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Les Thessaloniciens donc n'ayant pas bien compris le sens de la première épître que saint Paul leur avait écrite, ou s'étant laissé séduire par quelque prétendue révélation qu’ils croyaient avoir eue durant leur sommeil, ou par les fausses conjectures de quelques visionnaires, s'imaginaient que ce qui avait été prédit de l'Antéchrist par les prophètes Isaïe et Daniel, et par Jésus-Christ même dans l'Évangile, devait s'accomplir de leurs jours. C'est ce qui les avait ébranlés et jetés dans le trouble, prévenus qu'ils étaient que le fils de Dieu devait bientôt venir dans tout l'éclat de sa gloire et de sa majesté. Mais l'apôtre saint Paul, pour les détromper et les faire revenir de leurs préjugés, leur explique ici toutes les choses qui devaient précéder l'avènement du Sauveur; afin que par leur accomplissement ils pussent juger de l'avènement de l'Antéchrist, « de cet homme de péché, de cet enfant de perdition, de cet ennemi de Dieu qui s'élèvera au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu. ou qui est adoré. jusqu'à s'asseoir dans le temple de Dieu. » « Le Seigneur,» dit-il, « ne viendra point que la désertion, » ou, comme porte le texte grec, « l'apostasie ne soit arrivée auparavant, » c'est-à-dire : que toutes les nations qui sont soumises à l'empire romain ne se soient soustraites par une révolte déclarée à la domination des empereurs; « et qu'on ait vu paraître cet homme de péché » prédit par tous les prophètes, qui est la source et le principe de tous les péchés ; « de cet enfant de perdition. » c'est-à-dire du démon qui est la cause de la perte de tous les hommes ; « de cet ennemi déclaré de Jésus-Christ, » ce qui fait qu'on l'appelle « Antéchrist, » qui s'élèvera au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu,» se faisant passer pour le Dieu de toutes les nations, foulant aux pieds la véritable religion et le culte du vrai Dieu, et portant son orgueil «jusqu'à s'asseoir dans le temple de Dieu, » c'est-à-dire, comme l’expliquent quelques auteurs, dans le temple de Jérusalem, ou plutôt dans l'Eglise, où il se fera passer pour Jésus- Christ et pour fils de Dieu.
La décadence de l'empire romain et la naissance de l'Antéchrist doivent donc précéder l'avènement de Jésus-Christ, qui ne viendra que pour détruire cet ennemi de sa gloire et de sa religion. Vous devez vous souvenir, dit l'Apôtre, que lorsque j'étais à Thessalonique, je vous ai dit de bouche ce que je vous écris maintenant, que l'avènement de l’Antéchrist devait précéder celui du Sauveur; « et vous savez bien ce qui empêche qu'il ne vienne, afin qu'il paraisse en son temps;» c'est-à-dire: Vous n’ignorez pas pourquoi l'Antéchrist ne parait pas encore. Il ne veut pas parler ici ouvertement de la ruine de l'empire romain, que les empereurs croyaient devoir être éternel. De là vient que cette femme prostituée et vêtue de pourpre, dont saint Jean parle dans son Apocalypse, portait sur son front ce nom de blasphème, « Rome l'éternelle. » Car si saint Paul eût dit sans détour et sans allégorie que l'Antéchrist ne devait venir qu’après l'entière. destruction de l'empire romain , il semble qu’il eût donné par là un juste sujet de persécuter l'Eglise qui ne faisait que de naître.