CHAPITRE II.
L’HOMME SEUL, PARMI LES ANIMAUX, DÉCOUVRE LES RAISONS ÉTERNELLES DES CHOSES DANS LE MONDE MATÉRIEL.
- Les animaux peuvent aussi percevoir les objets extérieurs par les sens du corps, les fixer dans leur mémoire, s’en souvenir, y rechercher ce qui leur est avantageux, éviter ce qui leur est nuisible. Mais les remarquer, les confier à la mémoire, non-seulement par un coup d’oeil rapide, mais à dessein; les retenir, en réveiller le souvenir quand ils commencent à tomber dans l’oubli, les imprimer de nouveau par la pensée, affermir par la pensée ce qui est dans la mémoire, comme la pensée elle-même se forme d’après la mémoire; composer des fictions imaginaires, en recueillant et cousant pour ainsi dire des souvenirs pris çà et là; voir comment, dans cet ordre de choses, le vraisemblable se distingue du vrai, non dans l’ordre spirituel, mais même dans le monde matériel : ces opérations et autres de cette espèce, bien que se passant dans les choses sensibles et dans les images que l’âme y a puisées par le sens corporel, ne peuvent cependant exister sans la raison et ne sont point communes aux hommes et aux animaux. Mais il appartient à la raison plus élevée de juger de ces choses matérielles d’après les raisons immatérielles et éternelles raisons qui ne seraient évidemment pas immuables, si elles n’étaient au-dessus de la raison humaine, et d’après lesquelles nous ne pourrions juger des objets matériels si nous ne nous soumettions à elles. Or nous jugeons des choses matérielles d’après la raison des dimensions et des figures, que notre âme sait être permanente et immuable.