71.
Jul. Cependant, pour ne point paraître faire preuve d'une rigueur excessive dans ce débat, nous voulons bien t'accorder que ces mots : « Jusqu'à la loi », peuvent s'interpréter dans le sens de jusqu'à Jésus-Christ; tu reconnais donc que le péché, appelé par toi originel, n'existe plus depuis Jésus-Christ ? Mais comment peux-tu dire alors, que l'oeuvre du démon, l'arbre planté par la puissance ennemie, la loi du péché, subsiste vivante et animée dans les membres des Apôtres et de tous ceux qui ont reçu le baptême, jusqu'aujourd'hui, après tant de siècles écoulés depuis la venue de Jésus-Christ?
Aug. Je ne dis pas cela : et toi, tu parles pour ne rien dire. Autre chose est le péché, autre chose est le désir du péché auquel ne consent pas celui qui par la grâce de Dieu ne commet pas le péché : bien que la concupiscence qui nous porte au péché reçoive elle-même le nom de péché, parce qu'elle est le résultat du péché : comme une écriture quelconque est appelée la main de celui par la main de qui elle a été faite. Mais celui dont il a été dit : « Voici l'Agneau de Dieu, voici celui qui ôte les péchés du. monde[^1]»; celui-là efface, dans le sacrement de la régénération, la souillure du péché qui a été contractée dans la génération première; par le don, qu'il nous fait de son esprit, il empêche le péché de régner dans notice corps mortel pour nous faire obéir à ses convoitises[^2]; par sa bonté inépuisable, qui nous autorise à lui adresser chaque jour cette prière : « Pardonnez-nous nos offenses[^3] », il nous pardonne miséricordieusement les fautes que l'inclination au péché peut encore nous faire commettre malgré nos résistances et nos luttes sérieuses; il relève , dès qu'ils se repentent, les pécheurs qui étaient comme broyés sous le poids de leurs crimes; il nous introduira et nous revêtira des insignes de la royauté dans une cité où il, nous sera désormais impossible de commettre aucun péché, et où nous dirons : « O mort, où est ta puissance? O mort, où est ton aiguillon? Car l'aiguillon de la mort, c'est le péché[^4] ». Voilà comment cet Agneau de Dieu ôte les péchés du monde auxquels la loi n'avait pu mettre fin.
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Jean, I, 29.
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Rom. VI, I2.
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Matt. VI, 12.
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I Cor. XV, 55, 56.