XI.
Il s'agissait du baptême de saint Jean. Quelques-uns de ceux qui l'avaient reçu, furent baptisés par les Apôtres ; de là il faut conclure, non pas que le baptême de Jean fut réitéré à ceux qui l'avaient déjà reçu, mais seulement que le baptême de Jésus-Christ dut être conféré à ceux qui n'étaient pas encore baptisés en son nom. En cela, dès lors, l'Apôtre ne condamne aucun des deux baptêmes, il se contente d'établir la différence qui les sépare. Cette distinction a été parfaitement comprise par notre adversaire. En effet, voici l'objection qu'il se pose à lui-même: « Le baptême reçu et conféré par ceux qu'ils appellent traditeurs, n'est point le baptême de Jean, mais le baptême de Jésus-Christ; d'où ils concluent que ce baptême ne doit pas être réitéré lors même que c'est par ces traditeurs qu'il a été conféré ». A cette objection il suppose que Jésus-Christ lui-même a répondu par ces paroles : « Celui, qui ne recueille pas avec moi disperse » ; comme si le,Sauveur avait déclaré que l'on doit nier, détruire et invalider tout ce que l’on trouve de vrai, et même de divin, dans ceux qui ne recueillent pas avec lui. A ceux qui lui diront : « Seigneur, Sei gneur, n'est-ce pas en votre nom que nous avons prophétisé, chassé les démons et opéré de nombreuses merveilles », il répondra
« Je ne vous connais point ; retirez-vous de moi, ouvriers d'iniquité ». Ces paroles signifient-elles : A cause de votre iniquité je renierai ma propre vérité; retenue captive dans votre iniquité? Il est certain que dans son royaume il ne recevra pas tous ceux en qui il trouvera quelque vérité, il n'accueillera que ceux qui à la vérité joindront une charité suffisante et convenable; là où la charité manque, on ne trouve plus que l'iniquité. Mais cette iniquité reste tellement distincte de la vérité, qu'elle sera condamnée d'autant plus sévèrement qu'elle retiendra captive une plus grande somme de vérité. De là ces mots de l'Apôtre
« Quand je posséderais tous les sacrements et toute la science, avec le don de prophétie et une foi capable de transporter les montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien1 ». Il dit qu'il n'est rien s'il n'a pas la charité, mais il ne dit pas que sans la charité il n'a ni les sacrements, ni la science, ni la prophétie, ni la foi. En effet, tous ces dons conservent en eux-mêmes leur propre grandeur, quoique celui qui les possède sans la charité ne soit rien en lui-même, par la raison qu'il retient la vérité de ces dons captive dans son iniquité. Nous aussi nous disons à ces hérétiques: Nous ne détruisons pas la vérité du baptême, alors même que vous enchaînez cette vérité dans votre iniquité ; quand nous essayons de vous convertir, nous battons en brèche votre iniquité, mais nous attestons et conservons la vérité. D'où je conclus que notre adversaire ne tire aucun avantage de ces nombreux passages évangéliques.
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I Cor. XIII, 2. ↩