XVIII.
Que signifient donc ces paroles: « Le vrai baptême est là où se trouve la vraie foi? » Il peut assurément se faire que des hommes aient le vrai baptême, sans avoir la vraie foi; comme il peut se faire aussi que tout en possédant l'Évangile véritable on le comprenne mal et qu'on n'ait de Dieu qu'une foi erronée. Parce que la foi est faussé, conclurons-nous que l'on doit aussi détester ou corriger l'Évangile malgré sa véracité? Je suis persuadé que ces Corinthiens, qui glissaient si facilement sur la pente du schisme, n'avaient plus la vraie foi, quand ils disaient : « Je suis de Paul ». En effet, c'était là une fausseté. Cependant ils avaient le vrai baptême ; car c'est sur cette vérité que l'Apôtre s'appuie pour réformer leur erreur et leur dire sans détour
« Est-ce que Paul a été crucifié pour vous? avez-vous donc été baptisés au nom de Paul1 ? » Il en était aussi parmi eux, qui ne croyaient pas à la résurrection des morts, et en cela ils avaient perdu la vraie foi. Cependant ils étaient dans le vrai, en croyant à la résurrection de Jésus-Christ en qui ils avaient été baptisés ; l'Apôtre se sert de la vérité qu'ils croyaient, pour corriger ce qu'il y avait d'ailleurs de défectueux dans leur foi : « Si », dit-il, « les morts ne ressuscitent pas, Jésus-Christ, non plus, n'est pas ressuscité2 ». Ils croyaient donc que Jésus-Christ était ressuscité, et en cela ils avaient raison; mais c'est précisément cette croyance qui, dans les mains de l'Apôtre, devait servir de remède pour corriger l'erreur pernicieuse qui les empêchait de croire à la résurrection des morts. De même donc que dans les saintes Écritures ils ne peuvent citer aucun passage qui nous prouve que des hérétiques revenant à l'Église ont de nouveau reçu le baptême ; de même nous ne voyons pas comment on pourrait nous y démontrer que ces hérétiques ont été reçus par elle avec le baptême qui leur avait été conféré au sein de l'hérésie. En ce point, leur condition est donc la même que la nôtre, puisque dans l'histoire des temps apostoliques nous ne rencontrons aucun exemple qui les autorise, comme ils le font, à réitérer le baptême aux hérétiques, ou à ceux qu'ils regardent comme tels; rien non plus qui nous condamne, quand nous soutenons que nous ne sommes point tenus de recevoir le baptême de Jésus-Christ, tel qu'il est donné chez les hérétiques. II nous est facile de reconnaître que toutes les fois que tes Apôtres s'adressaient à des hommes victimes de quelques erreurs, ou coupables de quelque impiété, s'ils trouvaient en eux quelques débris de vérité, loin de les détruire ils les encourageaient et y applaudissaient; mais tout en épargnant la vérité, ils ne négligeaient ni de corriger ni de condamner leurs erreurs et leurs fautes. Suivons donc la même règle quand il s'agit de la vérité du baptême; partout où nous trouvons cette vérité conservée comme elle l'est dans l'Église, ne la nions pas, ne la détruisons pas. Mais tout en ménageant-la vérité, guérissons, corrigeons tout ce qu'il y a de vicieux, de dépravé, ou d'erroné; et si toute guérison est impossible, ne reculons pas devant la réprobation formelle et une condamnation absolue.