CHAPITRE XLV. INCONSÉQUENCE DE FAUSTE.
Passons, mais non sans répugnance, à un autre subterfuge de Fauste, qu'il regarde, ce me semble, comme un tour des plus heureux, et auquel le réduit l'éclat éblouissant des prophéties. Il ne faut pas qu'on s'imagine qu'il ait dit quelque choses parce qu'on se donne la peine de lui répondre. Quel est en effet l'homme assez insensé pour avancer que la foi est faible quand on ne croit pas au Christ sans témoignage? Je voudrais que les Manichéens me disent sur quel témoignage ils auraient eux-mêmes cru au Christ. Ont-ils entendu la voix du ciel dire : « Celui-ci est mon Fils[^2]? » Fauste veut en effet que nous ajoutions surtout foi à cette voix, lui qui n'admet pas de témoignages humains sur le Christ, comme si la connaissance de cette voix avait pu nous parvenir sans le témoignage de l'homme, et quand il est manifeste qu'elle ne nous est pas parvenue autrement, au point de faire dire à l'Apôtre : «Mais comment invoqueront-ils Celui en qui ils n'ont point cru? Ou comment croiront-ils à celui qu'ils n'ont pas entendu ? Et comment entendront-ils, si personne ne les prêche ? Et comment prêchera-t-on, si on n'est pas envoyé?
Comme il est écrit: Qu'ils sont beaux les o pieds de ceux qui annoncent la paix, qui annoncent le bonheur[^1] ! » Vous voyez clairement comment le témoignage;des Prophètes appuie la prédication de la doctrine apostolique. Pour ne pas livrer au mépris et faire traiter de fables ce qu'annonçaient les Apôtres, on démontrait que les Prophètes l'avaient dit d'avance ; parce que, bien que les miracles vinssent à l'appui, il n'eût pas manqué de gens (comme on en entend encore aujourd'hui), qui les eussent attribués tous à la puissance de la magie, si le témoignage des Prophètes ne leur eût interdit une telle pensée. Personne, en effet, n'eût osé dire que les Apôtres s'étaient créé, à l'aide de la magie, longtemps avant leur naissance, des Prophètes pour les annoncer. Mais Fauste nous défend de croire au vrai Christ sur le témoignage des Prophètes hébreux, lui qui a cru aux erreurs des Perses sur le faux Christ.
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Matt. III, 17, XVII, 5.
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Rom. X, 14, 15.