CHAPITRE XIII. Consolation à sainte Eustochia. Apostrophe à sainte Paula. Inscriptions sur son tombeau.
Ne vous mettez en peine de rien, Eustochia : vous avez hérité d'une très grande et très riche succession, le Seigneur est votre partage; et ce qui vous doit encore combler de joie, c'est que votre sainte mire a été couronnée par un long martyre ; car ce n'est pas seulement le sang que l'on verse pour la confession de la foi qui fait les martyrs, mais les services d'un amour pur et sans tache qu'une aine dévote rend à Dieu passent pour un martyre continuel. La couronne des premiers est composée de roses et violettes, et celle des derniers est faite de lys. C'est pourquoi il est écrit dans le Cantique des cantiques : « Celui que j'aime est blanc et vermeil, » attribuant ainsi à ceux qui sont victorieux dans la paix les mêmes récompenses qu'à ceux qui le sont, dans la guerre. Votre excellente mère entendit comme Abraham Dieu qui lui disait : « Sors de ton pays, quitte tes parents et viens en la terre que je te montrerai; » elle l'entendit lui dire par Jérémie : « Fuis du milieu de Babylone et sauve ton âme.» Aussi est-elle sortie de son pays, et jusqu'au jour de sa mort n'est point retournée dans la Chaldée. « Elle n'a point regretté les ognons ni les viandes de l'Égypte; » mais étant accompagnée de plusieurs troupes de vierges, elle est devenue citoyenne de la ville éternelle du Sauveur; et, étant passée de la petite Bethléem dans le royaume céleste, elle a dit à la véritable Noémi : « Ton peuple est mon peuple, et ton Dieu est mon Dieu.»
Étant touché de la mime douleur qui vous afflige, j'ai dicté ceci en deux nuits, parce que toutes les fois que j'avais voulu travailler à cet ouvrage comme je vous l’avais promis, mes doigts étaient demeurés immobiles et la plume. m'était tombée des mains, tant mon esprit languissant se trouvait sans aucune force; mais ce discours, si négligé et sans ornement de langage, témoigne mieux qu'un plus éloquent. quelle est mon extrême affliction.
Adieu, grande Paula, que je révère du plus profond de mon âme. Assistez-moi, je vous supplie, par vos prières dans l'extrémité de ma vieillesse : votre foi jointe à vos oeuvres vous unit à Jésus-Christ; et ainsi, lui étant présente, il vous accordera plutôt ce que vous lui demanderez.