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Works Lactantius (250-325) Divinae Institutiones

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Institutions Divines

XII.

Que peut-on faire pour guérir des esprits qui sont si fort corrompus, qu'ils donnent le nom de justice aux cruautés que les anciens tyrans ont exercées contre l'innocence, et qui, dans le temps même qu'ils défendent ces cruautés avec une ignorance, une folie et un aveuglement incroyables, prétendent observer très exactement les règles de l'équité et de la prudence? La justice vous est-elle devenue si odieuse que vous la traitiez de la même sorte que les crimes les plus atroces ? L'innocence est-elle si fort discréditée parmi vous, que vous jugiez qu'elle n'est pas assez sévèrement punie quand elle n'est condamnée qu'à une mort ordinaire, et qu'il n'y a point de si grand crime que de n'en commettre aucun et de conserver la pureté de la conscience ? Puisque nous vous adressons la parole à vous tous qui faites profession du culte de plusieurs dieux, permettez-nous de vous rendre un bon office; car c'est le premier devoir de notre religion et notre occupation principale. S'il vous semble que nous soyons sages, imitez-nous. S'il vous semble que nous soyons fous, méprisez-nous, ou moquez-vous de nous, si vous le voulez, et vous pourrez tirer avantage de notre folie. Pourquoi nous déchirez-vous par de nouveaux genres de supplices? Nous n'envions point votre sagesse; nous aimons mieux notre folie, et nous en sommes fort contents. Nous sommes persuadés qu'il nous est utile de vous aimer et de vous rendre toutes sortes de bons offices, bien que vous n'ayez pour nous que de la haine. Il y a beaucoup de vraisemblance dans un endroit des ouvrages de Cicéron, où Furius est introduit, disputant contre la justice en ces termes : « Supposons qu'il y ait deux hommes, dont l'un ait beaucoup de vertu, une parfaite équité et une bonne foi toute singulière, et que l'autre soit chargé de crimes : si tous les habitants étaient prévenus d'une si fausse opinion, qu'ils prissent l'homme de bien pour un scélérat et le scélérat pour un homme de bien, et que, suivant ce principe d'erreur, ils tourmentassent l'homme de bien, ils le chargeassent de chaînes, ils lui coupassent les mains, ils lui crevassent les yeux, ils le brûlassent à petit feu ou le réduisissent à la dernière extrémité de pauvreté et de misère : s'ils faisaient un traitement tout contraire au scélérat ; qu'ils lui donnassent toutes sortes de marques de leur estime, des louanges, des charges, des honneurs, des richesses : y a-t-il quelqu'un, pour peu qu'il eut d'esprit, qui délibérât un moment pour résoudre en la place duquel il aimerait mieux être ? »

Cet exemple représente si fidèlement les supplices que nous endurons pour l'intérêt de la justice, que quand Cicéron en aurait pu deviner les espèces et les manières différentes, il n'en aurait jamais apporté de plus juste. Nous souffrons tous ces traitements par la malice de ceux qui sont dans l'erreur. Ce n'est pas une ville, c'est l'univers qui est prévenu de cette fausse opinion : qu'il faut persécuter les gens de bien comme des impies, les condamner et les exécutera mort. Ce Furius, qui disputait contre la justice, dit qu'il n'y a personne qui ait assez peu d'esprit pour douter en la place duquel des deux il voudrait être, parce que le sage dont il avait l'idée aurait mieux aimé avoir de la réputation sans vertu que de la vertu sans réputation. Dieu nous garde d'une si étrange extravagance que de préférer de la sorte le mensonge à la vérité, et de faire plutôt dépendre notre vertu de la fausse opinion du peuple que du témoignage de notre conscience et du jugement de Dieu. Serait-il possible que nous fussions jamais si fort éblouis par l'éclat d'une vaine félicité, que nous ne préférassions pas l'innocence, avec tous les malheurs qui l'accompagnent en cette vie, à une fausse réputation de vertu, avec toutes les récompenses qu'elle remporte ? « Que les rois gardent leurs royaumes, et les riches leurs richesses, » comme dit Plaute. Que les prudents gardent leur prudence, et qu'ils nous laissent notre folie qui est une véritable sagesse, comme il paraît par la jalousie que les païens ont contre nous. Il faut être fou pour porter envie à des fous. Les païens ne le sont pas jusqu'à ce point-là. L'ardeur ou l'adresse avec lesquelles ils nous persécutent font bien voir qu'ils ne croient pas que nous ayons perdu l'esprit. Pourquoi exercent-ils de si horribles cruautés, si ce n'est qu'ils appréhendent que notre nombre n'augmente de jour en jour, et que leurs dieux ne soient abandonnés? Si ceux qui adorent les dieux sont sages, et si nous autres qui ne les adorons point, ne sommes que des fous, quel sujet y a-t-il d'appréhender que les fous n'attirent les sages de leur côté ?

