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Werke Augustinus von Hippo (354-430) Contra secundam Iuliani responsionem imperfectum Contre la seconde réponse de Julien
LIVRE SIXIÈME. LE SIXIÈME LIVRE DE JULIEN.

23.

Julien. « Donc ce grand péché qui fut pour l'homme une dégradation dans le Paradis, qui est plus grand que nous ne sourions le comprendre, tout homme l'apporte en naissant[^1] ». Qui t'a pu dire que le péché d'Adam ait surpassé celui de Caïn ? surpassé même ceux de Sodome? surpassé de beaucoup et le tien et celui des Manichéens? Rien, assurément, dans l'histoire, ne vient justifier une telle. puérilité. Il lui était enjoint de ne point manger du fruit d'un seul arbre: inculte, ignorant, sans précaution, sans aucun sentiment de crainte, sans rien avoir vu de la justice, sur les suggestions de sa femme, il goûta.de cette nourriture dont la beauté, la douceur, l'avait charmé. Comprends bien que ce fut là toute l'infraction du précepte. Ce fut là une de ces prévarications que les passions firent commettre dans tous les temps, mais qui ne dépassait pas celle du peuple juif mangeant des animaux défendus. Que fit donc Adam de si criminel, pour que tu l'accuses d'un péché au-dessus de toute appréciation humaine? A moins peut-être que, d'après les mystères des Manichéens , qui interdisent à tout enfant de cueillir un fruit, de peur qu'ils ne déchirent quelque partie de leur Dieu qu'ils croient renfermé en des écorces et en des gazons, toi-même tu n'imagines que la gravité du péché d'Adam fut d'avoir déchiré la substance de ton Dieu en mangeant de son fruit. Quelle folie ! « Parce que ce péché », nous dit-il, «est plus grand que nous ne pouvons en juger, tout enfant l'apporte en naissant ». Manger d'un fruit défendu fut donc un crime plus grand que de frapper Abel avec une haine fratricide, plus grand que de violer, à Sodome, les droits des bêtes et des sexes, plus grand que d'immoler sous la loi ses enfants au dé. Mon, que de soumettre à l'empire du diable de jeunes enfants, innocents de toute volonté, récente création de Dieu, pour les associer à son châtiment, plus grand que d'accuser Dieu d'injustice, que d'attribuer au prince des ténèbres le mariage qui est honorable, plus grand enfin que de mettre au-dessous de tous les profanes, au-dessous même des pirates, de jeunes enfants, parce qu'ils naissent parla volupté charnelle ? Ici je n'invente pas, je récite : car tu as fait de ce péché un crime tellement grand, tellement au-dessus des autres crimes, qu'on ne saurait rien lui comparer. Or, ce mal si grand, si fort au-dessus de tous les autres vices, tu nous dis que les enfants en sont pleins à leur naissance. Nous avons donc bien compris que, plus est grand le péché auquel ils participent, et plus leur condamnation doit l'emporter en sévérité sur celle des scélérats.

