CHAPITRE XVIII. LA POLYGAMIE MAINTENANT DÉFENDUE.
21. Nous sommes tous. appelés à ne former qu'une seule cité, n'ayant, pour Dieu, qu'un coeur et qu'une âme1. Après la mort, cette unité deviendra telle que les pensées les plus intimes seront perçues par tous, sans rencontrer nulle part la moindre divergence. Voilà pourquoi, sous le Nouveau Testament, le sacrement de mariage exige si rigoureusement un seul homme et une seule femme, qu'un homme qui aurait eu plusieurs femmes ne pourrait être élevé à l'épiscopat2. Cette loi est- si formelle que plusieurs auteurs ont cru pouvoir l'appliquer au mariage contracté avant d'être chrétien, et soutiennent qu'un catéchumène ou un païen qui aurait plusieurs femmes, ne pourrait, étant devenu chrétien, arriver à l'épiscopat. On parle ici au point de vue du sacrement, et non au point de vue du péché, puisque tous les péchés sont effacés par le baptême. Celui qui a dit : .«En prenant une épouse tu n'as point péché; en se mariant une vierge ne pèche pas; quelle fasse comme elle le désire, elle ne pèche pas en se mariant3 »; celui-là a suffisamment prouvé que le mariage n'est point un péché.
Mais considérons la sainteté du sacrement. De même qu'une femme qui aurait été souillée avant son baptême, ne pourrait, après son baptême, être consacrée parmi les vierges; de même il paraît logique de croire, que si l'on a pu, sans péché, avoir plusieurs femmes, on a cependant perdu tout droit au sacrement de l'Ordre; on a pu mener une vie irréprochable, mais on manqué d'un caractère nécessaire à l'ordination ecclésiastique. La pluralité des femmes, chez les prophètes, figurait la pluralité des Eglises, réunies toutes sous l'empire du Christ; ainsi l'évêque qui n'a eu qu'une seule femme figure l'union de tous les peuples au Christ, punique époux. Cette unité arrivera à sa perfection quand les ténèbres auront dévoilé leurs secrets, quand toutes les pensées du coeur se seront manifestées et que chacun recevra de Dieu sa louange4. Maintenant, sans que la charité en soit blessée, il s'excite des dissensions publiques ou secrètes entre ceux qui doivent plus tard ne former qu'un dans un seul; mais alors il n'y en aura plus aucune. De même que, dans les temps anciens, la pluralité des femmes figurait la multitude soumise à Dieu, au sein de toutes les nations de la terre; de même aujourd'hui l'unité de mariage figure l'unité que nous formerons tous dans la cité céleste, sous le regard et la puissance de Dieu. Comme il est impossible de servir deux ou plusieurs maîtres; de même il n'a jamais été, il n'est pas, il ne sera jamais permis à une femme d'avoir simultanément plusieurs maris. Apostasier le culte d'un seul Dieu et se jeter dans une superstition adultère a toujours été un crime. Même dans le but de se former une postérité plus nombreuse, jamais nos saints n'ont imité le Romain Caton, qui, de son vivant, livrait sa femme à un autre pour que celui-ci en reçût des enfants. Dans le mariage chrétien, la sainteté du sacrement l'emporte sur la fécondité.