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Ainsi, quoique nous disions que l'obéissance est un don de Dieu , nous ne laissons pas pour cela d'exhorter les hommes à la pratiquer. Mais ceux-1à seulement entendent les exhortations de la vérité avec une obéissance réelle, qui ont reçu de Dieu ce dots, c'est-à-dire le don de les entendre avec obéissance : ceux à qui la même faveur n'a pas été accordée, ne les entendent pas de cette manière. Chacun en effet ne va pas à Jésus-Christ. « Personne », dit-il lui-même , « ne vient à moi, sinon celui à qui cela a été donné par mon Père1 » ; et encore : « Il vous a été donné, à vous, de connaître le mystère du royaume des cieux; mais pour eux, cette faveur ne leur a pas été accordée2 ». Ailleurs, parlant de la continence : « Tous », dit-il, « ne comprennent pas cette parole, mais seulement ceux à qui cela a été donné3 ». Enfin l'Apôtre disait en exhortant les époux à l'honnêteté conjugale : « Je voudrais que tous les hommes fussent et comme moi-même ; mais chacun a reçu de Dieu un don particulier, l'un d'une manière, et l'autre d'une autre manière4 ». Il montrait assez par ces paroles que la continence n'est pas seule un don de Dieu, mais aussi la chasteté conjugale. Cependant, quoique tout cela soit incontestablement vrai, nous ne laissons pas d'exhorter à la pratique de ces vertus, autant du moins qu'il a été donné à chacun de nous de pouvoir exhorter; car c'est encore ici un don de Celui dans la main de qui nous sommes, nous et nos discours5. De là ces paroles de saint Paul : « J'ai, comme un sage architecte, posé le fondement selon la grâce qui m'a été donnée ». Et ailleurs : « A chacun suivant le don que le Seigneur lui a départi : moi, j'ai planté, Apollo a arrosé; mais Dieu a donné la croissance. Ainsi, ni celui qui plante, ni celui qui arrose, ne sont quelque chose ; mais celui-là seulement qui donne la croissance, Dieu6 ». Conséquemment, de même que pour exhorter et polar prêcher comme il faut, il est nécessaire d'avoir reçu ce don; de même aussi, pour entendre avec obéissance celui qui exhorté et qui prêche coulure il faut, il est absolument indispensable d'avoir reçu ce, autre don. C'est . pour cette raison que le Seigneur, parlant à des hommes qui ouvraient les oreilles de leur corps, disait néanmoins : « Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende7 », sachant sans doute que tous n'avaient pas cette sorte d'oreilles. Le même Seigneur nous apprend de qui les ont reçues ceux qui les possèdent, quand il dit: « Je leur donnerai un coeur pour me connaître, et des oreilles qui entendront8 ». Les oreilles pour entendre sont donc précisément le don d'obéir, et elles devaient être données, afin que ceux qui les auraient reçues vinssent à celui à qui nous ne pouvons aller, si cela ne nous a été donné par son Père même. Nous exhortons et nous prêchons: Ceux qui ont des oreilles pour entendre, nous entendent avec obéissance ; mais pour ceux qui n'ont pas ces oreilles, cette parole de l'Écriture s'accomplit en eux : « Afin qu'en entendant ils n'entendent point9», c'est-à-dire, afin qu'en entendant, par le sens corporel de l'ouïe , ils n'entendent point par l'assentiment du coeur. Quant à la question de savoir pourquoi ceux-ci ont des oreilles pour entendre, tandis que ceux-là n'en ont pas; en d'autres termes, pourquoi le Père a donné à ceux-ci de venir au Fils, tandis que ce don n'a pas été accordé à ceux-là, qui a connu la pensée du Seigneur, ou qui a été son conseiller10? Ou bien, qui êtes-vous, ô homme, pour oser contester avec Dieu11? Ce qui est manifeste doit-il donc être nié, parce que ce qui est caché ne peut être compris? Quand nous voyons clairement qu'une chose existe, dirons-nous qu'elle n'existe pas, parce que nous ne pouvons découvrir comment elle existe de cette manière ?