Augustin. A propos de ces paroles que tu extrais de mon livre, pour les réfuter si tu le pouvais, et où j'ai dit: « Ce péché qui, dans le Paradis, détériora l'homme, tout enfant qui vient au monde le contracte parce qu'il est beaucoup plus grave que nous n'en saurions juger » ; tu me demandes qui m'a dit que le péché d'Adam fût beaucoup plus grand que celui de Caïn, beaucoup plus grand que celui des Sodomites. Cela n'est point articulé dans mes paroles, mais seulement dans ton intelligence; car j'ai dit que ce péché est plus grand que nous ne saurions en juger, mais non plus grand que celui de Caïn ou celui des Sodomites. Manger, en effet, du fruit défendu, et encourir ainsi ce châtiment qui fait de la mort une nécessité pour celui qui pouvait ne point mourir, c'est là un péché qui met en défaut les jugements humains. Manger tel fruit interdit par la loi de Dieu peut paraître un péché léger; mais la grandeur du châtiment nous montre ce qu'il est aux yeux de Dieu, qui ne peut se tromper. Quant au crime de Caïn le fratricide, il est une grande faute aux yeux de tous: à tous il inspire l'horreur; et chacun trouvera ridicule que tu le compares, d'une manière tout humaine, à un fruit cueilli malgré la défense: et toutefois ce fratricide, bien qu'il dût mourir un jour, ne subit point aussitôt cette mort dont les hommes punissent ordinairement ces sortes de crimes. Dieu lui dit en effet : « Tu cultiveras la terre, qui ne te donnera pas ses fruits, tu seras gémissant et tremblant sur la terre[^2] ». Or, comme cette menace que la terre ne lui donnerait pas ses fruits, et qu'il y serait dans les gémissements et dans la frayeur, inspirait à Caïn la crainte de la mort et lui faisait redouter qu'un autre ne lui fît ce qu'il avait fait à son frère, Dieu le marqua d'un signe, afin que nul ne le tuât en le rencontrant. Ici encore la faute nous parait grave d'une part, et légère d'autre part ; mais seulement au jugement des hommes, qui ne sauraient approfondir ces mystères, ni peser les fautes des hommes avec la lumière et la justice de Dieu. Le feu qui tombait du ciel sur la terre infligeait aux Sodomites un châtiment digne de leurs crimes; mais il y avait là des enfants sous ton patronage, purs et exempts de toute souillure du péché; et, toutefois Dieu, dans sa miséricorde et dans sa justice, n'envoya point ses anges, ce qui lui était très-facile, pour soustraire ces innocentes images à l'incendie de Sodome, non plus que, dans sa toute-puissance, il ne les rendit invulnérables aux flammes qui dévoraient leurs parents, comme il le fit pour les trois jeunes hommes dans la fournaise[^3]. C'est ce qu'il te faut considérer, ce qu'il te faut peser avec attention, avec piété; et à la vue des misères de ce monde, qui tombent surales petits comme sur les grands, misères qui n'eussent pu subsister dans le Paradis, si nul n'eût péché, reconnais le péché d'origine et ce joug si lourd qui pèse avec justice sur tous les enfants d'Adam, depuis leur sortie du sein de leur mère[^4] : et garde-toi d'aggraver ce joug par ton plaidoyer, en ôtant à ces malades ou à ces morts le Christ qui doit les guérir ou les vivifier.

Si tu veux savoir qui m'a dit que le péché d'Adam fût si grand, c'est celui qui te l'a dit aussi : et si tu as des oreilles pour l'entendre, tu l'entendras; or tu auras ces oreilles, si, au lieu de les attribuer à ton libre arbitre, tu consens à les recevoir de celui qui a dit : « Je leur donnerai un coeur pour me connaître, des oreilles pour m'entendre[^5] ». A moins de n'avoir point ces oreilles, qui n'entend, sans obscurité comme sans ambiguïté, cette parole de l'Ecriture au premier homme pécheur « Tu es terre, et tu retourneras dans la terre?[^6]» Ce qui nous montre évidemment que, même dans sa chair, il ne devait point mourir, c'est-à-dire que la mort de sa chair ne l'eût point fait retourner dans cette terre d'où sa chair avait été tirée, s'il n'eût, parle péché, mérité de l'entendre et de le subir; ce qui a fait dire plus tard à l'Apôtre : « Il est vrai que le corps est mort à cause du péché[^7] ». Qui, dès lors, à moins de n'avoir point ces mêmes oreilles, qui ne comprend cette parole de Dieu à propos d'Adam : «Craignons qu'il n'avance sa main, qu'il ne prenne et ne mange du fruit de l'arbre de vie, et ne vive éternellement; et Dieu le bannit du jardin de délices », où il eût vécu éternellement, sans fatigue et sans douleur[^8]? Cette volupté du paradis, que vous êtes forcés d'avouer, si vous n'avez pas oublié le nom chrétien, ne doit point s'entendre de la souillure, mais de la félicité. Cette peine donc, que mérita Adam, de ne point vivre toujours, et qui le fit chasser du lieu d'une si grande félicité, où il pouvait vivre éternellement s'il n'eût point péché, cette peine si grande nous doit faire comprendre combien était grand le péché qui a mérité une semblable peine. Que prétends-tu donc, dis-moi, quand tu t'évertues avec tant d'instances, à atténuer le péché d'Adam, sinon accuser Dieu d'une horrible et prodigieuse cruauté, puisqu'il le punit, je ne dis pas, si sévèrement, mais si cruellement? Or, s'il y a blasphème à parler ainsi de Dieu, pourquoi ne pas mesurer la grandeur de la faute, dont les hommes ne peuvent juger, par la peine si grande que lui inflige un juge incomparablement juste, pourquoi ne pas interdire à ta langue sa loquacité sacrilège ?

