10.
Que fait au contraire le méchant quand l’affliction vient le saisir? Il n’a plus rien au dehors, tout lui manque, et sa conscience n’éprouve aucune consolation : qu’il sorte de lui-même, et tout est misère; qu’il y rentre, et tout est pénible. Il tombe donc justement sous le coup de cette sentence: « Car les méchants périront1 ». Comment ne périrait point celui qui n’a de place nulle part? Ni à l’intérieur ni à l’extérieur, il n’est rien qui le console. Ce qui en effet ne peut nous consoler, nous est étranger. Car tous ceux qui n’ont point Dieu en eux-mêmes, sont esclaves de l’argent, de l’amitié, de la gloire, des biens de la terre; or, tous ces biens corporels ne peuvent nous donner une consolation intérieure semblable à celle qu’éprouvait cet homme dont l’âme était rassasiée, et à qui cette plénitude faisait dire: « Le Seigneur l’a donné, le Seigneur l’a ôté; comme il a plu au Seigneur, ainsi il a été fait; que le nom du Seigneur soit béni2 ». Il ne reste donc pas aux méchants un lieu en dehors d’eux-mêmes, parce qu’ils y rencontrent l’affliction: leur conscience ne peut les consoler; ils sont en désaccord avec eux-mêmes, parce qu’on ne peut être bien avec le péché. Quiconque devient mauvais est mal avec lui-même. Il faut qu’il ait ses tortures, qu’il soit lui-même son propre fléau. Déchiré par sa propre conscience, il devient à lui-même son supplice. Il peut fuir un ennemi, comment se fuir lui-même?