17.
« Que ma langue s’attache à mon palais, si je ne me souviens de toi1 ». C’est-à-dire, que je demeure muet si ton souvenir s’efface de ma mémoire. Que dire, en effet; de quoi parler, si l’on ne parle des cantiques de Sion? Notre langue est elle-même le cantique de Jérusalem. Chanter notre amour pour ce bas monde, c’est une langue étrangère, une langue barbare, et que nous avons apprise dans notre captivité. Il sera donc muet pour Dieu, celui qui aura oublié Jérusalem. Mais c’est peu de s’en souvenir; ils s’en souviennent aussi, ses ennemis qui la veulent détruire. Quelle est, disent-ils, cette cité? Quels sont ces chrétiens? Quelle est leur vie? Encore s’ils n’étaient plus! Voilà que la nation captive a vaincu ceux qui la tenaient en captivité, et toutefois ils murmurent, ils frémissent, ils veulent détruire la cité sainte étrangère parmi eux, comme autrefois Pharaon voulut détruire le peuple de Dieu, quand il faisait mettre à mort tout enfant mâle, et ne réservait que les filles : il étouffait la force et nourrissait la convoitise. C’est donc peu de s’en souvenir, vois quel souvenir tu en as. Il est des souvenirs de haine et des souvenirs d’amour. Aussi après avoir dit : « Si jamais je t’oublie, ô sainte Jérusalem, que ma main droite s’oublie elle-même. Que ma langue s’attache à mon palais, si tu ne vis dans ma mémoire », le Prophète ajoute : « Si Jérusalem n’est pas toujours la première de mes joies ». Car, la joie suprême pour nous, c’est de jouir de Dieu, c’est de goûter en toute sécurité le bonheur d’une société paisible, et de l’union fraternelle. Là, nulle tentation violente, nul attrait dangereux ne pourra nous atteindre, le bien seul aura pour nous des charmes. Toute nécessité disparaîtra et fera place au bonheur suprême. « Si Jérusalem n’est point la première de mes joies».
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Ps. CXXXVI, 6. ↩