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Œuvres Pères arméniens Histoire d'Armenie

Chapitre IX.

Le grand Verthanès se rendit auprès de l'empereur Constance (Kouesdantoues), fils de Constantin, pour lui demander instamment de créer roi d'Arménie Chosroès1 à la place de son père Tiridate, parce que, lui disait-il, il gouvernera notre royaume selon la loi de Jésus-Christ, et non en suivant l'impiété des Perses. L'empereur, touché par la sainteté de ce respectable personnage, lui accorda sa demande et créa roi d'Arménie Chosroès. Après la mort de ce dernier, le grand Verthanès prit avec lui Diran, fils de Chosroès, et le conduisit auprès de l'empereur Constance pour le faire créer roi d'Arménie, comme l'avait été son père. Dès le premier abord, l'empereur reçut Verthanès avec les plus grands honneurs et les plus grandes distinctions ; il lui accorda sans peine tout ce qu'il venait lui demander ; il donna à Diran le diadème et la souveraineté de ses pères, et le renvoya avec éclat en Arménie. Cependant le vase d'élection, le dépositaire des pensées de Dieu, le prédicateur apostolique, le grand Verthanès mourut, et passa de ce monde périssable à celui de la vie éternelle. Il avait occupé le trône patriarcal pendant quinze ans. On l'enterra avec ses pères dans le bourg de Thortan. Son fils Housig lui succéda dans son siège ; il suivit exactement les préceptes apostoliques, et toujours avec le plus grand plaisir. Après l'abdication de Constance, l'infidèle Julien (Ioulianoues) gouverna Rome ; il se conduisit avec insolence, relativement à la connaissance de Dieu, se livra à l'idolâtrie, renia le Christ, et suscita une persécution contre les églises. Il prit des otages de notre roi Diran, et consentit sans peine à le confirmer dans sa souveraineté ; ensuite il ordonna à ce prince de placer dans son église, parmi celles des dieux, son image peinte, pour qu'elle y fût adorée. Contraint par la nécessité et la crainte, Diran fit placer cette image dans une église de la province de Dzouep'hk'h. Cette action amena saint Housig dans cet endroit ; il essaya avec sa science sublime de détourner adroitement Diran de l'impiété ; mais comme ce prince fermait l'oreille à ses avis, il arracha l'image de ses mains, la jeta à terre et la déchira avec ses pieds. Le roi Diran, enflammé de colère, donna l'ordre de frapper Housig à coups de bâton jusqu'à ce qu'il rendît l'âme. Le vieux Daniel (Taniel) prononça anathème contre le roi à cause de cette mauvaise action. Diran ordonna alors qu'on l'étranglât. Le corps de saint Housig fut porté dans le bourg de Thortan, où il fut enterré dans un monastère, auprès de ses pères. Saint Housig avait été patriarche pendant six ans. Ses fils, Bab et Athanaginès, préparèrent une mort épouvantable à leurs âmes par leur perversité ; la foudre descendit sur eux, et ils périrent tous deux dans le même endroit. Ils ne laissèrent qu'un petit enfant nommé Nersès (Niersés), fils d'Athanaginès, qu'on instruisait et élevait alors à Césarée Comme on ne trouva personne de la race de saint Grégoire, on choisit un nommé P'harhniersèh, de la ville d'Aschdischad, et on l’éleva sur le trône patriarcal, qu'il n'occupa pas plus de trois ans, au bout desquels il mourut. Arsace,2 fils du roi Diran, qui avait été aveuglé par l'ordre du roi des Perses, envoya Nersès, fils d'Athanaginès, fils d'Housig, pour recevoir les premiers ordres sacrés à Césarée, et être ensuite ordonné patriarche. On raconte qu'on vit alors quelques signes admirables. Pendant qu'il se tenait près de l'autel pour être consacré, les grâces du Saint-Esprit vinrent se reposer sur sa tête en forme de colombe, ce qui frappa d'étonnement tous les prêtres de l'église. L'éclatante lumière qui se répandit alors sur lui, inspira le plus grand esprit d'ordre et une admirable direction dans tous les états, et elle excita une belle émulation parmi ceux qui étaient susceptibles d'éprouver ce sentiment. La racine de la barbarie fut arrachée, et l'on sema en sa place la miséricorde pour le soulagement des pauvres, pour la consolation des hommes affligés d'infirmités corporelles, des lépreux, de ceux qui ont des ulcères, et de ceux qui sont malheureux ou sans force. Des secours furent préparés pour eux dans les villages et les campagnes, et on ne les laissa pas sortir de leur terre natale. On établit des monastères, des lieux d'hospitalité, des hôpitaux, des asiles pour les pauvres dans les bourgs, dans les villages et même dans les déserts et dans les solitudes. On fit bâtir des ermitages et des cellules isolées dans les environs des monastères, et l’on chargea de veiller à la conservation et à la garde des morts ceux qui étaient voisins des lieux d'inhumation. C'est ainsi que notre pays fut habité par des citoyens doux, et non par d'affreux barbares. Cet ordre admirable couvrit de gloire le roi et les nakharars d'Arménie. Les mœurs des religieux devinrent plus sévères ; ils s'observèrent les uns les autres, et la gloire du patriarcat fut augmentée. Peu de temps avant ces événements, Constance, fils du grand Constantin, avait fait transporter d'Éphèse (Iep’hiésoues) à Constantinople (Kouesdantinouebouelis) les reliques de saint Jean l'évangéliste ; après cette action audacieuse, il créa, dans la dernière de ces villes, un patriarche. La cause de son audace et de la liberté qu'il prit fut qu'il voulait soutenir son trône par la gloire du patriarcat ; il fit alors un décret dans lequel on lisait ces mots : Le verbe naquit du Père ; il vécut parmi les hommes, fut baptisé par Jean ; et après avoir été crucifié et enterré, il ressuscita le troisième jour. Il n'y a que quatre patriarches sur la terre, à cause des quatre évangélistes : Mathieu (Mathéoues) à Antioche (Andiouek'h), Marc (Markoues) à Alexandrie, Luc (Ghouka) à Rome, et Jean à Éphèse. Mais par la suite ils furent réellement six en tout. Plus tard notre roi Arsace et les nakharars d'Arménie prirent la liberté de se procurer le même honneur, et érigèrent en patriarcat la maison de Thorgoma. Le grand Nersès y consentit ; il trouva cela selon la justice, parce que nous avions eu parmi nous les saints apôtres Barthélemi et Thaddée, que Dieu avait désignés par le sort pour être les prédicateurs et les évangélistes de la race d'Ascénez. Leurs glorieuses reliques sont chez nous, et leur trône fut occupé par le vivant martyr Grégoire. Ainsi le nombre total des patriarcats s'étendit successivement jusqu'à sept, ce qui dure encore à présent. Le saint patriarcat de l'église de notre pays est admirable par l'ordre hiérarchique, qui forme en tout neuf degrés. Il y a d'abord des chefs d'archevêques, tels que celui des Albaniens qui crée des archevêques à Sébasté (Siépasdia) et à Mélitène ; dans la ville des Martyrs résident des métropolitains, et, dans les différents diocèses, des évêques. Outre cela des diacres, des sous-diacres, des lecteurs et des chantres sont répandus, de côté et d'autre, dans la totalité des églises que les Arméniens ont décorées magnifiquement pour la gloire de Dieu.3 L'empereur Valentinien (Vaghendianoues) fut animé d'une violente colère contre le roi Arsace ; il s'emporta même jusqu'à faire tuer le frère de ce prince, nommé Tiridate (Dertad), qui était en otage auprès de lui. Quand le grand Nersès apprit cela, il alla promptement trouver l'empereur, et pour gagner son esprit avec adresse, il se rendit auprès de ce prince accompagné d'un grand cortège, comme il convient à un patriarche ; il amena avec lui, pour les laisser en otage, le fils même du prince Tiridate qui avait été tué, et d'autres personnes, et il rapporta la paix dans l’Arménie. Après la mort de l'empereur Valentinien, son frère, l'impie Valens (Vaghès), monta sur le trône ; il envoya aussitôt inopinément son général Théodose (Théouétoues) avec une grande armée, pour faire la guerre au roi Arsace, ce dont celui-ci eut beaucoup de chagrin. Arsace pria instamment le grand Nersès de demander la paix. Ce dernier ne perdit pas de temps et ne négligea rien pour faire réussir l'affaire. Il prit promptement avec lui Bab,4 fils d'Arsace, et le conduisit comme otage au grand général Théodose, qui le reçut et l'envoya vers l'empereur ainsi que le patriarche Nersès et les otages. L'impie Valens ne daigna pas jeter un regard sur l'homme de Dieu, et, par la violence, il le contraignit d'aller en exil dans une île, avec tous ceux qui l'avaient accompagné ; on ne leur donnait à tous, chaque jour, qu'une très faible et très frugale nourriture. Mais, par l'ordre de Dieu, le délire de Valens fut confondu ; car la mer, en jetant des poissons sur le rivage, fournit pendant huit ans à la nourriture des exilés. On dit que l'impie Valens reçut de Dieu, à cause du saint martyr Grégoire, la juste punition de sa mauvaise action ; et, en effet, il mourut d'une manière incompréhensible.

