3.
« Qu’ils parlent, ceux qu’a rachetés le Seigneur1 ». On peut croire, il est vrai, que le peuple d’Israël a été racheté de l’Egypte, de la puissance de l’esclavage, des travaux inutiles pour lui, travaux de briques; voyons néanmoins si c’est l’Israël délivré de l’Egypte par le Seigneur, qui doit chanter ce cantique. Il n’en est pas ainsi. Qui donc doit le chanter? « ceux que Dieu a rachetés de la main des ennemis ». A la rigueur on pourrait encore les considérer comme rachetés de la puissance de leurs ennemis, ou des Egyptiens. Que le psaume nous marque lui-même avec précision à qui appartient ce cantique. « Il les a rassemblés de toutes les régions ». On peut encore dire des régions de l’Egypte, car il y avait plusieurs régions dans une seule province. Que le Psalmiste nous dise alors plus clairement: « De l’Orient et de l’Occident, de l’Aquilon et de la mer2». Nous comprenons déjà que ces peuples délivrés subsistent dans l’univers entier. Tel est vraiment le peuple de Dieu délivré des vastes régions de l’Egypte, et conduit comme à travers la mer Rouge3, pour mettre fin à ses ennemis dans le baptême. Car la mer Rouge n’est qu’une figure, et nos péchés, qui nous poursuivent comme les Egyptiens, sont noyés dans le baptême que consacre le sang du Christ; et au sortir de ces eaux nul des ennemis qui t’opprimaient ne demeure en vie. Que ceux-là donc chantent notre psaume : et pour nous, mes frères, puisque tel est le peuple de Dieu que l’on conduit, écoutons ce que l’on fait dans cette assemblée rachetée par le Christ. Toutefois ce que l’on chante ici n’arrive pas en même temps dans tous ceux qui croient, mais simplement dans chaque particulier: mais il en était autrement du peuple d’autrefois. Ce peuple, en effet, cette nation tout entière, issue d’Abraham selon la chair, toute cette nombreuse maison d’Israël fut tirée de l’Egypte une fois, conduite une fois à travers la mer Rouge, et mise une fois en possession de la terre promise; car ils étaient tous ensemble au milieu de ces événements : « Or, ces événements étaient pour eux des figures, ils ont été consignés pour nous servir d’instructions à nous qui vivons à la fin des temps4». Pour nous, ce n’est point tous ensemble, mais peu à peu et chacun en particulier, que la foi nous réunit en une même cité, en un même peuple de Dieu. Et toutefois ce qui est marqué dans ce psaume arrive en chacun de nous, et en même temps dans le peuple, car le peuple est composé des particuliers, et non les particuliers formés du peuple. Un homme est-il, en effet, composé d’un peuple? tandis qu’un peuple se compose d’hommes en particulier. O toi donc, qui que tu sois, qui reconnais en toi ce que je vais dire, qui l’as éprouvé, ne demeure pas en toi-même et ne t’imagine pas être le seul pour éprouver tout cela, mais sois convaincu qu’il en est de même pour tous, ou du moins peu s’en faut, pour tous ceux qui viennent s’unir à ce peuple, et qui sont rachetés des mains de leurs ennemis, par le sang précieux du Christ.