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Je pense, Julien, avoir suffisamment réfuté, dans ma réponse, toutes les raisons prétendues que vous avez jetées dans vos quatre volumes, pour nous prouver que le péché originel n'existe pas et qu'on ne peut inculper la concupiscence sans condamner par cela même le mariage. A moins d'obstination de votre part, je crois que vous conviendrez de vos erreurs. Il a été démontré que celui-là seul n'est plus soumis à l'antique condamnation paternelle, qui a changé d'hérédité et de père ; qui s'est vu adopté par la grâce et s'est uni comme frère à l'unique cohéritier naturel. J'ai prouvé que seul l'homme baptisé n'a plus à craindre que la concupiscence charnelle lui cause de nouveau la mort, après la mort, puisqu'il a trouvé, dans la mort de Jésus-Christ, le moyen de mourir au péché et d'échapper à la mort à laquelle le condamnait sa naissance dans le péché. Un seul est mort, donc tous sont morts1. Il est mort pour tous, et la vie ne saurait être le partage de ceux pour lesquels n'est pas mont celui qui dans la plénitude de la vie est mort pour les morts. Telles sont les vérités que vous niez, que vous repoussez avec la coupable prétention de renverser les fondements de la foi catholique, et de rompre tous les nerfs de la religion chrétienne et de la piété véritable. Et vous osez dire en outre que vous soutenez la lutte contre des impies, quand c'est bien contre cette mère généreuse qui vous a enfanté spirituellement, que vous revêtez toutes les armes de l'impiété ! Vous osez dire que vous vous êtes placé dans les rangs des saints patriarches, des Prophète, des Apôtres, des martyrs et des prêtres ! Mais les patriarches nous enseignent que des sacrifices sont offerts pour les péchés des petits enfants2, parce que l'enfant d'un jour n'est pas lui-même exempt de toute souillure3. Mais les Prophètes vous disent que nous sommes tous conçus dans l'iniquité4 ; mais les Apôtres vous disent: « Nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, c'est dans sa mort que nous avons été baptisés », afin que nous sachions que nous sommes morts au péché et que nous vivons pour Dieu en Jésus-Christ5 ; mais les martyrs vous disent que les enfants issus charnellement de la race d'Adam naissent sujets à l'antique mort, et que le baptême efface, non pas des péchés qui leur soient personnels, mais des péchés d'autrui6 ; mais enfin, les prêtres vous disent que les hommes venus au monde par la voie de la chair subissent le mal du péché avant de jouir du bienfait de cette vie7. Vous vous flattez donc d'entrer dans la société de ceux dont vous combattez la foi. Vous osez dire que vous n'êtes vaincu que par une conjuration de Manichéens, vous qui rendriez les Manichéens invincibles si toute victoire remportée sur eux n'était pour vous-même une véritable défaite. Vous vous trompez donc, mon fils, vous vous trompez misérablement, vous vous trompez d'une manière détestable ; quand vous aurez vaincu l'animosité qui vous tient, vous pourrez tenir la vérité par laquelle vous serez vaincu.
Traduction de M. l'abbé BURLERAUX.