Après lui le grand Théodose monta sur le trône ; il était bienfaisant et pieux ; il éloigna de ses conseils tous les desseins ténébreux et perfides, et il jeta les fondements durables de la pureté de la foi. Il renvoya dan leur patrie tous les hommes qui avaient été exilés par les ordres de Valens, parmi lesquels était le grand Nersès, qu'il se fit amener, et qu'il garda auprès de lui pour examiner la détestable hérésie de Macédone5 (Makiétouen), qui osait s'élever contre la vérité de la foi. Il se rassembla ensuite un concile de cent cinquante évêques, qui, au bout d'un mois, prononcèrent anathème contre Macédone et tous ses adhérents. Schahpour (Schabouèh), roi de Perse, prit Arsace, roi d'Arménie, le fit charger de chaînes et jeter dans le Château de l'Oubli (Aniouschpiert). Arsace s'arracha la vie dans cette prison, en se plongeant une épée dans le cœur. Quand le grand Nersès apprit cet affreux malheur, il alla, par amitié, trouver l'empereur Théodose pour l'engager à créer roi d'Arménie Bab, fils d'Arsace. Ce prince lui accorda sa demande, et il les renvoya tous deux promptement en Arménie. Lorsqu'ils y arrivèrent, ils trouvèrent l'apostat Mehroujan à la tête d'une grande quantité de troupes arméniennes, et on en vint aux mains à Dsirav. Pendant que le combat se soutenait avec la plus grande vigueur, la grand Nersès monta sur le mont Nbad ; et, comme Moïse, il éleva ses mains vers le ciel en priant instamment Jésus-Christ de mettre sur l'armée le signe de sa protection, d'agir contre les ennemis de Dieu, et de fortifier les Arméniens pour qu'ils pussent terrasser complètement leurs adversaires. L'abominable Mehroujan Ardzrouni tomba au pouvoir de Sempad ; on le fit périr en lui plaçant sur la tête un morceau de fer qui avait la forme d'une couronne et qui était brûlant comme le feu de la foudre. Le roi Bab fut toujours livré à la flatterie et adonné aux actions les plus honteuses ; aussi était-il perpétuellement réprimandé par saint Nersès qui s'opposait à tous ses mauvais desseins ; Bab s'en vengeait en lui faisant toujours du mal ; et ne pouvant plus enfin le supporter, il lui fit donner un breuvage mortel dans le bourg de Khagh, et le priva de la vie, quoiqu'il fût innocent. On le porta pour l'enterrer dans le bourg de Thiln. Il avait occupé le trône patriarcal pendant trente quatre ans. On créa patriarche après lui un nommé Schahag, de la race d'Alpianoues. C'était un homme estimable, et doué de toutes les vertus et les qualités religieuses ; il n'envoya pas, selon l'ancienne coutume, à Césarée ; il abandonna cet usage ; mais il se fit ordonner patriarche par les chefs des conciles, comme les patriarches d'Antioche, d'Alexandrie, de Rome, de Constantinople, d'Ephèse et de Jérusalem, pour que le patriarcat ne tombât pas dans d'autres mains. Cette mesure rendit la dignité de patriarche plus importante. lie roi Bab fut pris dans la suite et tué par ordre de l'empereur Théodose, qui mit en sa place Varaztad, de la race des Arsacides. La deuxième année de son règne, le patriarche Schahag mourut ; il avait occupé six ans le trône patriarcal. Son frère Zaven lui succéda ; c'était un homme très recommandable par la pureté de ses mœurs. Le grand Théodose exila ensuite le roi Varaztad dans l'île de Thulé6 (Thoulis ou Thoghis) située dans l'Océan ; il créa alors rois ensemble les deux fils du roi Bab, Arsace (Arschak) et Valarsace (Vagharschak).7 La troisième année du règne d'Arsace, Zaven mourut après avoir rempli pendant trois ans les fonctions de patriarche. Son frère Asbouragès lui succéda. Ils ont tous deux administré avec succès le patriarcat. Schahpour, roi de Perse, créa roi de la partie de l'Arménie qui lui appartenait un Arsacide nommé Khosrov (Khouesrouev). Vous pouvez voir raconté, d'une manière très étendue, dans l'histoire de Moïse de Khoren (Mouevsès Khoueriénatsi), tout ce qui concerne les mœurs, les actions, les vertus, les vices et les combats des deux rois qui gouvernaient l'Arménie. Après la mort du roi Arsace, Mesrob (Miesroh), né à Hatsiégats, dans le pays de Daron, et disciple du grand Nersès, était l'archiviste de la cour des rois ; il fut en grand honneur parmi les hommes à cause de ses qualités célestes et de ses mœurs de solitaire. Au reste ses vertus étonnantes et admirables, et les excellentes qualités dont Dieu l'avait doté, vous sont suffisamment connues par ceux qui ont écrit l'histoire avant nous. Le grand patriarche Asbouragès mourut ensuite ; il avait