81.
Voyez donc quelle impudence a pu vous faire dire que, « si nos premiers parents ont d'abord été nus, c'est parce que l'art de se vêtir leur faisait défaut ». Il suivrait de là que, de paresseux qu'ils étaient avant le péché, ils sont devenus tout à coup vigilants et habiles par le péché. Vous couronnez en. suite toutes ces folies par cette conclusion élégante et spirituelle: « Malgré le péché, leurs membres génitaux ne sont devenus ni diaboliques ni déshonnêtes; mais ils tremblaient de frayeur, voilà pourquoi ils ont voilé des membres qui n'avaient aucunement perdu leur honnêteté primitive ». Je réponds : Ces membres n'étaient nullement diaboliques quant à leur substance, quant à leur forme, et quant à la qualité que Dieu leur avait conférée. Mais s'ils n'avaient nullement perdu leur honnêteté primitive, comment donc l'Apôtre peut-il les appeler déshonnêtes? Vous dites vrai quand vous affirmez que ces membres étaient primitivement honnêtes, car ce serait un blasphème de croire que l'Apôtre appelle déshonnête ce que Dieu créé avec l'honnêteté la plus parfaite. Mais, puisque ces membres sont devenus déshonnêtes, quelle en est la cause, si ce n'est pas le péché? Ces membres honnêtes, qui donc les a souillés, jusqu'au point que le saint Apôtre les appelle déshonnêtes ? Est-ce leur constitution, dans laquelle resplendit l'art divin du Créateur, ou plutôt n'est-ce pas la passion dans laquelle le pécheur trouve son propre châtiment? Aujourd'hui comme alors, tout ce que Dieu fait est honnête; mais ce qui se contracte par l'origine est déshonnête. Et cependant, afin qu'il n'y eût point de schisme dans le corps, le Seigneur inspira aux membres l'instinct naturel de s'entr'aider réciproquement ; c'est ainsi que la pudeur couvre d'un voile épais ce que la concupiscence avait souillé.
