CHAPITRE II. FAUSTE REVIENT A SES OBJECTIONS CONTRE L'ABSTINENCE DES CATHOLIQUES.
Mais peut-être l'ignorance les excusait-elle; la foi chrétienne n'existant pas encore pour leur apprendre que tout est pur pour ceux qui sont purs, ils ont pu croire qu'il existait des choses immondes. Mais vous, comment vous excuser, quand Paul, s'écriant qu'il n'y a rien d'impur, qualifiant de doctrine de démons l'abstinence des aliments[^2], et appelant souillés ceux qui croient qu'il y a quelque chose de souillé, non-seulement vous vous abstenez, comme je l'ai dit, mais vous en tirez même gloire et vous croyez d'autant plus agréables au Christ que vous portez plus loin cette abstinence, c'est-à-dire que votre esprit et votre conscience sont plus souillés, à s'en tenir du moins au texte de l'Apôtre ? Et j'ajoute que trois religions se partageant le monde, à savoir le Judaïsme, le Christianisme et le Paganisme, et que toutes les trois faisant consister la purification de l'âme dans la chasteté et l'abstinence, quoique sous des formes très-différentes, il est impossible de savoir de laquelle des trois provient ce principe qu'il n'y a rien d'impur? Car ce n'est certainement pas du Judaïsme, ni du Paganisme, puisqu'il établit aussi des distinctions entre les aliments, et qu'il importe peu qu'il soit, sur certains animaux, en désaccord avec la loi hébraïque. Reste donc la foi chrétienne : or, si tu penses qu'il n'y a réellement rien de souillé pour elle, tu es tout d'abord forcé de convenir qu'il n'y a pas de chrétiens chez vous. Car, pour ne rien dire du reste, vous regardez tous comme une grande souillure de toucher à des chairs d'animaux étouffés ou sacrifiés aux idoles[^1]; ou si la loi chrétienne vous autorise à le faire, il faut donc encore chercher en dehors d'elle le principe qui supprime absolument toute abstinence d'objets immondes. Comment donc Paul a-t-il pu émettre un principe qui ne convient à aucune religion? En effet, l'Apôtre, en passant du Judaïsme au Christianisme, a moins changé de religion que de rite. Mais l'auteur de ce chapitre me semble ne s'être appuyé sur aucun système religieux.
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I Tim. IV, 1, 3.
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Act. XV, 29.