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The Divine Institutes

Chap. XII.--Of True Virtue; And of the Estimation of a Good or Bad Citizen.

What would you do to those who give the name of justice to the tortures inflicted by tyrants of old, who fiercely raged against the innocent; and though they are teachers of injustice and cruelty, wish to appear just and prudent, being blind and dull, and ignorant of affairs and of truth? Is justice so hateful to you, O abandoned minds, that ye regard it as equal with the greatest crimes? Is innocence so utterly lost in your eyes, that you do not think it worthy of death only, 1 but it is esteemed as beyond all crimes to commit no crime, and to have a breast pure from all contagion of guilt? And since we are speaking generally with those who worship gods, let us have your permission to do good with you; for this is our law, this our business, this our religion. If we appear to you wise, imitate us; if foolish, despise us, or even laugh at us, if you please; for our folly is profitable to us. Why do you lacerate, why do you afflict us? We do not envy your wisdom. We prefer this folly of ours--we embrace this. We believe that this is expedient for us,--to love you, and to confer all things upon you, who hate us.

There is in the writings of Cicero 2 a passage not inconsistent with the truth, in that disputation which is held by Furius against justice: "I ask," he says, "if there should be two men, and one of them should be an excellent man, of the highest integrity, the greatest justice, and remarkable faith, and the other distinguished by crime and audacity; and if the state should be in such error as to regard that good man as wicked, vicious, and execrable, but should think the one who is most wicked to be of the highest integrity and faith; and if, in accordance with this opinion of all the citizens, that good man should be harassed, dragged away, should be deprived of his hands, have his eyes dug out, should be condemned, be bound, be branded, be banished, be in want, and lastly, should most justly appear to all to be most wretched; but, on the other hand, if that wicked man should be praised, and honoured, and loved by all,--if all honours, all commands, all wealth, and all abundance should be bestowed upon him,--in short, if he should be judged in the estimation of all an excellent man, and most worthy of all fortune,--who, I pray, will be so mad as to doubt which of the two he would prefer to be?" Assuredly he put forth this example as though he divined what evils were about to happen to us, and in what manner, on account of righteousness; for our people suffer all these things through the perverseness of those in error. Behold, the state, or rather the whole world itself, is in such error, that it persecutes, tortures, condemns, and puts to death good and righteous men, as though they were wicked and impious. For as to what he says, that no one is so infatuated as to doubt which of the two he would prefer to be, he indeed, as the one who was contending against justice, thought this, that the wise man would prefer to be bad if he had a good reputation, than to be good with a bad reputation.

But may this senselessness be absent from us, that we should prefer that which is false to the true? Or does the character of our good man depend upon the errors of the people, more than upon our own conscience and the judgment of God? Or shall any prosperity ever allure us, so that we should not rather choose true goodness, though accompanied with all evil, than false goodness together with all prosperity? Let kings retain their kingdoms, the rich their riches, as Plautus says, 3 the wise their wisdom; let them leave to us our folly, which is evidently proved to be wisdom, from the very fact that they envy us its possession: for who would envy a fool, but he who is himself most foolish? But they are not so foolish as to envy fools; but from the fact of their following us up with such care and anxiety, they allow that we are not fools. For why should they rage with such cruelty, unless it is that they fear lest, as justice grows strong from day to day, they should be deserted together with their decaying 4 gods? If, therefore, the worshippers of gods are wise, and we are foolish, why do they fear lest the wise shall be allured by the foolish?


  1. Ne morte quidem simplici dignum putetis. ↩

  2. [From the Republic, iii. xvii. 27.] ↩

  3. Curcul., i. 3, 22. ↩

  4. Cariosis. There is a great variety of readings in this place. ↩

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