2.
« Quand je priais, le Dieu de ma justice m’a exaucé (Ps. IV, 2 ) ». Ma prière, dit-il, a été exaucée par Dieu, auteur de ma justice. « Dans les tribulations, vous avez dilaté mon cœur (Ibid. ), vous m’avez fait passer des étreintes de la douleur aux dilatations de la joie; car la tribulation et l’étreinte sont le partage de l’âme, chez tout homme qui fait le mal (Rom. II, 9 ) ». Mais celui qui dit: « Nous nous réjouissons dans les afflictions, sachant que l’affliction produit la patience » ; jusqu’à ces paroles: « Parce que l’amour de Dieu est répandu dans nos coeurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné (Rom. V, 3-5 ) » : celui-là n’endure point les étreintes du coeur, quoi que fassent pour les lui causer ses persécuteurs du dehors. Le verbe est à la troisième personne, quand le Prophète s’écrie: « Dieu m’a exaucé », et à la seconde, quand il dit: « Vous avez dilaté mon coeur »; si ce changement n’a point pour but la variété ou l’agrément du discours, on peut s’étonner qu’il ait voulu d’abord proclamer devant les hommes qu’il a été exaucé, puis interpeller son bienfaiteur. Sans doute qu’après avoir dit qu’il a été exaucé dans la dilatation de son coeur, il a préféré s’entretenir avec Dieu, afin de nous montrer par là que dans cette dilatation du coeur, Dieu lui-même se répand dans notre âme qui s’entretient avec lui intérieurement. Ceci s’applique très-bien au fidèle qui croit en Jésus-Christ, et en reçoit la lumière; mais je ne vois point comment nous pourrions l’entendre de Notre-Seigneur, puisque la divine sagesse unie à son humanité, ne l’a point abandonné un instant. Toutefois, de même que dans la prière il faisait ressortir notre faiblesse plutôt que la sienne; de même aussi, dans cette dilatation du coeur, Notre-Seigneur peut parler au nom des fidèles, dont il s’attribue le rôle quand il dit: « J’ai eu faim, et vous ne m’avez pas nourri ; j’ai eu soif, et vous ne m’avez point donné à boire (Matt. XXV, 35 ), et le reste.
De même encore Notre-Seigneur peut dire : « Vous avez dilaté mon coeur», en parlant au nom de quelque humble fidèle, qui s’entretient avec Dieu dont il ressent en son âme l’amour répandu par l’Esprit-Saint qui a été donné. « Ayez pitié de moi, écoutez mes supplications (Ps. IV, 2 ) ». Pourquoi cette nouvelle prière, lorsque déjà il s’est dit exaucé et dilaté? Serait-ce à cause de nous dont il est dit : « Si nous espérons ce que nous ne voyons pas encore, nous l’attendons par la patience (Rom. VIII, 25 )? » ou bien demanderait-il à Dieu de perfectionner ce qui est commencé chez celui qui a cru?