XXXIV.
Alléguera-t-il, contre l'Apôtre, la chaire de pestilence ? disputera-t-il sur la qualité des figures ? soutiendra-t-il que l'Apôtre n'aurait pas dû chercher dans des choses honteuses la figure de choses honnêtes ? Mais quoi ! il proclame honteuses les relations conjugales d'Abraham avec Sara son épouse, en qui le Docteur des nations voit la figure de notre mère, l'éternelle Jérusalem1 ! Mais cette parabole assombrit le front et crispe le visage de notre docteur de pestilence ; que doit-il devenir, quand il entend le même Apôtre parler en ces termes de l’homme et de la femme : « Ils seront deux dans une seule chair » ; puis ajouter aussitôt . « Ce sacrement est grand, mais je dis en Jésus-Christ, et dans son Église2?» N'est-il pas à regretter que dans la connaissance de ces sacrements, c'est-à-dire de ces signes sacrés, et dans ces règles de convenance et d'honnêteté dont le langage ne devrait jamais se départir, l’Apôtre se soit montré d'une habileté si inférieure à celle de notre adversaire? Que ce dernier se retire avec ses pareils qui s'écriaient : « Ce discours est dur, et qui peut l'entendre3? » Pour nous, écoutons avec respect, et comprenons que les deux Testaments sont figurés dans les deux fils d'Abraham et dans ses deux épouses. C'est ainsi, quoi qu'en disent nos adversaires, que dans les deux qui deviennent une seule chair, nous ne voyons aucune inconvenance à trouver l'image de l'union de Jésus-Christ et de son Église; de même c'est avec joie que nous entendons Jésus-Christ, le médiateur entre Dieu et les hommes, nous promettre son corps à manger et son sang à boire; c'est avec joie surtout que nous le recevons dans le sacrement de son amour, quoiqu'il paraisse plus horrible de manger la chair humaine que de l'immoler, et de boire le sang humain que de le verser. Il suit delà que dans toutes les Écritures, le parti qui seul nous paraît sage, c'est d'accepter toutes les réalités ou .toutes les figures, en les interprétant selon les règles immuables d'une foi vive et certaine; et, si nous avons du mépris, c'est pour cet auteur qui ne sait même pas ce qu'il dit, qui ne comprend pas ce qu'il lit, et malgré son évidente incapacité, se mêle de traiter des figures. Puisqu'il soutient que chaque chose doit être représentée par des figures qui lui conviennent, pourquoi donc se sert-il d'encre noire pour écrire le nom de,Dieu, au lieu de se servir d'un or éclatant; car: « Dieu est la lumière, et il n'y a en lui aucunes ténèbres4? » Cependant voilà l'homme qui soutient que l'Apôtre, pour se mettre à la portée des faibles et des imparfaits, a eu recours à une multitude de paroles fausses et con. damnables, et cela, parce qu'il a montré dans ses lettres, par les témoignages qu'il en a extraits, que la loi et les Prophètes méritent toute notre vénération, et sont réellement des écritures inspirées de Dieu. Il ne voit donc pas que si l'on appliquait son système à tous les anciens livres révélés de Dieu, il n'en est pas un seul qui ne méritât d'être interdit sous le vain prétexte de paroles inconvenantes. Que quelqu'un lui oppose le même raisonnement et lui dise : Tout ce qui vous choque dans la loi et les Prophètes est complètement faux, mais l'Esprit-Saint ne l'a pas moins inspiré, en considération des faibles et des imparfaits. Qu'aurait-il à répondre? Qu'il avoue donc que s'il est une règle d'interprétation qui soit fausse, c'est la sienne, et que c'est contre lui que se tourne le glaive qu'il fait scintiller dans sa main folle et inexpérimentée.