47.
N'oubliez pas que vous n'avez pas pu nous expliquer pourquoi l'Apôtre s'est servi de ces mots : « Attendant l'adoption1 », lui qui déjà avait été adopté dans le bain de la régénération. Vous ajoutez de nouveau que « personne ne hait sa propre chair ». Qui donc a jamais soutenu le contraire ? Et cependant vous avouez que cette même chair doit être soumise à la répression de la discipline. Sur ce point encore vous formulez le langage de la vérité, mais hélas ! vous ne voulez pas l'entendre. Pourquoi donc la chair a-t-elle besoin d'être réprimée par les fidèles, si, depuis le baptême, il n'y a .plus rien en elle qui convoite contre l'esprit ? Pourquoi le temple de Dieu se réprime-t-il par lui-même, si rien en lui ne résiste à l'Esprit de Dieu? Et non-seulement ce mal existe en nous, mais il y produirait les plus tristes résultats, si la faute à laquelle nous étions enchaînés n'avait vu ses liens se briser par la rémission des péchés. En tant que faute, ce mal originel nous est pardonné parla miséricorde de Dieu; et en tant qu'habitude, il doit être comprimé parla continence, si nous ne voulons pas lui laisser la victoire. Empêchons-le donc de nous nuire, jusqu'à ce que la mort, en le guérissant, le détruise. Ainsi donc le baptême nous confère la rémission de tous les péchés, soit du péché originel, soit des péchés actuels commis par ignorance ou avec connaissance. L'apôtre saint Jacques nous dit : « Chacun est tenté par sa propre concupiscence qui le charme et qui l'attire dans le péché; et ensuite, quand la concupiscence a conçu, elle enfante le péché, et le péché engendre la mort2 » ; or, ces paroles établissent une distinction réelle entre le fruit conçu et l'auteur de cette conception. Ce qui enfante, c'est la concupiscence ; ce qui est enfanté, c'est le péché. Mais la concupiscence n'enfante qu'autant qu'elle a conçu, et elle ne conçoit qu'autant qu'elle a obtenu l'assentiment de la volonté pour commettre le mal. Lutter contre elle, e est donc l'empêcher de concevoir et d'enfanter le péché. Après donc que nous avons reçu dans le baptême la rémission de tous les péchés, c'est-à-dire de tous les fruits de la concupiscence, si vous soutenez que la concupiscence elle-même a été détruite, expliquez-moi comment, pour l'empêcher de concevoir, les saints ont encore besoin de la combattre par la maigreur de a leur corps, la mortification de leurs membres et la répression de leur chair » ; car ce sont là vos propres paroles. Comment, dis-je, la maigreur, la mortification et la répression du temple de Dieu, peuvent-elles être les armes dont les saints doivent se servir contre la concupiscence; si cette concupiscence est entièrement détruite par le baptême? Non, elle ne l'est pas ; et loin de nous guérir de cette triste maladie, le bain de la régénération a laissé très-vivace en nous le sentiment de sa présence dans notre chair.