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Le Christ envoie des prédicateurs par toute la terre, et il n'est personne à qui il ne soit donné d'entendre la prédication. C'est David qui l'annonce, écoutez cet oracle : Le son de leur voix a retenti par toute la terre, et leur parole est parvenue jusqu'aux extrémités du monde. (Ps. XVIII, 5.) Ailleurs, il nous les montre prêchant avec autorité, et surpassant en puissance ceux mêmes qui portent la couronne : Vous les établirez princes, dit-il, sur toute la terre. (Ps. XLIV, 17.) L'événement a confirmé la prophétie : Pierre et Paul sont plus grands que les rois et les princes. Car, tandis que les rois survivent souvent aux lois qu'ils ont portées, les lois de ces pêcheurs leur survivent dans une invariable stabilité, et défient tous les efforts réunis des démons, de la coutume, du vice, de la volupté et d'une infinité d'autres adversaires. Aucun roi ne sera jamais désiré avec autant d'ardeur que ces pêcheurs devenus des princes. Nous en avons pour garant le même prophète qui ajoute : Aussi tous les peuples publieront-ils éternellement vos louanges (Ibid. 18.), c'est-à-dire vous rendront grâces et vous témoigneront beaucoup de reconnaissance pour leur avoir donné de tels princes. La prédication étendra partout ses conquêtes , les prophètes nous l'affirment également. Ecoutez ce que dit David : Demande-moi et je te donnerai les nations en héritage, et j'étendrai ta possession jusqu'aux extrémités de la terre. A cette attestation vient se joindre la déclaration identique d'un autre prophète : La terre entière, dit-il, sera remplie de la science de Dieu, comme les bassins des mers sont couverts par l'abondance des eaux. (Is. XI, 9.) Entendez annoncer aussi la docilité avec laquelle le monde s'est soumis : Il ne faudra plus que chacun enseigne son prochain, et que chacun enseigne son frère, en lui disant : Connais le Seigneur; car tous me connaîtront parmi eux depuis le plus petit jusqu'au plus grand. (Jérém. XXXI, 34.)
L'Eglise est solidement établie, voici ce qui le prouve : En ces derniers jours, on apercevra la montagne du Seigneur et la maison du Seigneur sur le sommet des montagnes; elle sera élevée au-dessus des collines, et les peuples et les nations s'y rendront en foule. (Is. II, 2.) C'est peu qu'elle soit solide, stable, inébranlable; par elle une grande paix sera établie dans tout l'univers, les républiques et les monarchies tomberont, et tous seront soumis à un seul empire où régnera une paix presque générale, inconnue jusque-là. Dans l'antiquité, tous les artisans même et les rhéteurs portaient les armes et prenaient part aux combats, mais depuis l'avènement de Jésus-Christ rien de semblable ne se voit plus; la guerre est moins fréquente et moins farouche. Un prophète l'a dit : Ils briseront leurs glaives pour en faire des socs de charrue, et leurs lances pour en faire des faux; un peuple ne tirera plus l'épée contre un peuple, et ils ne s'exerceront plus au combat. (Ibid. 4.) Auparavant tous s'y exerçaient, maintenant tous ont oublié cet art, la plupart même ne l'ont pas appris, et s'il en est encore qui le pratiquent, c'est un petit nombre et à de rares intervalles, tandis qu'autrefois, l'insurrection était en permanence chez toutes les nations.
La prophétie nous indique ensuite les éléments qui devaient former l'Eglise. A des hommes polis, doux et bons, d'autres viendront se joindre, farouches, inhumains, semblables par leurs moeurs à des loups, à des lions, à des taureaux; et de tous doit se former une seule Eglise, un seul troupeau dont le Prophète dépeint ainsi la variété : Alors le loup paîtra avec l'agneau. (Is. XI, 6.) Nous apprenons par ces paroles que les rois observeront les règles de la tempérance et de la douceur. Il ne s'agit pas de bêtes féroces, évidemment. Quand donc s'est réalisée cette prophétie? Que le Juif le dise: A-t-on jamais vu le loup paître avec l'agneau? Et dût-on le voir, quelle utilité en reviendrait-il au genre humain? Il s'agit d'hommes aux moeurs farouches, des Scythes, des Thraces, des Maures, des Indiens, des Sarmates, des Perses. Voilà les nations qui toutes doivent être assujetties air même joug, comme le déclare un autre prophète : Et ils le serviront sous un même joug, et ils l'adoreront chacun dans le lieu où il sera. (Soph. III, 9.) Ce n'est donc plus seulement à Jérusalem que l'on peut servir Dieu, mais aussi bien sur tous les autres points du monde; désormais aucune loi n'oblige plus les hommes à aller à Jérusalem; mais chacun, sans sortir de son pays, peut rendre à Dieu le culte qui lui est dû.
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