Edition
Masquer
De catechizandis rudibus
CAPUT XVII. Reprehenditur qui velit esse Christianus propter commodum temporale. Christianus vere est, qui religionem profitetur propter futuram requiem. Transit ad narrationem eorum quae credenda sunt. Filius Dei cur homo factus.
26. Sunt enim qui propterea volunt esse christiani, ut aut promereantur homines a quibus temporalia commoda exspectant, aut quia offendere nolunt quos timent. Sed isti reprobi sunt: et si ad tempus eos portat Ecclesia, sicut area usque ad tempus ventilationis paleam sustinet; si non se correxerint, et propter futuram sempiternam requiem christiani esse coeperint, in fine separabuntur. Nec sibi blandiantur quod in area possunt esse cum frumento Dei: quia in horreo cum illo non erunt, sed igni debito destinantur1. Sunt etiam [Col. 0331] alii meliore quidem spe, sed tamen non minore periculo, qui jam Deum timent, et non irrident christianum nomen, nec simulato corde intrant Ecclesiam Dei, sed in ista vita exspectant felicitatem, ut feliciores sint in rebus terrenis, quam illi qui non colunt Deum: ideoque cum viderint quosdam sceleratos et impios ista saeculi prosperitate pollere et excellere, se autem vel minus habere ista vel amittere, perturbantur tanquam sine causa Deum colant, et facile a fide deficiunt.
27. Qui autem propter beatitudinem sempiternam et perpetuam requiem, quae post hanc vitam sanctis futura promittitur, vult fieri christianus, ut non eat in ignem aeternum cum diabolo, sed in regnum aeternum intret cum Christo2, vere ipse christianus est, cautus in omni tentatione, ne prosperis rebus corrumpatur, et ne frangatur adversis, et in abundantia bonorum terrenorum modestus et temperans, et in tribulationibus fortis et patiens. Qui etiam proficiendo perveniet ad talem animum, ut plus amet Deum, quam timeat gehennam: ut etiamsi dicat illi Deus, Utere deliciis carnalibus sempiternis, et quantum potes pecca, nec morieris, nec in gehennam mitteris, sed mecum tantummodo non eris; exhorrescat, et omnino non peccet, non jam ut in illud quod timebat non incidat, sed ne illum quem sic amat offendat: in quo uno est requies, quam oculus non vidit, nec auris audivit, nec in cor hominis ascendit, quam praeparavit Deus diligentibus eum3.
28. De qua requie significat Scriptura, et non tacet, quod ab initio mundi ex quo fecit Deus coelum et terram et omnia quae in eis sunt, sex diebus operatus est, et septimo die requievit4. Poterat enim omnipotens et uno momento temporis omnia facere. Non autem laboraverat, ut requiesceret, quando, Dixit, et facta sunt; mandavit, et creata sunt5: sed ut significaret, quia post sex aetates mundi hujus, septima aetate tanquam septimo die requieturus est in sanctis suis; quia ipsi in illo requiescent post omnia bona opera, in quibus ei servierunt, quae ipse in illis operatur, qui vocat, et praecipit, et delicta praeterita dimittit, et justificat eum qui prius erat impius. Sicut autem cum illi ex dono ejus bene operantur, recte dicitur ipse operari; sic cum in illo requiescunt, recte dicitur ipse requiescere. Nam quod ad ipsum attinet, pausationem non quaerit, quia laborem non sentit. Fecit autem omnia per Verbum suum; et Verbum ejus ipse Christus, in quo requiescunt Angeli et omnes coelestes mundissimi spiritus in sancto silentio. Homo autem peccato lapsus perdidit requiem quam habebat in ejus divinitate, et recipit eam in ejus humanitate: ideoque opportuno tempore, quo ipse sciebat oportere fieri, homo factus et de femina natus est. A carne [Col. 0332] quippe contaminari non poterat, ipse carnem potius mundaturus. Ipsum antiqui sancti venturum in revelatione Spiritus cognoverunt, et prophetaverunt; et sic salvi facti sunt credendo quia veniet, sicut nos salvi efficimur credendo quia venit: ut diligeremus Deum, qui sic nos dilexit, ut unicum Filium suum mitteret, qui humilitate nostrae mortalitatis indutus, et a peccatoribus et pro peccatoribus moreretur. Jam enim olim ab ineuntibus saeculis mysterii hujus altitudo praefigurari praenuntiarique non cessat.
Traduction
Masquer
Méthode pour enseigner aux catéchumènes les éléments du Christianisme
CHAPITRE XVII.
CONDAMNATION DE CEUX QUI EMBRASSENT LA FOI EN VUE D’UN INTÊRET HUMAIN. — LE REPOS ÉTERNEL, BUT DU VRAI CHRÉTIEN. — EXPOSITION DES DOGMES, ET D’ABORD DE L’INCARNATION.