occupé le siège patriarcal l'espace de cinq ans. Le roi Khosrov lui donna pour successeur Isaac (Sahag), fils du grand Nersès, parce qu'il était véritablement né pour la vertu, et qu'A ne marchait qu'accompagné d'actions saintes et justes. Notre pays était comme désert lorsqu’Isaac y parut : il le pacifia, replaça tout dans un ordre admirable, mit fin à tous les troubles, et rétablit la piété avec les prières de ses disciples. Cependant Ardaschir,8 fils de Schahpour, roi de Perse, prit Khosrov, roi d'Arménie, et le fit enfermer dans le Château de l'Oubli ; il créa roi en sa place le frère de ce prince, nommé Bahram Schahpour (Vrham Schabouèh). Le grand Isaac se rendit auprès du roi de Perse Ardaschir avec un appareil magnifique, parce que Dieu voulait montrer d'une manière distinguée et honorable son serviteur en présence des infidèles ; il se conduisit avec tant de circonspection, qu'il obtint toutes ses demandes, et qu'Ardaschir le renvoya vers notre roi Bahram Schahpour, après l'avoir comblé de grands honneurs. Le roi de Perse mourut ensuite, et Bahram (Vrham) lui succéda. Dans le même temps Mesrob nous apporta, pour écrire notre langue, des caractères qui lui avaient été manifestés par la faveur de Dieu. D'après l'ordre du grand Isaac, il rassembla dans chaque province, pour les instruire dans l'art d'écrire, une grande quantité déjeunes gens, doués d'un esprit ingénieux et docile, d'une voix flexible et de beaucoup d'esprit. Il alla, après cela, dans l’Ibérie (Virk’h), où il donna des caractères pour la langue de cette contrée, et où il fit des docteurs et des scribes. Il passa de là dans le pays des Albaniens ; il leur composa des caractères d'écriture appropriés à l'esprit et à la nature de leur langue, et s’étant établi chez eux, il y fit aussi des disciples. Mesrob revint ensuite en Arménie auprès de saint Isaac, et s'occupa constamment à traduire. Le roi d'Arménie Bahram Schahpour mourut, et le grand Isaac alla trouver le roi de Perse Iezdedjerd (Iazkierd), pour le prier de. tirer de prison Khosrov, et de l'envoyer en Arménie à la place de son frère Bahram Schahpour. Le roi de Perse acquiesça à la demanda du saint homme : il donna la souveraineté de l'Arménie à Khosrov qui, cette seconde fois, ne fut pas possesseur du trône pendant longtemps, car il mourut au bout d'un an.9 Après la mort d'Iezdedjerd, Bahram II monta sur le trône de Perse, causa beaucoup de mal à l'Arménie, détruisit les plus belles institutions, et introduisit partout la corruption et la dépravation. Saint Isaac, voyant ces mauvaises actions, passa dans la partie de notre patrie qui était soumise aux Grecs, depuis que l'Arménie avait été partagée entre l'empereur grec et le roi de Perse. Le grand Théodose, qui avait dès longtemps de la vénération pour saint Isaac, ne refusa pas de le recevoir ; et considérant qu'il était plein des grâces divines et des plus éminentes vertus, il le reçut avec autant de distinction et avec d'aussi grands honneurs, que s'il eût été un apôtre même de Jésus-Christ. Il ordonna qu'on apprît promptement les caractères d'écriture que Dieu avait donnés à Mesrob, et il créa dans sa résidence royale un bureau pour cet objet. Cependant saint Isaac envoya son petit-fils Vartan vers le roi de Perse Bahram10 pour demander la paix. Vartan fut reçu avec honneur, et on lui accorda la demande du sainte En conséquence, on créa roi d'Arménie Ardaschir, fils de Bahram Schahpour. Ce prince se plongeait habituellement dans l'ivresse et se livrait aux plus grands désordres : ce fut la cause de L'accusation que les nakharars portèrent contre lui. Ils firent d'abord parvenir leurs plaintes jusqu'à lui ; mais ensuite ils s'adressèrent au grand Isaac pour le prier de prendre leurs intérêts et d'accuser Ardaschir auprès du roi de Perse, afin que ce dernier le fit mettre en prison, ou qu'il l'éloignât du trône d'Arménie. Isaac, quoiqu'il sût bien que toutes ces accusations n'étaient pas fausses, pensait cependant qu'il ne fallait pas livrer son roi à un roi infidèle, et qu'au lieu de songer à le perdre on devait espérer qu'il se relèverait de sa chute. Loin de moi, répondit-il, la pensée de livrer jamais une brebis égarée, parce qu'elle est vicieuse. Ardaschir n'a-t-il pas reçu le saint baptême ? Il est fornicateur mais il est chrétien. Son corps est corrompu, mais son esprit n'est pas sans foi ; ses mœurs sont mauvaises, mais il n'adore pas le feu. Ne changeons pas une brebis malade pour une bête féroce.

