2.
Vous blâmez avec autant de justice que de sévérité ceux qui s'abstiennent de connaître ce qu'ils doivent savoir, ou ne craignent pas d'incriminer ce qu'ils ignorent ». Pouvez-vous donc en dire autant de ceux qui sont nés insensés? Et cependant, sans un Dieu juste, jamais vous ne pourrez rendre raison de ce triste phénomène, si vous admettez qu'il ne saurait y avoir de solidarité pour le mal entre les enfants et leurs parents. « C'est nous », dites-vous, « qui sommes ces insensés, et nous en donnons la preuve quand nous vous pour suivons d'une indigne jalousie dans cette atmosphère où vous jouissez du plein midi de la vérité, sans aucune ombre d'ignorance ». Mais vous qui n'avez pas de jalousie, vous ne voyez donc pas tous ces maux qui s'appesantissent sur les enfants? Dieu est bon, Dieu est juste, mais en dehors de lui il, n'est donc aucune nature essentiellement mauvaise, quoique les Manichéens nous la présentent comme mêlée à notre nature. Mats alors, si notre origine humaine n'est pas viciée, si nous n'appartenons pas à la masse de damnation, je demande d'où peuvent venir tous ces maux que les hommes apportent en naissant, sans attendre qu'ils se les attirent par leurs oeuvres ? Vous qui n'éprouvez ni les élans de la fatuité ni les aiguillons de l'envie, comment donc pouvez-vous nous faire de l'envie une description telle, qu'elle nous apparaisse tout à la fois comme un vice, comme un péché et comme le châtiment du péché? La jalousie n'est-elle pas un péché diabolique? N'est-elle pas le plus rigoureux châtiment « dont puisse être.frappé celui qui s'en rend coupable? » Ce sont là vos propres paroles; et cependant, pour conclusion d'une longue thèse .où vous croyez avoir fait preuve de beaucoup d'esprit, vous vous écriez qu'un seul et même vice ne peut être ni un péché ni le châtiment du péché ». Mais comme vous n'êtes point jaloux, peut-être avez-vous entrevu quelque peu de jalousie dans un autre ouvrage; c'est là ce qui vous aurait arraché ces accents et inspiré cette réfutation que vous m'opposez, parce que vous n'éprouvez contre moi nul sentiment de jalousie.
