2.
Jul. Et, puisque nous supportons nous-mêmes les frais du triomphe qui se prépare pour le salut des Eglises, et que la sagesse des rapporteurs aurait dû décerner d'une voix unanime à la bonne cause; si du moins l'opinion de la multitude n'avait pas le pouvoir de nous faire supporter, outre ces frais, des vexations humiliantes ! De ces deux classes d'hommes ainsi distinguées, la première nous favoriserait, la seconde ne pourrait nous nuire, si celle-là obtenait le pouvoir et si l'autre apprenait à rougir. Mais comme il règne partout une confusion étrange et que le nombre des sots est incalculable, on éteint dans l'Eglise le flambeau lumineux de la raison pour y substituer avec une assurance pleine de fierté la lumière trompeuse de la croyance populaire.
Aug. Si notre enseignement est conforme à la croyance populaire, ce n'est donc point contre une croyance manichéenne que tu diriges, au milieu d'un peuple chrétien, tes argumentations d'où la logique est complètement absente. Les rêveries insensées des Manichéens, qui sont l'objet de tes justes mépris, sont aussi le partage d'un petit nombre d'hommes ; mais tu obéis toi-même à un rêve insensé, quand tu t'efforces, en les flétrissant du nom de Manichéens, d'exciter contre nous la haine des peuples dont tu refuses de reconnaître le témoignage; comme si ces peuples pouvaient, trompés par ton verbiage, donner le nom de Manichéens à Ambroise, à Cyprien qui ont, pour le salut même des enfants, enseigné l'existence du péché originel. Ambroise cependant n'a point fait naître, il a trouvé cette croyance dans le coeur de ces peuples ; Cyprien n'a pas été non plus l'auteur de cette croyance, il l'a trouvée pareillement établie ; ton père l'a trouvée, lui aussi, vivante dans le sein de l'Eglise, quand tu as reçu, encore enfant, dit-on, le sacrement de baptême ; vous-mêmes enfin vous avez trouvé les peuples catholiques instruits de cette doctrine. Modérez vos transports ; nous reconnaissons que notre croyance est la croyance du peuple : car nous sommes le peuple de celui qui a reçu le nom de Jésus, précisément parce qu'il sauve son peuple des péchés dont celui-ci est coupable[^1] ; et quand vous voulez séparer de ce peuple les petits enfants, c'est vous-mêmes, en réalité, que vous en séparez.
- Malt. I, 21.