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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) De Trinitate De la trinité
Livre IX

CHAPITRE VI.

CONNAITRE UNE CHOSE EN ELLE-MÊME ET LA CONNAITRE DANS L’ÉTERNELLE VÉRITÉ. C’EST D’APRÈS LES RÈGLES DE L’ÉTERNELLE VÉRITÉ QU’IL FAUT JUGER MÊME DES CHOSES CORPORELLES.

  1. Cependant, en se connaissant et en s’aimant, l’âme humaine ne connaît et n’aime point une chose immuable; et autre est la manière dont un homme, attentif à ce qui se passe en lui, manifeste son âme, autre la manière dont il définit l’âme humaine d’après une notion spéciale ou générale. Ainsi quand il me parle de son âme propre, qu’il me dit comprendre oit ne pas comprendre ceci ou cela, vouloir ou ne pas vouloir ceci ou cela, je le crois sur parole; mais quand il dit la vérité sur l’âme humaine ou en particulier ou en général, je reconnais la justesse de son langage et je l’approuve. Il est donc clair qu’autre chose est ce qu’il voit en soi, qu’il peut exprimer et qu’un autre croira sur sa parole sans le voir, autre chose ce qu’il voit dans la vérité elle-même et qu’un autre peut voir aussi car l’un subira les changements que le temps amène et l’autre reste immuable dans l’éternité. Car ce n’est pas en voyant des yeux du corps une multitude d’esprits, que nous nous formons par analogie une notion générale ou spéciale, de l’âme humaine; mais nous voyons l’immuable vérité, d’après laquelle nous établissons, aussi parfaitement que cela nous est possible, non qu’elle est l’âme de chaque homme, mais qu’elle doit être par des raisons éternelles.

  2. Quant aux images des choses matérielles introduites par l’entremise des sens corporels, infusées en quelque sorte dans notre mémoire, et d’après lesquelles nous nous figurons d’une manière arbitraire les objets que nous n’avons pas vus, ou autrement qu’ils ne sont, ou, par pur hasard, tels qu’ils sont: il est démontré que quand nous les approuvons en nous-mêmes ou les désapprouvons, si notre jugement est juste , il a lieu en vertu d’autres règles également immuables et supérieures à notre âme. En effet, quand je me rappelle les murs de Carthage que j’ai vus, ou que je me figure ceux d’Alexandrie que je n’ai pas vus, et que je donne raisonnablement la préférence à certaines formes imaginaires sur d’autres : le jugement de la vérité (468) apparaît et brille d’en haut, et appuie son droit sur les règles de l’impartialité la plus parfaite; et si les images corporelles essaient de soulever comme une espèce de brouillard, il s’en dégage et ne s’y confond point.

  3. Mais la question est de savoir si je suis moi-même enveloppé de ce brouillard et privé de la vue du ciel pur; ou si, comme il arrive au sommet des plus hautes montagnes, suspendu entre ciel et terre, je jouis de l’air libre, ne voyant au-dessus de moi que la lumière sans nuages, et au-dessous de moi que les plus épaisses ténèbres. Par exemple, d’où vient en moi cette flamme d’amour fraternel, quand j’entends dire d’un homme qu’il a souffert les plus cruels tourments pour soutenir la beauté et la solidité de la foi? Et si on me l’indique du doigt, je désire m’unir à lui, le faire connaître, former avec lui des liens d’amitié. Si cela m’est possible, je m’en approche, je lui parle, je noue un entretien, je lui exprime mon affection le mieux possible, je souhaite vivement qu’il me paie de retour et me le dise; par la foi, j e m’efforce de l’embrasser en esprit, ne pouvant si vite pénétrer dans son intérieur et y lire à fond. J’aime donc d’un amour pur et fraternel un homme fidèle et courageux. Mais si, dans le cours de notre conversation, il m’avoue ou me laisse imprudemment entrevoir qu’il croit de Dieu des choses indignes, qu’il cherche en lui quelque avantage charnel, et qu’il n’a subi des tourments que pour soutenir telle ou telle erreur, ou dans l’espoir de gagner de l’argent, ou par la stérile ambition de la louange humaine aussitôt mon amour pour lui, blessé, refoulé pour ainsi dire, et retiré à un sujet indigne, se maintient pourtant dans le type d’après lequel j’aimais un homme que je lui croyais conforme; à moins peut-être que je ne l’aime encore pour qu’il devienne tel, quand j’ai découvert qu’il ne l’est pas. Néanmoins dans cet homme rien n’est changé; cependant il peut changer pour devenir ce que je le croyais d’abord. Mais dans mon âme, l’opinion est entièrement changée; elle n’est plus ce qu’elle était; la même affection est passée du désir de jouir au désir d’être utile, en vertu d’un ordre de la souveraine et immuable justice. Et ce type d’inébranlable et ferme vérité, d’après lequel j’aurais joui de cet homme en le croyant bon, et d’après lequel je travaille à le rendre boni ce type, dis-je, répand de son immuable éternité, la même lumière sur l’oeil de mon âme, de ma pure et incorruptible raison, et sur le brouillard de mon imagination, que je ne vois plus maintenant que de haut, quand le souvenir de ce même homme me revient à l’esprit. De même, quand je me rappelle un arc élégamment et régulièrement tendu, que j’ai vu, par exemple, à Carthage, mon imagination me retrace un objet qui est arrivé à mon âme par l’entremise des yeux, et s’est fixé dans ma mémoire. Mais ce que je vois et qui me plaît, est autre que l’objet même, et je le corrigerais, s’il me déplaisait. Nous jugeons donc de tout cela d’après ce même type éternel, et nous voyons- ce type par la lumière de la raison .Quant aux objets corporels, ou nous les voyons présentement des yeux du corps, ou nous nous rappelons leurs images gravées en notre mémoire, ou nous nous les figurons par analogie tels que nous les formerions nous-mêmes, si nous le voulions et le pouvions : d’une part, créant dans notre esprit des images matérielles, ou voyant des corps par l’intermédiaire de notre corps; d’autre part, saisissant, par le simple coup d’oeil de l’intelligence, les raisons et le type ineffablement beau de ces figures, lesquels dépassent le regard de notre âme.

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On the Trinity - Introductory Essay

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