Edition
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De Trinitate
IX.
[IX 16] Aliud est enim ex intimo ac summo causarum cardine condere atque administrare creaturam, quod qui facit solus creator est deus; aliud autem pro distributis ab illo viribus et facultatibus aliquam operationem forinsecus admovere ut tunc vel tunc sic vel sic exeat quod creatur. Ista quippe originaliter ac primordialiter in quadam textura elementorum cuncta iam creata sunt sed acceptis opportunitatibus prodeunt. Nam sicut matres gravidae sunt fetibus, sic ipse mundus gravidus est causis nascentium quae in illo non creantur nisi ab illa summa essentia ubi nec oritur nec moritur aliquid nec incipit esse nec desinit. Adhibere autem forinsecus accedentes causas quae tametsi non sunt naturales tamen secundum naturam adhibentur ut ea quae secreto naturae sinu abdita continentur erumpant quodam modo et foris creentur explicando mensuras et numeros et pondera sua quae in occulto acceperunt ab illo qui omnia in mensura et numero et pondere disposuit, non solum mali angeli sed etiam mali homines possunt sicut exemplo agriculturae supra docui.
[17] Sed ne de animalibus quasi diversa ratio moveat quod habent spiritum vitae cum sensu appetendi quae secundum naturam sunt vitandique contraria, etiam hoc est videre quam multi homines noverint ex quibus herbis aut carnibus aut quarumque rerum quibuslibet sucis et humoribus vel ita positis vel ita obrutis vel ita contritis vel ita commixtis quae animalia nasci soleant. Quorum se quis tam demens audeat dicere creatorem? Quid ergo mirum si quemadmodum potest nosse quilibet nequissimus homo unde illi vel illi vermes muscaeque nascantur, ita mali angeli pro subtilitate sui sensus in occultioribus elementorum seminibus norunt unde ranae serpentesque nascantur, et haec per certas et notas temperationum opportunitates occultis motibus adhibendo faciunt creari non creant?
Sed illa homines quae solent ab hominibus fieri non mirantur. Quod si quisquam celeritates incrementorum forte miratur quod illa animantia tam cito facta sunt, attendat quemadmodum et ista pro modulo facultatis humanae ab hominibus procurentur. Unde enim fit ut eadem corpora citius vermescant aestate quam hieme, citius in calidioribus quam in frigidioribus locis? Sed haec ab hominibus tanto difficilius adhibentur quanto desunt sensuum subtilitates et corporum mobilitates in membris terrenis et pigris. Unde qualibuscumque angelis vicinas causas ab elementis contrahere quanto facilius est tanto mirabiliores in huiusmodi operibus eorum exsistunt celeritates.
[18] Sed non est creator nisi qui principaliter ista format, nec quisquam hoc potest nisi ille penes quem primitus sunt omnium quae sunt mensurae, numeri et pondera et ipse est unus creator deus ex cuius ineffabili potentatu fit etiam ut quod possent hi angeli si permitterentur ideo non possint quia non permittuntur. Neque enim occurrit alia ratio cur non potuerint facere minutissimas muscas qui ranas serpentesque fecerunt nisi quia maior aderat dominatio prohibentis dei per spiritum sanctum, quod etiam ispi magi confessi sunt dicentes: Digitus dei est hoc. Quid autem possint per naturam nec possint per prohibitionem, et quid per ipsius naturae suae condicionem facere non sinantur homini explorare difficile est, immo vero impossibile nisi per illud donum dei quod apostolus commemorat dicens: Alii diiudicatio spirituum. Novimus enim hominem posse ambulare et neque hoc posse si non permittatur, volare autem non posse etiamsi permittatur. Sic et illi angeli quaedam possunt facere si permittantur ab angelis potentioribus ex imperio dei; quaedam vero non possunt nec si ab eis permittantur, quia ille non permittit a quo illis est talis naturae modus, qui etiam per angelos suos et illa plerumque non permittit quae concessit ut possint.
