12.
Pélage fut également accusé d'avoir écrit dans son livre : « Le mal ne vient pas même dans la pensée ». Il répondit : « Ce n'est pas là ce que nous avons dit; nous avons simplement affirmé que le chrétien doit s'appliquer à ne jamais penser mal ». Une telle explication ne pouvait qu'être approuvée par les évêques. Peut-on douter qu'on ne doive jamais penser mal? Si donc ces paroles de son livre : « Le mal ne vient pas même à la pensée », doivent être interprétées dans ce sens « qu'on ne doit jamais penser mal », toute difficulté disparaît. Car dire le contraire, ce serait affirmer qu'on doit penser le mal. Et alors ne contredirait-on pas cette parole dite à la louange de la charité : « Elle ne pense pas le mal1 ? » Cependant, soutenir que le mal ne vient pas même à la pensée des justes et des saints, ne serait-ce pas s'écarter de la vérité, puisque la pensée peut venir à l'esprit, quoiqu'elle n'y soit accueillie par aucun consentement? Or, là pensée qui est coupable et par là même défendue, c'est celle qui est consentie ? Il est donc possible que les accusateurs de Pélage aient eu entre les mains un exemplaire interpolé de ses oeuvres, et y aient lu : « Le mal ne vient pas même à la pensée », c'est-à-dire à la pensée des justes et des saints. Une telle opinion serait d'une évidente absurdité ; car, lorsque nous poursuivons le mal, nous ne pouvons en parler qu'autant que nous y pensons ; mais nous y pensons sans pécher, puisque la pensée du mal n'est criminelle que quand elle est accompagnée du consentement.
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I Cor. XIII, 5. ↩