Le conseil du saint était juste et prudent. Bahram fut instruit de tous ces mauvais desseins par Sourmag, dont la langue était comme un glaive exterminateur, et qui désirait occuper le siège de saint Isaac. Alors Bahram fit jeter Ardaschir dans une prison,11 plaça un marzban persan en Arménie,12 et créa patriarche, à la place de saint Isaac, le calomniateur Sourmag. Celui-ci ne remplit pas cette dignité plus d'un an, et fut chassé par les-nakharars arméniens. Bahram nomma pour le remplacer un Syrien appelé Bérékischoï13 (Pergisch), homme impudent et dilapidateur : sa maison était administrée par une concubine ; et pour cette raison les nakharars le détestèrent. Bahram le remplaça par un autre Syrien nommé Schmouel,14 qui était le parfait imitateur des mœurs de Bérékischoï, et qui le surpassait même par son avidité. On commanda à saint Isaac d'instruire et d'ordonner des prêtres ; on le commanda aussi à Schmouel. Le grand Isaac adressa une prière aux nakharars arméniens, pour qu'ils ne reçussent pas Schmouel, parce que sans cela ils auraient eu deux chefs, et parce qu'on ne pouvait jamais cesser de nourrir les enfants de l'église du lait spirituel. Le roi de Perse Bahram mourut ensuite ; son fils Iezdedjerd lui succéda. Saint Isaac, après s'être préparé avec une grande patience, monta vers Jésus-Christ, dans la province de Pagravan,15 sur une colline nommée Gieogh. Il avait des mœurs entièrement spirituelles dans un corps destiné à la mort. Il s'est assuré par ses vertus une gloire immortelle ; il a été placé dans le chœur des anges et à la droite du trône de Jésus-Christ. On porta son corps en grande pompe, et on l'enterra dans le bourg d'Aschdischad, dans la province de Daron. Six mois seulement après, le saint Mesrob sortit de cette vie, étant dans la ville de Vagharschabad. Les gardes célestes qui veillaient sur lui le firent voir resplendissant : une lumière miraculeuse brillait au-dessus de lui et avait la forme d'une croix ; elle se manifesta aux yeux des assistants, et-dura jusqu'au moment où l’on enleva le saint corps pour le porter dans le bourg d'Oschagan. Pendant cette translation, on vit encore une brillante lumière en forme de croix, qui changea sur le tombeau et devint invisible. Cependant on nomma au siège patriarcal Joseph (Iouevsep’h), du bourg de Hoghotsim (Houeghouets), dans la province de Vaïots-dsor (Vaiouets-dsouer). Mais par l'ordre du roi de Perse Iezdedjerd, Sourmag continua de remplir les fonctions de patriarche ; il les conserva encore six ans et mourut. Joseph lui succédant entra alors dans l'exercice du patriarcat. C'est à cette époque que la race des Arsacides cessa de gouverner le royaume d'Arménie, et que la race de notre illuminateur, le trois fois heureux Grégoire, cessa d'occuper le siège patriarcal. Alors chaque homme agit selon son caprice, se mêla de troubler la paix et de déranger la tranquillité publique. Plusieurs de nos nakharars se livrèrent au mal, renièrent la religion chrétienne et se soumirent à l'idolâtrie. Les deux plus grands d'entre eux furent Schavasb Ardzrouni et Vent (Ventoui), de la ville de Tovin16 (Tvin), qui ordonnèrent de bâtir un temple à Ormuzd (Ouermezd) et une maison pour l'adoration du feu. Vent créa son fils Schéroï (Schiéroui) grand prêtre des faux dieux ; il lui donna pour son usage un livre persan. Il commit beaucoup de mauvaises actions, et se plongea dans l'obscurité et les ténèbres d'une abominables doctrine. Quand le vaillant Vartan, petit-fils du grand Isaac, apprit qu'on avait détruit le bon ordre de l'église et que l'on couvrait de deuil les fêtes annuelles, il rassembla promptement une armée, fondit avec audace sur les impies, fit périr par l'épée l'impie Schavasb, mit en fuite le marzban Mesphkan ; et après avoir pris l'abominable Vent, le condamna à être brûlé dans le temple du feu que celui-ci avait fait construire dans la ville de Tovin (Tvin), et fit pendre son fils Schéroï au-dessus de l'idole. Il édifia sur le lieu même où était cette idole une grande église qu'il nomma Saint-Grégoire. Le grand patriarche Gioud (Kioud) y transporta le siège patriarcal17 et s'y fixa, parce que le saint patriarche Joseph avait été emmené en exil et mis en prison avec les saints Ghievouentiens, qui sont encore vivants. Les nakharars arméniens ne firent pas leur devoir en laissant le troupeau de Jésus-Christ sans pasteur et en ne se séparant pas des loups idolâtres, quoique le saint patriarche Joseph le leur eût ordonné ; mais enfin l'ordre de la sainte église fut rétabli d'une manière admirable, et les Arméniens se soumirent au généralat du vaillant Vartan jusqu'au jour de sa mort. Vartan livra avec courage un grand nombre de combats : il périt en combattant pour Jésus-Christ et les chrétiens d'une manière digne de lui, ainsi qu'un grand nombre de ses compagnons, et il reçut de l'immortel roi Jésus-Christ une couronne impérissable. Quelque temps après arriva la mort du saint patriarche Joseph, qui avait occupé le siège patriarcal pendant huit années. Plusieurs saints évêques, les prêtres Ghievouentiens et des diacres périrent avec lui, en Perse, par ordre de l'infidèle Firouz (Bierouez). On posa sur leurs têtes la couronne du martyre, et ils se réunirent dans le sein de Dieu. Le grand patriarche Gioud, du bourg d'Iothmous, occupa ensuite le siège patriarcal pendant dix ans et mourut. Jean (Houehan) Mantakouni lui succéda. C'était un homme accompli, doué