4.
Quoi donc? ô homme qui m’écoutes, le Seigneur s’est fait infirme comme toi, sans doute, mais ne va point te comparer à lui. Tu n’es qu’une créature, et lui est créateur. Que le Verbe Fils de Dieu, que ton Dieu se soit fait homme, ce n’est point une raison de comparer cet homme avec toi-même, mais bien de l’élever au-dessus de toi, puisqu’il est ton médiateur, et au-dessus de toute créature, puisqu’il est Dieu : et de comprendre enfin que celui qui se fait homme pour toi, peut bien s’abaisser à prier pour toi; et si la prière n’est point une dérogation à sa dignité, il peut aussi, sans dérogation, dire pour toi ces paroles: « Je vous exalterai, Seigneur, parce que vous m’avez élevé, et que vous n’avez point donné à mes ennemis la joie de ma ruine ». Mais si nous n’entendons bien de quels ennemis il s’agit, nous fausserons ces paroles, en les mettant dans la bouche de Jésus-Christ. Comment le Christ dira-t-il avec vérité: « Je vous exalterai, Seigneur, parce que vous m’avez élevé, et que vous n’avez pas donné à mes ennemis la joie de ma ruine? » Comment cela serait-il vrai, de son humanité, de sa faiblesse, de sa chair? car il fut un sujet de triomphe pour ses ennemis, lorsqu’ils le crucifièrent, qu’ils le saisirent, qu’ils le flagellèrent, qu’ils le souffletèrent, en lui disant : « Prophétise-nous, ô Christ 1 ». Cette joie qu’ils eurent nous force en quelque sorte de croire à la fausseté de ces paroles : « Et vous n’avez pas donné à mes ennemis la joie de ma ruine ». Ensuite, quand il était à la croix, ils passaient ou s’arrêtaient, ils le fixaient en branlant la tête et en disant : « Voyez ce Fils de Dieu, il a sauvé les autres et ne peut se sauver lui-même; qu’il descende de la croix et nous croirons en lui 2 » Ne tressaillent-ils pas en lui jetant ces injures? Que devient donc cette parole : « Je vous exalterai, Seigneur, parce que vous m’avez élevé, et que vous n’avez pas donné à mes ennemis la joie de ma ruine? »