XX.
Il est donc bien constant que la discipline des Apôtres ordonne sévèrement au préposé de faire respecter le temple de Dieu, et retranche impitoyablement de l'Eglise tout sacrilège contre la pudicité, sans laisser aucun espoir de réhabilitation. Je veux cependant, comme par surcroît, produire ici le témoignage d'un compagnon des Apôtres, bien propre à confirmer, par une sentence presque aussi vénérable, la discipline des maîtres. Nous avons encore une lettre de Barnabe aux Hébreux, Barnabe, homme d'une autorité assez grave, pour que Paul l'ait placé à côté de lui dans la pratique de la tempérance: « N'y aurait-il donc que Barnabe et moi qui n'aurions pas le droit d'agir ainsi? » D'ailleurs l'épître de Barnabe jouit dans les églises de plus d'estime que ce pasteur, défenseur apocryphe des adultères. Avertissant donc les disciples de laisser toutes les instructions que l'on donne aux novices dans la foi, pour tendre de plus en plus vers la perfection, sans jeter de nouveau les fondements de la pénitence par des œuvres mortes, il leur dit: « Il est impossible que ceux qui ont été une fois éclairés, qui ont goûté le don du ciel, qui ont été faits participants du Saint-Esprit; qui se sont nourris de la sainte parole de Dieu, et ont failli vers la fin des temps, soient admis une seconde fois à la pénitence, parce qu'autant qu'il est en eux, ils crucifient de nouveau le Fils de Dieu, et s'exposent à l'ignominie. Car, lorsqu'une terre abreuvée par la pluie produit les plantes nécessaires à ceux qui la cultivent, elle reçoit la bénédiction de Dieu. Mais quand elle ne produit que des ronces et des épines, elle est abandonnée et approche de la malédiction; à la fin on y met le feu. » Celui qui apprit des Apôtres et enseigna avec les Apôtres une pareille maxime ne connaissait point assurément de pénitence, promise par les Apôtres à l'adultère et au fornicateur. En effet, il interprétait très-bien la loi, et il en conservait les figures dans toute leur vérité.
Enfin, le lépreux de la loi ancienne était un symbole de cette discipline. «Au contraire, si la lèpre s'accroît et se répand, si elle couvre toute la peau depuis la tête jusqu'aux pieds, et tout ce qui paraît aux yeux, le prêtre le verra, et le jugera envahi par une lèpre qui ne souille pas, parce qu'elle est toute changée en blancheur, et à cause de cela, cet homme sera pur. Mais quand la chair vive aura paru en lui, alors il sera souillé. » L'écrivain sacré voulait nous faire comprendre par là que l'homme qui a passé des habitudes anciennes de la chair à la blancheur de la foi, considérée dans le monde comme un vice et une souillure, et qui a été entièrement renouvelé, est pur, du moment qu'il n'est plus de diverse couleur, ni mêlé du vieil homme et de l'homme nouveau. Si, au contraire, il reparaît quelque chose de ce qui était ancien, après que ce qui était ancien a été détruit, alors ce qui dans la chair a été regardé comme mort, au péché, est déclaré impur, et ne peut plus être purifié par le prêtre. La fornication qui se montre de nouveau, et qui souille l'unité de la couleur nouvelle par qui elle avait été bannie, est donc un vice qui n'admet plus la purification.
Il en est de même pour les maisons. « Lorsque l'on aura annoncé au prêtre qu'il existe sur les murs d'une maison comme des taches et des ouvertures, avant d'y entrer pour l'examiner, il commandera d'enlever tout ce qui s'y trouve, afin que tout ce qui s'y trouve ne soit pas souillé. Lorsque, entré dans la maison, il verra sur les murs des ouvertures avec des taches pâles et rougeâtres, et plus enfoncées que le reste du mur, il sortira hors de la porte de la maison, et aussitôt il la fermera durant sept jours. Il reviendra au septième, et il l'examinera; s'il trouve la lèpre augmentée, il commandera d'arracher les pierres du lieu où est la lèpre, et il les fera jeter hors de la ville, dans un lieu immonde, et il fera remettre d'autres pierres à la place de celles qui ont été ôtées, et il fera enduire la maison avec une autre terre. » Il faut, en effet, lorsque nous nous approchons de Jésus-Christ, pontife suprême du Père, que, dans l'espace d'une semaine, nous retirions auparavant de la maison du vieil homme tous les obstacles qui pourraient gêner sa présence, afin que ce qui demeure de la maison de notre ame et de notre chair soit pur. Aussitôt que le Verbe de Dieu y est entré, et y rencontre des taches rougeâtres et des plaies ardentes, il faut arracher et jeter hors de nous les pensées mortelles et sanglantes ( voilà pourquoi l'Apocalypse place la mort sur un cheval verdâtre, et l'ange exterminateur sur un cheval rouge comme le feu), et à ces pensées perverses substituer les pierres polies, solides, adaptées à l'édifice, telles enfin qu'elles sont lorsqu'elles deviennent des fils d'Abraham, afin qu'ainsi l'homme soit habile à recevoir Dieu. Que si, après cette réforme et cette réédification, le prêtre trouve encore dans la même maison quelque chose des taches et de la lèpre précédentes, il la déclare impure, il ordonne qu'on en retire tout ce qu'elle renferme, qu'on en arrache les pierres et tout ce qui entre dans sa construction, puis, qu'on jette tous ces débris dans un lieu immonde. Voilà l'homme tout à la fois chair et ame, qui, après la réception du baptême et l'entrée des prêtres, reprenant, malgré sa régénération, les premières souillures de la chair, est précipité hors de la ville, dans un lieu immonde, c'est-à-dire qu'il « est livré à Satan pour la perdition de sa chair, » et qu'après sa ruine il n'est plus réédifié dans l'Eglise.
Même symbole dans l'homme qui a dormi avec une femme esclave, destinée à un autre, non encore rachetée à prix d'argent ni mise en liberté, « Il lui sera pardonné, dit le Lévitique, et il ne mourra point, » parce que cette femme n'est point encore affranchie par celui auquel elle était réservée. En effet, la chair n'ayant pas encore été rachetée par Jésus-Christ, qui se la réservait, elle se souillait impunément; mais une fois rachetée, il n'y a plus de pardon pour elle.
