4.
Ecoutez quelque chose de plus admirable encore, des mystères cachés sous un voile dans les livres anciens, et en partie révélés par ces mêmes livres. Le prophète Michée parle ainsi : « Je vous montrerai les merveilles comme au jour de votre sortie d’Egypte. Les nations verront et seront confondues de sa force ; elles mettront leurs mains sur leurs bouches, et leurs oreilles seront assourdies; elles lécheront la poussière comme les serpents qui rampent sur la terre; elles seront troublées dans leurs demeures, et dans la stupeur en présence du Seigneur Dieu, et vous les jetterez, Seigneur, dans l’épouvante. Qui est semblable à ton Dieu, pour ôter l’iniquité, et oublier les péchés du reste de ton héritage? Il n’a point répandu sa colère comme un témoignage, parce qu’il fait ses délices de la miséricorde ; mais il reviendra et aura pitié de nous, il déposera nos iniquités, il précipitera toutes vos fautes au fond de l’abîme1 ». Vous le voyez, mes frères, Dieu nous révèle ici les mystères les plus saints. Dans ce psaume, dès lors, bien que l’Esprit-Saint nous découvre les merveilles de l’avenir, il semble néanmoins nous entretenir du passé. « Le peuple Juif», dit-il, « fut son peuple saint: la mer le vit et s’enfuit». Fut, vit, et s’enfuit, sont les expressions du passé. Le Jourdain rebroussa, les montagnes bondirent , la terre fut ébranlée, tout cela est au passé, et néanmoins nous devons l’entendre de l’avenir. Autrement, nonobstant la vérité de l’Evangile, il nous faudrait aussi voir un fait accompli, et non une prophétie de l’avenir, dans cette parole: « Ils ont partagé mes vêtements, et tiré ma robe au sort2 ». Bien que ces paroles soient au passé, elles étaient néanmoins une prophétie de ce qui devait arriver si longtemps après, à la passion du Sauveur. Et toutefois, mes frères bien-aimés, le Prophète, que je viens de citer, a voulu ouvrir les yeux les moins clairvoyants pour les faire passer instantanément des choses passées à l’intelligence des choses futures, afin non-seulement de nous faire croire, sur l’autorité des Apôtres, que nous étions figurés dans ces actes, mais de nous le montrer par les Prophètes eux-mêmes, en sorte que, après le témoignage de leurs écrits, la vérité que nous découvrons avec certitude nous remplisse de sécurité et de joie, en tirant ainsi du trésor des saintes Ecritures des choses nouvelles et anciennes, qui ont un si parfait accord. Bien que le Prophète que je viens de citer n’ait ainsi parlé que fort longtemps après la sortie de l’Egypte, et fort longtemps aussi avant les jours de l’Eglise, il assure néanmoins, à n’en pas douter, qu’il prédit l’avenir. « Je ferai des prodiges », nous dit-il, « comme à leur sortie de l’Egypte. Les nations le verront et seront confondues ». C’est-à-dire, comme l’a précisé le psaume: « La mer le vit, et s’enfuit ». Or, si ces expressions « vit » et « s’enfuit », qui marquent le temps passé, en figurent un autre qui est à venir, devant ces autres expressions: « Ils verront et seront confondus », qui sont bien au futur, quel homme pourrait penser au passé? Un peu après le même Prophète nous montre, avec la clarté du jour, que ces ennemis, qui nous poursuivaient pour nous donner la mort, sont bien nos péchés, que le baptême efface et submerge comme la mer engloutit les Egyptiens : « Dieu », nous dit-il, « se plaît à faire miséricorde ; il reviendra, et nous prendra en pitié ; il submergera nos iniquités, et précipitera nos péchés dans la mer ».