des plus belles qualités ; il augmenta considérablement le bréviaire de notre église, et il composa aussi des histoires pour servir à se diriger selon le droit chemin dans le cours de la vie. De son temps Vahan Mamigonéan (Mamikouéniéan), fils de Homaïéag (Hmaïéak), frère du saint Vartan, gouverna l'Arménie, et vainquit vaillamment toutes les troupes étrangères qui vinrent l'attaquer. Par le conseil, les avis et les utiles prières du saint patriarche Jean Mantakouni ; il rassembla les tribus de l'Arménie et fit reconstruire les églises qui avaient été détruites par les ennemis. Firouz fit encore du mal à notre pays tant qu'il vécut. Ayant méprisé les prières du saint homme de Dieu Jean, il périt dans le K'houschank'h18 avec toute son armée. Après lui, Balasch (Vagharsch) gouverna l'empire des Perses. Il écouta de bons avis et confia notre pays à Vahan. Cependant notre grand patriarche Jean Mantakouni s'en alla vers Jésus-Christ après avoir occupé pendant six ans le trône patriarcal ;. son disciple Papgen lui succéda. De son temps Firouz régnait en Perse. Ce prince appela Vahan à sa cour, le créa marzban d'Arménie et l'envoya dans ce pays. Vers la même époque le pieux, le religieux et le célèbre roi des Romains Zénon (Ziénouen) mourut étant sur le trône. Avant l'époque de son avènement, tout avait été couvert d'un voile ténébreux et épais par les odieux hérétiques. Mais Zénon rejeta le concile de Chalcédoine (K'hàghiétoun), dissipa les ténèbres et fit fleurir dans l'église de Dieu l'admirable, brillante, étincelante et véritable doctrine des apôtres. Après lui, le vaillant Anastase (Anasdas) monta sur le trône ; il fut aussi zélé ami de la vérité que Zénon, et même encore plus que lui : toutes ses actions étaient agréables à Dieu, et il était fermement attaché à la saine doctrine des saints pères. On écrivit, par son ordre, des lettres circulaires qui anathématisaient tous les hérétiques et le concile de Chalcédoine. Pendant que sa saine doctrine florissait dans tout l'empire romain, le grand patriarche Papgen rassembla, dans la nouvelle ville où était fixé le patriarcat, un concile d'évêques arméniens, ibériens-et albaniens, qui anathématisèrent et rejetèrent aussi le concile de Chalcédoine ; ils fondèrent alors une doctrine universelle, qui avait pour base celle de saint Grégoire. C'est ainsi que fut établie la seule vraie doctrine dans tous les pays des Romains, des Arméniens, des Ibériens et des Albaniens ; tous ils rejetèrent et anathématisèrent le concile de Chalcédoine. La vraie doctrine subsista ainsi pendant l'espace de trente-cinq ans. L'impie Justinien (Iousdianoues) régna après Anastase ; ce fut un homme méchant, qui désirait tout détruire, tout changer, et rétablir l'hérésie du concile de Chalcédoine : il accabla de chagrins, de peines et de tourments affreux tous les saints hommes et tous ceux qui tenaient à la saine doctrine, et il plongea la sainte église dans un abîme de sang. Après que le grand patriarche Papgen eut occupé le trône patriarcal pendant cinq ans il mourut. Samuel, du bourg d'Ardz, lui succéda. De son temps, Vart, frère de Vahan, gouverna l'Arménie. Samuel mourut après avoir occupé le patriarcat pendant dix ans. On créa patriarche après lui Mouschè, du bourg d'Aïlapérits (Ailapier), dans la province de Godaik'h (Kouedaik'h). De son temps l'Arménie fut gouvernée par des marzbans persans. Après que Mouschè eut occupé avec sainteté le siège patriarcal pendant huit ans, il mourut. Il fut remplacé par Isaac (Sahak), du bourg d'Oughga (Ieghieka), dans la province de Hark'ha. À cette époque, des marzbans persans gouvernèrent l'Arménie sous les ordres de Kobad (Kavad), roi de Perse. Isaac remplit les fonctions de patriarche pendant cinq ans, et mourut ensuite. Christophe (Khrisdap'houer), du bourg de Dirarhidj, dans la province de Pagrévant, fut placé après lui sur le trône patriarcal. Il l'occupa pendant six ans. Léonce (Ghiévouent), du bourg de P'houek'grierhasd, lui succéda. De son temps Chosroès (Khouesrouev) remplaça son père Kobad sur le trône de Perse. Vartan Mamigonéan se révolta contre lui, tua, dans la ville de Tovin, le marzban Souren, et se soumit aux Grecs avec plusieurs autres nakharars. Léonce mourut après avoir occupé le trône patriarcal pendant trois ans. Il eut pour successeur Nersès, du bourg d'Aschdarag, dans la province de Pagrévant. De son temps le roi de Perse Chosroès rassembla une armée nombreuse, et envoya Hrouésag contre Vartan. Il y eut un violent combat dans la plaine de Khaghamakha. Par les continuelles prières de Nersès, les troupes de Vartan firent un effroyable carnage des Perses. Du temps du patriarche Nersès, Maghouedj, mage de nation, né dans le bourg de K'hounarasdan, dans la province de Nischapour (Nieschabouèh), nommé sur les fonds de baptême Izdpouzid, c'est-à-dire sauvé par Dieu, souffrit toutes sortes de tourments dans la ville de Tovin, par ordre du marzban Veschnas Vahram, et reçut la couronne du martyre. Le corps de ce saint martyr fut porté au grand patriarche Nersès par tous les évêques et les prêtres de l'église. Ils le placèrent auprès de l'église qui servait de résidence au patriarche, et ils lui élevèrent un tombeau de martyr en pierre de taille. Nersès mourut après avoir occupé le siège patriarcal pendant huit ans. Un nommé Jean (Houehannès),19 du bourg de Dzieghouévan, dans la province de Gapeghéan (Gapieghiéank'h), lui succéda ; il fut en possession de la dignité de patriarche d'Arménie pendant l'espace de dix-sept ans et mourut ensuite. Moïse (Mouevsès), homme divin, né dans le bourg d'Eghivart,20 (Ieghiévart), élevé et instruit dans le palais des patriarches, monta sur le trône de saint Grégoire après Jean. Le cycle composé de cinq cent trente-deux ans fut achevé la dixième année du patriarcat de Moïse, et la trente et unième du règne de Chosroès, fils de Kobad, et roi de Perse. Par l'ordre exprès du grand Moïse, les grammairiens et les savants réglèrent à l'usage de la race de Thorgoma la manière de supputer le temps. Ce travail servit aux observations scientifiques : l’on forma un calendrier perpétuel pour la nation arménienne, et l’on ne fut pas obligé de faire comme les autres nations pour les cérémonies de l'église, Le saint patriarche Moïse ordonna, selon les anciens usages, Kiouriouen archevêque d'Ibérie, de Gougark'h et de Colchide.21 Mais vers le temps de la mort de Moïse, Kiouriouen s'éloigna de la fidélité qu'il devait au véritable ordre de choses et à la vraie croyance, et contraignit tous les orthodoxes qui suivaient la doctrine des saints pères de se soumettre à l'infâme concile de Chalcédoine, dans le pays de sa juridiction. Ensuite, par sa détestable insolence, il séduisit les nakharars du pays et répandit promptement son horrible séduction. Cependant Moïse eut de violentes altercations avec lui ; il lui adressa des paroles pieuses et de belles et excellentes exhortations pour l'arracher à son impiété, à sa détestable hérésie, et le ramener à la véritable doctrine des saints pères. Kiouriouen ne voulut pas obéir ; il préféra le poison au remède salutaire de la sagesse. Le grand patriarche Moïse termina sa vie quelque temps après : il avait occupé trente ans le trône patriarcal. Ce saint patriarche vivait encore lorsqu'un rayon éclatant de la lumière divine pénétra dans le cœur du roi de Perse Chosroès, fils de Kobad, qui régnait sur beaucoup de nations, et s'était illustré pat un grand nombre de combats et d'actions de bravoure et de vaillance. Cela arriva l'année même de la mort de Moïse. Chosroès crut en Dieu, à son fils unique et au Saint-Esprit aussi Dieu ; il rejeta bien loin de lui l'absurde idolâtrie, et confessa qu'il n'y avait pas d'autre dieu que le seul Dieu qu'adoraient les chrétiens. Il fut régénéré par l'eau du baptême ; il participa à la vie lumineuse et au sang du Seigneur ; il salua et baisa le saint Evangile de Jésus-Christ, et trois jours après il mourut dans des exercices de piété. Les chrétiens prirent son corps pour l'inhumer ; ils chantèrent des psaumes, et tous les prêtres l'accompagnèrent. On le déposa dans la sépulture des rois. Son fils Hormouzd (Ouermizt) monta après lui sur le trône ; mais plusieurs des courtisans et des nakharars se révoltèrent contre lui et le tuèrent dans son palais. Chosroès, son fils, régna alors en sa place. Un ischkhan nommé Bahram (Vahram) se révolta contre celui-ci et se fit nommer roi ; alors Chosroès prit la fuite et se réfugia auprès de l'empereur des Romains Maurice (Morik). L'empereur secourut Chosroès, qui, avec beaucoup de troupes, vainquit et tua Bahram et tous les siens. 22 Chosroès, petit-fils de Chosroès, fut ainsi rétabli sur le trône de Perse. Il se montra reconnaissant du service qu'on lui avait rendu. Maurice demanda à Chosroès la Mésopotamie (Midchagiedk') avec quelques autres territoires, aussi bien que cette partie de l'Arménie qu'on nommait Danadirakan-Gount.23 Chosroès céda à Maurice tout le territoire de Tovin24 et deux autres provinces éloignées, celle de Maséatsodn et les environs du mont Aragadz. En outre il abandonna le territoire qui s'étend depuis le mont Endzak'hizar jusqu'au bourg d'Arhiesd et à Hatsioun. Après cet arrangement l'empereur Maurice changea les noms de tous les pays qui avaient été gouvernés par Aram. D'abord la partie de l'Arménie qui portait le nom de Première Arménie fut appelée, par ordre de Maurice, Seconde Arménie ; sa métropole fut Sébasté. La province de Kabatouevkia, dont la capitale était Césarée, se nommait Seconde Arménie ; on l'appela Troisième Arménie et on en fit une éparchie. Mélitène, avec la province du même nom, s'appelait Troisième Arménie ; on la nomma Première Arménie. Le Pont, dont la métropole était Trébizonde (Drabizouen), fut appelé Portion de la Grande Arménie ; on nomma Quatrième Arménie le pays dont la métropole Martyropolis porte aussi les noms de Np'hrkierd et de Justinianopolis. Le territoire de Karin et sa métropole Théodosiopolis (Théouetouesoubolis), furent nommés Grande Portion de la Grande Arménie. Toute la partie de la Grande Arménie qui restait au pouvoir des Romains, c'est-à-dire toute la contrée depuis la pays de Pasen (Pasien) jusqu'à la Syrie (Asouériesdan), conserva le nom de Grande Arménie. Tout le pays de Daïk'h, avec ses frontières, s'appela Profonde Arménie. Enfin, le territoire de Tovin prit le nom d'Arménie inférieure. Quand Maurice eut achevé tous ces changements, il les fit enregistrer dans les livres royaux.25 Il me semble que j'en ai assez écrit sur ce sujet, car vous savez que déjà je vous ai raconté comment le pays fut divisé en Première, Seconde, Troisième et Quatrième Arménie. La première division fut faite par le vaillant Aram, et la seconde par l'empereur romain Maurice. Je crois que tout ce que j'ai dit vous suffit ; je vais reprendre le fil de mon histoire.