Quant à moi, je suis loin d'accuser Dieu d'injustice, quand je dis qu'il fait justement peser son joug sur les fils d'Adam, depuis le jour où ils sont sortis du sein maternel[^9] ; mais plutôt c'est toi qui fais Dieu injuste, en pensant qu'ils supportent ce châtiment sans l'avoir mérité par aucune faute. Je dis encore que ce n'est point à cause de l'oeuvre que Dieu a faite, mais à causé du vice qu'a semé l'ennemi, que tous ceux qui naissent du premier Adam sont au pouvoir de l'ennemi s'ils ne renaissent dans le second Adam. Mais alors, c'est de ta part accuser l'Eglise de lèse-majesté, s'il est vrai, comme tu le soutiens, que baptiser les enfants ce n'est point les arracher à la puissance des ténèbres, quand néanmoins, avant de les baptiser, elle souffle sur tant d'images de Dieu et les exorcise. Je n'attribue point au prince des ténèbres ces noces que j'exempte de toute souillure, si l'on en use dans le dessein d'une postérité; pour toi, ce désordre qui soulève la chair contre l'esprit, tu ne rougis pas de le placer dans le paradis, c'est-à-dire dans le lieu d'une si grande paix, d'un repos si complet, d'une honnêteté si incomparable, d'une félicité si parfaite. Loin de moi, aussi, de mettre au-dessous des criminels et des scélérats, comme tu m'en accuses, des enfants qui n'ont d'autre péché que le péché originel. Autre est, en effet, le poids d'une faute que l'on a commise, et autre la tache du péché d'un autre, quelque grand qu'il soit. C'est pourquoi les enfants, comme l'a dit Cyprien[^10], ce Poenus qui est votre peine, s'approchent d'autant plus facilement de la rémission des péchés, qu'on leur remet non pas les leurs, mais les péchés des autres. Pour toi, dire non-seulement, comme nous le disons nous-mêmes, qu'ils n'ont contracté aucune faute parleur propre volonté, mais qu'ils n'ont point apporté en naissant le péché originel, c'est accuser Dieu d'injustice, comme nous te l'avons déjà dit, et comme il faut le redire encore, puisqu'il leur impose un joug pesant dès qu'ils sortent du sein de leur mère[^11]. Afin de comprendre comment les enfants qui naissent d'Adam sont, d'une part, liés par une participation au péché de ce premier homme, sans être, d'autre part, aussi coupables que lui, écoute le Christ qui est la forme de l'Adam futur[^12], comme tu l'as lu; et vois comment les enfants qui renaissent en lui deviennent participants de sa justice, sans que tu oses néanmoins les égaler à lui en mérites. Et toi aussi, dans le second livre de ton ouvrage[^13], tu as dit que c'est en Adam qu'on trouve le péché, non plus dans sa forme première, puisque ce fut Eve qui pécha tout d'abord, mais dans sa forme la plus grande, comme dans le Christ on trouve la justice non pas dans sa forme primitive, puisque d'autres furent justes avant lui, mais dans sa forme la plus grande : si tu n'avais pas oublié cette parole, tu n'amoindrirais pas le péché d'Adam, après avoir confessé qu'il est le péché dans sa plus grande forme.

  1. Aug lib. II De Nupt. et Concup. n. 58.

  2. Luc. IV, 12-15.

  3. Dan. III, 49, 50.

  4. Eccli. XL, 1.

  5. Baruch. II, 31.

  6. Gen. III, 19.

  7. Rom. VIII, 10.

  8. Gen. III, 22, 23.

  9. Eccli. XL, 1.

  10. Cypr. ep. 64 ad Fid.

  11. Eccli. XL, 1.

  12. Rom. V, 1.

  13. Supra lib. II, n. 189 et 190.

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Contre la seconde réponse de Julien

Inhaltsangabe

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