XI.
Si nous n'invalidons point votre baptême, n'en prenez aucune occasion de vous flatter. Ce baptême, en effet, n'est point votre baptême, mais le baptême de l'Eglise catholique dont nous sommes les enfants ; en vous séparant de cette Eglise vous avez conservé son baptême, mais c'est pour votre ruine et non pour votre salut. Est-ce que les vases du temple, quoique transportés chez les nations étrangères, n'avaient pas conservé leur sainteté et leur consécration ? Voilà pourquoi ce roi impie, qui osa les profaner, fut frappé par le courroux de Dieu d'un châtiment si redoutable1. L'arche du testament, quoique tombée entre les mains de ses ennemis, n'avait rien perdu de sa première sanctification2. Si donc ces objets sacrés n'avaient rien pu perdre de leur sainteté en tombant entre des mains étrangères ; à plus forte raison les sacrements chrétiens ne perdent-ils rien de leur efficacité, quand ils sont conférés par des hérétiques, pourvu qu'ils les conservent dans leurs conditions essentielles. C'est là ce que je vous ai déjà écrit dans ma lettre, c'est là ce que nous vous avons dit dans la conférence; mais vous avez cru devoir éluder cette question, parce que vous ne pouviez la résoudre. L'Apôtre disait des païens de son temps : « Ils retiennent la vérité captive dans l'iniquité3 » ; nous disons également de vous que vous retenez dans l'iniquité de l'erreur humaine la vérité du baptême divin. Cette vérité, qui ne vient pas de vous, nous ne devons pas l'invalider à cause de votre iniquité propre. « Ils retiennent la vérité captive dans l'iniquité », a dit l'Apôtre en parlant des Gentils ; vous emparant de ces paroles, vous me demandez de vous montrer « ce que l'Apôtre a conservé des pratiques sacrilèges des Gentils, lequel a de leur rite profane il n'a pas condamné ». Ne pouvait-il pas condamner et invalider tout ce qu'il y avait parmi eux de profane et de sacrilège, comme nous pouvons de notre côté condamner votre schisme et votre hérésie ? Cependant il y avait encore certaines maximes de vérité, reconnues par les philosophes païens, sur le Dieu qu'ils ne connaissaient pas ; non-seulement l'Apôtre ne condamne pas ces maximes, mais il s'en sert comme de témoignages. En effet, traitant de la nature de Dieu devant les Athéniens, il leur cite ces paroles : « C'est en lui que nous avons la vie, le mouvement et l'être, comme l'ont a affirmé quelques-uns d'entre vous4 ». Or, cette vérité, que saint Paul invoque bien loin de la détruire, les philosophes païens la retenaient captive dans l'iniquité de leur idolâtrie, et c'est cette idolâtrie que la doctrine apostolique sapait dans ses derniers fondements. Ainsi agissons-nous nous-mêmes; vos ancêtres ont reçu de l'Eglise catholique une certaine somme de vérités qu'ils vous ont transmises : ces vérités, loin de les détruire ou de les nier, nous les proclamons hautement ; mais, quant à votre sacrilège, nous le détruisons lorsque vous vous convertissez, ou nous le frappons d'anathème, si vous persévérez dans votre obstination.