  1. Chosroès II, fils de Tiridate le Grand, a été surnommé Phok'hr, le Petit, par d'autres auteurs arméniens. ↩

  2. Arsace, fils de Diran, est le troisième du nom, et monta sur le trône d'Arménie en 341, selon Saint-Martin (Mém. I, 413). Saint Nersès le Grand, d'après le même savant (ibid. p, 437), aurait occupé le siège patriarcal dès l’année 340. ↩

  3. Les faits religieux qui sont rapportés ici ne se trouvent pas dans Moïse de Khoren ; et à cette occasion je dois faire remarquer que Jean Catholicos, probablement à cause de la haute dignité ecclésiastique dont il était revêtu, semble habituellement affecter de se montrer mieux informé que Moïse de Khoren de tout ce qui se rattache en particulier à l'histoire de l'église. ↩

  4. Par une erreur de copiste, Bab ou Pap est appelé Para dans Ammien Marcellin (XXVII, 12, 9 ; XXX, I, 1 sqq.). ↩

  5. Le patriarche, lorsqu'il suppose que Macédonius vivait encore sous le règne de Théodose le Grand, c'est-à-dire pendant les années 379 à 395 de notre ère, commet la même erreur dont est entaché le récit de Moïse de Khoren (III, XXX) qui se rapporte à l’histoire de cet hérésiarque, Car, selon l'opinion le plus généralement adoptée, Macédonius ne vécut pas au-delà de l’année 361. (Socrat. Hist. eccles. II, 42. — Sozomen. Chron. Pasch. p. 394. — Cf. Ammien Marcel., ubi supra.) En général, on observe que Moïse de Khoren et Jean Catholicos reportent au règne de Théodose le Grand divers événements qui se passèrent sous celui de Valentinien. ↩

  6. Sur la position de Thulé on peut consulter ce qu’en dit Saint-Martin dans ses Mémoires sur l’Arménie (I, 315, note 2). ↩

  7. Ce dernier auteur place en l’année 387 le partage du royaume d'Arménie qui eut-lieu entre les Perses et les Romains. (Ibid. 413). Les deux princes, à l’occasion de qui le patriarche se réfère à Moïse de Khoren, sont Arsace et Vagharschag où Valarsace, fils de Bab, qui occupèrent ensemble le trône de l’Arménie romaine. Après la mort de Vagharschag, Arsace porta seul la couronne, tandis que Khosrou (III), issu d'une autre brandie des Arsacides, régnait sur l’Arménie persique par la volonté de Schahpour III, roi de Perse. Jean Catholicos se serait, avec plus de raison, référé à Faustus de Byzance, qui nous a conservé sur les règnes de Bab, de ses deux fils et de Khosrou III, comme sur plusieurs autres points de l'histoire d'Arménie, bien plus de détails qu'on n'en trouve dans Moïse de Khoren. ↩

  8. Jean Catholicos se conforme ici au récit de Moïse de Khoren en donnant le nom d’Ardaschir au fils du roi de Perse Schahpour (III), qui fit prisonnier Khosrou (III), et qui créa roi d'Arménie Bahram-Schah-pour, frère de ce dernier prince. Saint-Martin (Mém. I, 318 et 413) observe que Khosrou (III) fut vaincu par Iezdedjerd, fils du roi de Perse Bahram IV, et non par Ardaschir. Il pense que l'erreur de Moïse de Khoren vient de ce que cet historien a confondu Schahpour III avec Schahpour II. On sait d'ailleurs que Bahram-Schahpour fut placé sur le trône d'Arménie par le roi de Perse Bahram IV. Ce fut sous le règne de Bahram-Schahpour, couronné l'an 392 de notre ère, que Mesrob composa l'alphabet arménien, fonda une école devenue célèbre, et traduisit ou fit traduire en arménien la Bible sur la version des Septante. Jusqu'à cette époque l'Arménie n'avait possédé que des Bibles grecques ou syriaques, inaccessibles à la plupart des chrétiens qui habitaient le royaume. De l'école fondée par Mesrob sortirent Moïse de Khoren, Mambré-Verzanogh et son frère, Gorioun ; Elisée, David le philosophe, Ardsan-Ardzrouni, et un grand nombre d'autres écrivains arméniens. ↩

  9. La mort de Khosrou (III) est placée à l'an 415 de notre ère par Saint-Martin (Mém. 319 et 437). Ce savant supplée ici au silence de Jean Catholicos en rapportant qu'après cet événement Iezdedjerd Ier, roi de Perse, donna la couronne d'Arménie à son propre fils Schahpour, qui se rendit odieux à tous les Arméniens par son caractère tyrannique, et les persécuta pour les contraindre d'embrasser la religion de Zoroastre. Au bout de quatre années de règne il retourna en Perse dans le but de monter sur le trône de son père, qui venait de mourir ; mais ses efforts furent vains, et il périt victime de la perfidie de ses ennemis. ↩

  10. Ce qui est dit ici de Bahram II, roi de Perse, doit, selon Saint-Martin (ibid. 319), s'entendre de Bahram V. Le même auteur place à l’année 422 de notre ère l'avènement d'Ardaschir ou Ardaschès (IV). ↩

  11. Saint-Martin pense (Mém. 320) que l’on peut approximativement assigner la date de l’année 428 de notre ère à la captivité d'Ardaschir (IV), et par conséquent à la destruction de la dynastie des Arsacides d'Arménie. Mais il a soin de faire observer que, jusque cette époque, la concordance de la chronologie arménienne avec celle des historiens grecs ou latins présente de grandes difficultés. C'est à partir seulement de 428 que les dates, dans l'histoire d'Arménie, lui paraissent acquérir quelque certitude. Il estime (ibid. 321) que les Arsacides occupèrent le trône d'Arménie environ 580 ans. Après eux le partage de la Grande Arménie entre les Grecs et les Perses fut consommé. Ceux-ci en obtinrent la plus grande portion, et se bornèrent à la faire gouverner par un marzban ou marzbied que souvent ils choisirent parmi les Arméniens Les anciens rois de Perse donnaient ce titre aux commandants militaires des frontières de leur empire. Marzban est formé, en effet, de deux mots persans, marz, frontière, et ban, gardien. (Voyez Saint-Martin, Mém. p. 320 et 321, note 2.) ↩