[19] Exceptis igitur illis quae usitatissimo transcursu temporum in rerum naturae ordine corporaliter fiunt, sicuti sunt ortus occasusque siderum, generationes et mortes animalium, seminum et germinum innumerabiles diversitates, nebulae et nubes, nives et pluviae, fulgura et tonitrua, fulmina et grandines, venti et ignes, frigus et aestus, et omnia talia; exceptis etiam illis quae in eodem ordine rara sunt, sicut defectus luminum et species inusitatae siderum et monstra et terrae motus et similia; exceptis ergo istis omnibus quorum quidem prima et summa causa non est nisi voluntas dei - unde et in psalmo cum quaedam huius generis commemorata essent: Ignis, grando, nix, galcies, spritus tempestatis, ne quis ea vel fortuitu, vel causis tantummodo corporalibus vel etiam spiritalibus tamen praeter voluntatem dei exsistentibus agi crederet, continuo subiecit: Quae faciunt verbum eius.
Übersetzung
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De la trinité
CHAPITRE IX.
TOUTES LES CAUSES ONT LEUR PRINCIPE EN DIEU.
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Et en effet, autre est le pouvoir de créer et de régir une créature quelconque, comme cause première et efficace de toute existence : or, ce pouvoir n’appartient qu’au Dieu qui a créé toutes choses; et autre est la faculté d’agir au dehors dans la limite des forces et des moyens qu’il nous donne, en sorte que nous fassions à notre gré paraître ou disparaître cet être que le Seigneur aura créé et que nous en changions la forme et les qualités. Et en effet, cet être existe originairement et primitivement dans l’ensemble des éléments, et il lui suffit de rencontrer un milieu favorable pour qu’il se produise soudain. Ne disons-nous pas qu’une mère est enceinte de son enfant? et de même, l’univers est plein d’embryons qui ne demandent qu’à se développer, et dont la création est l’oeuvre de cette essence suprême sans laquelle rien ne saurait ni naître, ni mourir, ni venir à l’existence, ni disparaître. Mais il faut raisonner autrement de l’emploi extérieur des causes secondes. Quoique souvent miraculeuses, elles n’en suivent pas moins les lois de la nature, en ce sens qu’elles favorisent le développement rapide et soudain de certains êtres qui reposaient cachés et inconnus dans le sein de la nature. Or, nous disons que ces êtres sont créés, parce qu’ils s’épanouissent au dehors par l’extension des (395) forces vitales que leur a secrètement distribuée avec poids, nombre et mesure, Celui qui dis pose de toutes choses avec sagesse, justice et équité. Au reste, un tel emploi des cause; secondes peut appartenir aux mauvais ange; et aux pécheurs, ainsi que je l’ai prouvé par l’exemple de l’agriculture.
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Quant aux animaux, il nous semblerait tout d’abord assez difficile d’expliquer comment ils recherchent instinctivement ce qui peut leur plaire, et évitent ce qui peut leur déplaire. Mais combien de savants ont étudié cette question , et peuvent nous dire quelles plantes, quelles viandes, quelles combinaisons, et quelles affinités ou répulsions des fluides et des éléments donnent naissance aux animaux? Et néanmoins, qui a jamais considéré ces savants comme les créateurs du règne animal? Au reste, si l’homme, même le plus impie, peut expliquer la formation des vers et des mouches, est-il étonnant que les mauvais anges aient connu, en raison de la subtilité de leur esprit, en quels lieux et en quels éléments reposaient les embryons des grenouilles et des serpents. Ce sont ces embryons qu’ils placèrent, il est vrai, dans des conditions si favorables qu’ils en accélérèrent le développement ; mais en réalité, ils ne les créèrent pas. Toutefois, cette oeuvre parut un véritable prodige, parce qu’elle était extraordinaire, car nous n’admirons point ce que nous faisons habituellement.