-
Il se rencontre en effet des gens qui embrassent le christianisme pour se concilier certains personnages dont ils attendent des avantages temporels, ou pour éviter de déplaire à des protecteurs puissants. Ce sont de faux chrétiens: l’Eglise les supporte pour un temps comme l’aire garde la paille, jusqu’au jour où le vanneur en sépare le grain ; mais s’ils ne se corrigent pas, s’ils ne songent pas à n’avoir en vue dans le christianisme que le repos à venir, ils seront un jour séparés du bon grain. Qu’ils ne se flattent pas d’être gardés dans l’aire avec le pur froment de Dieu : loin d’être admis dans le grenier céleste, ils iront dans le feu auquel les destinent leurs péchés1. D’autres, quoique animés d’une espérance plus noble, ne laissent pas de courir un danger aussi grave ; je veux parler de ceux qui, ayant la crainte de Dieu et ne songeant ni à se jouer du nom de chrétien, ni à se couvrir du masque de l’hypocrisie pour entrer dans l’Eglise; attendent le bonheur dès ici-bas: ils voudraient jouir sur la terre d’une prospérité plus brillante que ceux qui ne rendent à Dieu aucun hommage; aussi l’exemple de quelques impies,élevés,malgré leurs crimes, à un degré de gloire et de puissance humaines qu’ils ne peuvent atteindre ou dont-ils se voient précipités, trouble leur imagination, comme Si leur piété ne produisait aucun fruit, et fait chanceler leur foi.
-
Aspirer à devenir chrétien, en vue du bonheur sans fin et de l’inaltérable repos qui est promis aux saints après la mort, sans autre but que d’entrer dans le royaume éternel avec Jésus-Christ et de ne point aller avec Satan au feu éternel2, voilà le vrai chrétien, vigilant dans les tentations, afin de n’être jamais ni corrompu parla prospérité, ni abattu par les revers; toujours tempérant et maître de lui-même au sein des félicités de ce monde, ferme et résigné dans les tribulations. En avançant dans la pratiqué de la vertu, il finira par aimer Dieu plus: encore qu’il ne craint l’enfer, et si Dieu venait à lui dire : « Jouis éternellement des plaisirs de la chair, pèche en liberté, sans craindre la mort ni le feu éternel, à la seule condition de n’habiter jamais avec moi » ; il reculerait d’horreur et s’abstiendrait du péché, moins pour éviter la peine qu’il redoute que pour ne pas offenser Celui qu’il aime, l’Etre en qui seul réside ce repos « que l’oeil de l’homme n’a point vu, que son oreille n’a point entendu, que son coeur n’a point compris, et que Dieu a préparé à ceux qui l’aiment3».
-
Ce repos est marqué fort clairement dans l’Ecriture, qui nous apprend que Dieu, à l’origine du monde, quand il créa le ciel et la terre avec tout ce qu’ils renferment, travailla pendant six jours et se reposa le septième4. Dans sa toute-puissance, Dieu n’avait besoin que d’un instant pour tout créer. Or, il n’a pas travaillé pour rentrer ensuite dans le repos, lui qui « a dit, et tout a été fait, a ordonné, et tout est sorti du néant5»; mais pour nous révéler que, les six âges du monde écoulés, il consacrerait le septième au repos avec ses saints, comme il y avait déjà consacré le septième jour, En effet, les saints trouveront le repos au sein du Dieu qu’ils ont servi par les bonnes oeuvres qu’il a lui-même opérées en eux, puisque c’est lui qui appelle, qui choisit; remet les fautes passées et justifie les pécheurs. Si donc on a raison de dire que Dieu agit dans le coeur de ceux qui n’accomplissent le bien que par un don de sa grâce, on doit également dire qu’il se repose avec les bienheureux qui goûtent le repos dans son sein : pour lui, en effet, il est étranger à la fatigue et n’a pas besoin de mettre un terme à ses travaux. C’est par son Verbe qu’il a tout créé, et le Verbe est Jésus-Christ lui-même, en qui les anges et les purs esprits du ciel se reposent et goûtent le silence de la sainteté. Déchu par sa faute, l’homme a perdu la paix qu’il devait au Verbe divin et la recouvre par les mérites du Verbe fait homme: aussi, est-ce au moment marqué dans ses desseins éternels, que le Verbe s’est fait homme et est né d’une femme, sans que la corruption de la chair pût atteindre Celui qui devait la purifier. Les saints de l’Ancien Testament ont été instruits de sa venue par les révélations du Saint-Esprit et l’ont annoncée: ils ont été sauvés en croyant qu’il viendrait, comme nous le sommes en croyant qu’il est venu; ils nous ont ainsi appris à aimer Dieu, qui a poussé l’amour pour nous jusqu’à envoyer son Fils unique revêtir la bassesse de notre humanité, et se sacrifier pour les pécheurs de la main des pécheurs mêmes. Et en effet, dès les temps les plus reculés, ce mystère nous est continuellement révélé dans sa profondeur par des figures et des prophéties.