  12. Le marzban persan que Jean Catholicos ne nomme pas, s'appelait Vèh Mihir Schahpour selon Moïse de Khoren (Hist. armen. III, LXIV). On trouve également dans ce dernier historien et dans les Mémoires de Saint-Martin sur l'Arménie, les noms des marzbans persans dont le patriarche fait mention, sans les désigner nominativement, ou dont il ne fait même aucune mention. ↩

  13. Le patriarche Bérékischoï (Pergisch) est aussi connu sous le nom d’Abdischoï. ↩

  14. Schmouel est la forme arménienne du nom de Samuel. ↩

  15. La province de Pagravan ou Pakrhant correspond à la Bagravandène de Ptolémée. ↩

  16. Dans les auteurs arabes, le nom de la métropole d'Arménie, Tovin ou Touvine est écrit Dowine, et plus habituellement Débil, par suite d une ancienne transcription fautive de l'arménien Tovin. Cette ville fut fondée, dans les premières années du IVe siècle de notre ère, par Khosrou II, roi d'Arménie, qui régna de 316 à 325. ↩

  17. Saint-Martin (Mém. I, 437) attribue à Mélidé, de Manazgerd, le fait de la translation du siège patriarcal à Tovin. Sur la liste chronologique qu'il donne des patriarches d'Arménie (ibid.), il place Joseph Ier à l'an 441, Mélidé à l'an 452 de notre ère, Moïse Ier, aussi de Manazgerd, à l'an 457 ; Gioud ou Kioud, d'Araheza à l’an 465 ; Christophe Ier, Ardzrounien, à l'an 476, et Jean Mantagouni ou Jean Ier, à l’an 480 ; tandis que Jean Catholicos ne fait aucune mention d'un patriarche du nom de Mélidé, ni d'un autre du nom de Moïse Ier, et compte depuis la captivité de Joseph (I) en Perse jusqu'à la nomination de Jean Mantagouni un seul patriarche, Gioud, du bourg d'Iothmous, qui aurait transféré de Vagharschabad à Tovin la résidence patriarcale. C'est à l'avènement de ce même Joseph au siège patriarcal que s'arrête, dans l'ouvrage de Moïse de Khoren (III, LXVII), le récit des faits propres à l'histoire d'Arménie. ↩

  18. Le nom du pays de K’houschank'h, où, selon Jean Catholicos, le roi de Perse Firouz trouva la mort, ne se rencontre pas dans les Mémoires de Saint-Martin sur l’Arménie ; mais on y lit (I, 328 et 329) que ce prince périt dans une guerre contre les Huns Hep'hthal ou Ephthalites, qui habitaient les bords orientaux de la mer Caspienne. ↩

  19. Selon Saint-Martin (Mém. I, 438), le patriarche Jean II, qui succéda à Nersès II, était né à Sïound-seghin et non à Dzieghouévan. ↩

  20. Ce fut sous le gouvernement de Ten-Schahpour, l’an 551 de notre ère, que le patriarche Moïse d'Éghivart fit réformer l'ancien calendrier et fixer le commencement d'une nouvelle ère dont les Arméniens se sont servis jusqu'à ce jour. ↩

  21. La Colchide est nommée Iégiéria dans le texte arménien. Ce dernier nom se trouve ailleurs sous la forme Eker ou Éger, et tire son origine, selon les Arméniens et les Géorgiens, d'un frère de Haïg nommé Egros ou Iégros. ↩

  22. L'ischkhan Bahram, dont il est question dans le récit de Jean, était l'un des généraux les plus illustres de Chosroès Ier (Khosrou Nouschirwan). Les historiens le nomment ordinairement Bahram Tchoubin, et disent qu'il se révolta sous le règne d'Hormouzd, fils et successeur de ce prince. Il ne fut pas tué à la bataille que lui livra Chosroès II, comme l'affirme le patriarche ; mais il périt victime de la perfidie de ses ennemis pendant qu'il s'était réfugié à la cour du roi des Turcs, au-delà du Djihoun. ↩

  23. Le nom de Danadirakan-Goant est transcrit sons la forme Danoudiragan-Kount ou Danoudiragan-Gound par le traducteur français, dans l'ouvrage cité (I, 25) et dans une des notes de son édition de l'Histoire du Bas-Empire, par Lebeau (t. X, 331 et 335, note 3), où l’on apprend que ce nom signifie en arménien le Gouvernement militaire ou l’Armée des princes. ↩

  24. Le territoire de la ville de Tovin est désigné dans le texte arménien par la qualification osdan, c'est-à-dire libre, noble et affranchi d’impôts, parce que le roi d'Arménie Khosrou II, fondateur de Tovin, avait exempté des impôts la nouvelle ville et ses environs. (Voyez Mos. Choren. Hist. I, XXIV; éd. fr. Whist.—Saint-Martin, Mém. sur l’Arménie, I, 25 et 26, note 2.) ↩

  25. Il faut consulter les observations auxquelles a donné lieu, de la part de Saint-Martin (Mém. sur l’Arménie, I, 25-29.— Histoire du Bas-Empire, par Lebeau, X, 332 et 333 ; éd. Saint-Martin), le passage important de Jean Catholicos qui est relatif aux cessions de territoire que l'empereur Maurice obtint de Chosroès (II) ou Khosrou Parwiz, et aux nouvelles divisions territoriales qu'il établit en Arménie. Le texte original de ce passage a été imprimé dans les Mémoires sur l'Arménie (I, 25-27), avec une version française qui diffère en quelques points de celle que nous publions ici d'après la copie autographe qu'a laissée Saint-Martin de sa traduction de l’ouvrage entier du patriarche. ↩

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