Peut-être aussi vous étonnerez-vous d’un développement si prompt, et de ces éclosions spontanées; mais observez que même avec des moyens purement humains, nous obtenons de semblables résultats. D’où vient, en effet, que les vers s’engendrent plus facilement dans les cadavres l’été que l’hiver, et à une température chaude qu’à une exposition froide? Mais ici, la puissance de l’homme est d’autant plus faible que son intelligence est moins étendue, et que l’engourdissement de ses membres se prête plus difficilement au rapide mouvement des corps. Au contraire, plus il est facile aux anges, bons ou mauvais, d’agir sur les éléments et les causes secondes, plus aussi la célérité de leurs opérations nous paraît merveilleuse.
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Cependant le seul et unique Créateur est le Dieu qui forme le germe de tous ces différents êtres, et qui ne partage avec personne sa puissance créatrice. Car c’est en lui seul que reposent dès le commencement l’ordre de la création, la sagesse de ses plans et l’équilibre de ses forces. C’est encore lui seul qui veut bien communiquer aux anges quelque extension de son ineffable pouvoir; en sorte qu’ils ne font que ce qu’il daigne leur permettre de faire, et qu’ils deviennent impuissants, dès qu’il leur retire cette permission. Comment, en effet, expliquer autrement, que les magiciens de Pharaon n’aient pu rassembler des moucherons, après avoir produit des grenouilles et des serpents? Certes, il faut ici reconnaître la défense absolue de Dieu et l’action immédiate de l’Esprit-Saint. Au reste, ils l’avouèrent eux-mêmes, quand ils dirent: «Le doigt de Dieu est là ( Exod., VII, 12 ) ». Mais que peuvent faire les anges en vertu même de leur nature? De quoi sont-ils incapables sans une permission expresse? et quelles opérations sont incompatibles avec leur condition d’êtres spirituels? ce sont autant de questions qu’il est impossible à l’homme de résoudre, à moins qu’il n’ait reçu de Dieu ce don spécial que l’Apôtre nomme « le discernement des esprits (I Cor., XII, 10 ) ». Nous savons en effet que l’homme possède la faculté de marcher, et qu’on peut lui en ôter l’exercice : mais nous n’ignorons point qu’il ne pourrait voler, quand même on lui en donnerait la permission. Et de même les anges inférieurs peuvent faire certaines choses, si Dieu le leur permet par l’intermédiaire des anges supérieurs, et ils ne peuvent en faire quelques autres, même avec l’autorisation de ceux-ci, parce que le Seigneur a voulu limiter l’exercice de leur puissance. C’est que souvent il ne permet pas aux esprits angéliques de faire tout ce qui serait dans le droit et les attributions de leur nature.
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Au reste nous devons reconnaître l’action des anges dans les divers phénomènes qui accompagnent ordinairement le cours des saisons et l’ordre de la nature. Tels sont le lever et le coucher des astres, la naissance et la mort des hommes et des animaux, la reproduction si variée des plantes et des arbres, les nuées et les nuages, la neige et la pluie, la foudre et le tonnerre, les éclairs et la grêle, le vent et le feu, le froid et le chaud. Tels sont encore quelques autres phénomènes qui ne se montrent que plus rarement, comme les éclipses, les comètes, les tremblements de terre, la naissance des monstres, et autres (396) prodiges de ce genre. J’observe néanmoins que la cause première et souveraine de to us ces phénomènes est la volonté de Dieu. Aussi le psalmiste, après en avoir énuméré plusieurs, « le feu, la grêle, la neige, la gelée et le souffle des tempêtes » a-t-il soin d’ajouter « qu’ils obéissent à la parole du Seigneur ( Ps., CXLVIII, 8 )». Il prévient ainsi l’erreur de ceux qui, en dehors de la volonté divine, les attribueraient soit au hasard, soit à des causes purement physiques, ou même à l’action unique des anges.