CHAPITRE IX. CALOMNIE DE FRUSTE CONTRE MOÏSE.
Mais quelles sont donc ces choses divines que Moïse a outragées, comme Fauste l'en accuse, en disant « qu'il n'a jamais rien respecté dans les choses humaines ni dans les choses divines? » Fauste a dit cela et a passé outre : il ne s'est pas donné la peine de rien prouver, il n'a pris aucun souci de rien démontrer. Or, nous savons, nous, que Moïse a décerné de pieux éloges à tout ce qui est vraiment divin, et qu'il a gouverné avec justice les choses humaines selon les besoins de son temps et dans la mesure des grâces qui lui étaient départies. Que les Manichéens me forcent à le leur apprendre, comme ils se sont eux-mêmes efforcés de prouver ce que Fauste objecte, avec précaution, il est vrai, mais par là même, imprudemment: car il se perçait de ses propres armes. Heureux, en effet, le coeur pénétrant pour la vérité, malheureux celui qui l'est contre la vérité. Fauste n'a pas dit que Moïse n'a épargné personne, ni hommes ni dieux, mais qu'il n'a rien respecté, ni « dans les choses humaines, ni dans les choses divines ? ». Si, en effet, il s'était borné à dire qu'il n'a pas respecté Dieu, il serait facile de le convaincre .de calomnie: car on prouverait que Moïse honore et prêche partout le vrai Dieu qui a fait le ciel et la terre. S'il disait que Moïse n'a épargné aucun des dieux, il se trahirait aux yeux des chrétiens, en faisant voir qu'il adore lui-même les dieux, dont Moïse a interdit le culte, et alors, les poussins se réfugiant sous les ailes de leur mère, l'Église catholique, il ne rassemblerait pas des petits qui ne sont pas les siens. Afin donc de tendre un piége aux petits enfants, il a dit que Moïse n'a rien respecté dans les choses divines, afin que les chrétiens, ne voyant pas là une idolâtrie manifeste, n'eussent pas horreur d'un impiété si opposée à la religion chrétienne, et pour trouver appui contre nous chez les païens, qui savent que Moïse a dit bien des choses vraies et justes contre les idoles et les dieux des nations, qui sont des démons.