parmi les hommes la réprobation des hommes, et ils évitent les actions condamnables, sans toutefois éviter les pensées honteuses. Et parai toutes ces pensées iniques, celle qui en est la source est cette impiété qui leur persuade que Dieu néglige la conduite de ce monde, et n’en prend aucun soin; qu’il ne met aucune différence entre les bons et les méchants, ou, ce qui est plus horrible encore; qu’i1 favorise les méchants et persécute les bons. Tout homme qui a ces pensées est impie envers lui-même, et se nuit quand même il ne nuirait à personne. Il n’atteint pas Dieu, il est vrai, mais il est son propre meurtrier, Dominés par ces pensées et par la crainte, ils peuvent bien ne pas nuire aux hommes, mais Dieu découvre et punit dans leurs pensées leurs homicides, leurs adultères, leurs fraudes et leurs rapines. Car il voit leurs désirs, lui dont l’oeil n’est point arrêté par ce voile charnel, et peut pénétrer leur volonté. Que l’occasion se présente, et ces hommes ne deviennent plus méchants, ils montrent qu’ils le sont : ce n’est pas ce qui vient de naître qu’ils mettent en évidence, mais bien ce qui était caché dans leurs coeurs. Il n’y a que peu d’années, c’est hier en quelque sorte que l’on a vu ce que j’énonce, et les esprits les plus lents ont pu le comprendre; il y avait ici une famille très-puissante, dont Dieu s’était fait un fléau contre le genre humain; et le genre humain se fût corrigé à cette occasion, s’il eût reconnu là une main paternelle, et redouté la sentence du juge. Pendant que cette famille exerçait en cette ville sa grande puissance, beaucoup gémissaient sous sa tyrannie, murmuraient, blâmaient, maudissaient, blasphémaient. Mais combien les hommes se nuisent à eux-mêmes, et combien sont abandonnés par un juste jugement de Dieu aux désirs de leur coeur1 ? Puis subitement les murmurateurs devenaient membres de cette famille, et faisaient endurer aux autres les maux dont ils murmuraient un peu auparavant. Un homme est donc véritablement bon quand il ne fait point le mal qu’il pourrait faire ; c’est de lui qu’il est dit: « Il a pu violer la loi, et ne l’a point violée, faire le mal, et il ne l’a point fait. Quel est-il, et nous le comblerons de louanges? car il a fait des merveilles en sa vie2 ». Ainsi dit l’Ecriture au sujet des hommes puissants qui demeurent inoffensifs. Un loup a la volonté de nuire autant qu’un lion. Le mal est inégal, mais non la volonté. Car un lion, non-seulement dédaigne les aboiements du chien, mais il le met en fuite, puis s’élance dans l’étable, et enlève ce qu’il lui plaît, sans que le chien ose souffler : tandis qu’un loup n’ose le faire quand le chien aboie. Mais en est-il plus innocent quand il se retire sans rien prendre, effrayé qu’il est par les aboiements du chien?

Dieu nous apprend donc à pratiquer l’innocence, non par la crainte du châtiment, mais par l’amour de la justice. C’est alors que l’innocence est libre, et véritablement innocence. L’homme, innocent par crainte, n’est pas vraiment innocent, bien qu’il ne fasse point le mal qu’il voudrait bien faire. Il ne nuit point par une action coupable; mais il se nuit beaucoup à lui-même, par son coupable désir. Vois dans l’Ecriture comment il se nuit: « Quiconque aime l’iniquité, hait son âme3 ». C’est donc nous tromper gravement que prétendre tourner contre les autres nos injustices, et non contre nous-mêmes. C’est contre les autres que l’on veut être injuste, on veut les blesser, détruire leurs biens, envahir leurs campagnes, enlever leurs esclaves, dérober leur or, leur argent, tout ce qu’ils peuvent posséder. Ce n’est guère qu’en ces manières qu’un autre est victime de nos injustices. En ce cas, ton iniquité pourrait donc nuire au corps de ton prochain, et pas à ton âme?


  1. Rom. II, 24.  ↩

  2. Eccli. XXXI, 9, 10. ↩

  3. Ps. X, 6. ↩

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