VII.
Dieu a lié les os avec les nerfs afin que l'âme s'en pût servir sans peine et sans effort, comme d'une bride pour tourner le corps de tel côté qui lui plairait. Il a couvert ces nerfs et ces os de chairs au travers desquelles il a répandu des veines, qui sont comme autant de ruisseaux qui portent le sang et la nourriture. Il a couvert les chairs mêmes de peaux, dont les unes sont unies, les autres sont couvertes de poils, de plumes ou d'écaillés. Ce qu'il y a de plus merveilleux dans ces ouvrages des mains de Dieu, c'est que bien qu'ils aient leurs membres disposés dans le même ordre, ils ne laissent pas d'avoir des figures toutes différentes. Tous les animaux ont la tête plus élevée que le reste du corps, ensuite le cou, au-dessous l'estomac, au bas le ventre, et après le ventre, les parties sexuelles, puis après celles-là les cuisses, les jambes et les pieds. Ce ne sont pas seulement les membres qui gardent le même ordre dans le corps, les parties des membres le gardent aussi, les oreilles étant toujours dans un certain endroit, les yeux dans un autre, la bouche, les dents et la langue dans un autre. Cependant, il y a une diversité incroyable et presque infinie dans leurs figures et dans leurs traits. La beauté particulière que chaque espèce conserve dans sa différence, n'est-elle pas encore une preuve très évidente de la sagesse et de la puissance que Dieu a employées à les former. Car, pour peu que l'on voulût y apporter du changement, on verrait qu'il n'y aurait rien de si embarrassé, de si incommode ni de si difforme. Si on donnait une grosse tête à un éléphant, une petite à un chameau, des pieds et du poil à un serpent, on ruinerait leur nature. Dieu a eu encore soin de donner aux animaux à quatre pieds une queue, qui est comme une continuation de l'épine du dos, et qui leur sert ou à cacher les difformités ou à ménager la délicatesse de leurs parties naturelles, et à chasser les mouches et les autres insectes qui les incommodent. Sans cette partie, les animaux à quatre pieds seraient faibles et imparfaits. Mais dans l'homme, qui a de la raison et sa main, elle n'est pas plus nécessaire que ne le serait la laine et la toison. Ainsi chaque espèce a été formée d'une manière qui lui est propre, de sorte qu'elle n'aurait pu être faite autrement sans être aussi fort difforme. Il n'y aurait rien de si vilain qu'une bête à quatre pieds qui n'aurait point de poil ni de laine, ni qu'un homme qui en aurait. La nudité sert d'ornement à l'homme; et toutefois cet ornement-là ne convenait pas à la tête, car ce n'est point du tout une beauté ni une perfection que d'être chauve. C'est pourquoi Dieu y a mis des cheveux, qui sont l'ornement de la partie la plus élevée et la plus apparente de son ouvrage. Cette chevelure n'est point faite en rond ni en forme de bonnet, de peur qu'il n'y eût quelque partie de la tête qui n'en fût point couverte; mais elle est comme répandue en certains endroits et comme rétrécie en d'autres, selon que la bienséance le désirait. Elle entoure en quelque sorte le visage, et est éparse des deux côtés le long des oreilles, et couvre tout le derrière de la tête. La barbe sert à reconnaître la maturité de l'âge, la force du tempérament et la différence du sexe. Enfin il y a un ordre si merveilleux et si parfait dans ta structure du corps de l'homme, que pour peu qu'il eût été fait autrement il y aurait eu du défaut.