1.
Au milieu de ce choeur de saints qui brillaient comme des étoiles très-pures dans la nuit de ce monde, nous vîmes aussi le saint abbé Paphnuce, qui surpassait, par l'éclat de sa science, la lumière de tous les autres. C'était le supérieur de notre communauté du désert de Schethé. Il y était venu, encore jeune, habiter une cellule éloignée de l'église de cinq mille pas; et, quoique d'un âge très-avancé, il n'en chercha jamais une plus rapprochée. Le poids des années ne l'empêchait pas de faire ce long chemin pour venir à l'église le samedi ou le dimanche; et comme il ne voulait pas revenir à vide, il reportait à sa cellule, sur ses épaules, le vase d'eau qui devait lui servir toute la semaine ; même à l'âge de quatre-vingt-dix ans, il ne permettait pas à des solitaires plus jeunes de lui épargner cette peine. Il avait suivi avec tant d'ardeur, dès sa jeunesse, les enseignements de la vie religieuse, qu'il s'était enrichi promptement de la pratique et de la science de toutes les vertus. Son humilité et son obéissance profonde lui firent tellement mortifier sa volonté et détruire tous ses désirs déréglés, qu'il pratiqua dans la perfection la règle des monastères et la doctrine des Pères les plus anciens. Son ardeur pour avancer dans la vertu lui fit rechercher les secrets du désert, afin de n'être distrait par rien de cette union intime avec Dieu qu'il souhaitait tant au milieu de ses frères. Il surpassa par sa ferveur tous les autres religieux, et s'appliqua tellement à répondre aux inspirations divines, qu'il évitait tous les regards et qu'il recherchait sans cesse les lieux les plus inaccessibles. C'était là qu'il aimait à se cacher, et que les anachorètes allaient à le trouver. On pensait qu'il jouissait, tous les jours, de la compagnie des anges, et ses goûts lui avaient fait donner le nom d'un animal qui se plaît dans la solitude.