IX.
Comment ne pas se reconnaître coupable d'une animosité belliqueuse, soit quand on patronne le mensonge avec autant d'astuce que d'opiniâtreté, soit quand on célèbre les louanges de la vérité avec une jactance tout imprégnée de jalousie? L'apôtre saint Paul flétrit également ces deux espèces d'adversaires. Il stigmatise les premiers dans la personne d'Alexandre, dont il dit : « Alexandre, l'ouvrier en cuivre, m'a fait beaucoup de mal ; le Seigneur lui rendra selon ses oeuvres; gardez-vous de lui, parce qu'il a fortement combattu la doctrine que nous enseignons1 ». Les autres sont caractérisés en ces termes : « Quelques-uns, par jalousie et par esprit de chicane, annoncent Jésus-Christ, mais sans aucune pureté d'intention et avec le désir de jeter le trouble dans mes chaînes ». Ces hommes, en effet, prêchaient la même doctrine que saint Paul; mais loin de s'inspirer de la même intention, de la même volonté, de la même charité, ils obéissaient uniquement à la jalousie et à l'orgueil, et aspiraient ouvertement à l'emporter sur l'Apôtre. Celui-ci tressaillait de joie de voir hautement prêché ce dont il voulait répandre au loin la connaissance. « Que m'importe tout le reste », dit-il, « pourvu que Jésus-Christ soit annoncé de toute manière, en toute occasion et en toute vérité? » Comme leur intention n'était pas pure et qu'ils n'obéissaient qu'à l'esprit de chicane, on ne peut pas dire qu'ils prêchaient dans la vérité de leur coeur, mais toujours est-il qu'ils annonçaient la vérité, c'est-à-dire Jésus-Christ. Vous ne prétendez pas sans doute connaître les dispositions les plus intimes de notre coeur; qu'il vous suffise d'observer si nous résistons à la vérité ou si nous désirons convaincre ceux qui y résistent. Si nous prêchons la vérité, si nous réfutons l'erreur, lors même que notre intention ne serait pas pure, lors même que nous agirions dans le but de nous procurer quelque avantage temporel ou quelque gloire humaine, les amis de la vérité doivent se réjouir de voir que la vérité est annoncée, et, en cela, ils ne feront qu'imiter l'Apôtre quand il déclare qu'il se réjouira pourvu que la vérité soit annoncée2. Si donc, et j'invoque sur ce point le témoignage même de Dieu, comme j'invoquerais le vôtre si vos relations avec nous vous avaient permis de le constater vous-même ; si, dis-je, la prédication de la vérité est de notre part l'objet de la plus vive sollicitude et de la plus ardente charité, il me semble qu'on ne saurait nous faire un reproche de nous armer d'une sainte ardeur contre tous ceux qui se posent en adversaires de la vérité.