III - POTAMIÈNE
[1] Ce bienheureux Isidore, qui s'est rencontré avec Antoine le bienheureux, m'a raconté ce fait digne d'être écrit, l'ayant appris de lui. C'est qu'une certaine Potamiène, ainsi appelée, au temps de Maximien le persécuteur, jeune fille très belle, se trouvait la servante d'un individu. Son maître, après l'avoir obsédée par de nombreuses promesses, ne put la convaincre. [2] Or à la fin, furieux, il la remet au préfet d'Alexandrie d'alors. La lui ayant donnée, livrée comme chrétienne et blasphémant son temps et les empereurs à propos des persécutions, il lui suggéra avec de l'argent ceci : « Si elle s'arrange de mon dessein, garde-la sans la punir. » Mais si elle persistait dans sa rigueur, il demanda de la punir, afin qu'elle ne se moquât plus vivante de son libertinage. [3] Or, quand elle eut été amenée devant le tribunal, on ébranlait comme une tour sa résolution avec divers instruments de supplices. Parmi ces instruments, le juge, ayant rempli de poix une grande chaudière, ordonna de mettre le feu par dessous. Donc la poix bouillonnant et s'enflammant avec violence, il se tourna vers elle. « Ou bien va-t'en, soumets-loi aux volontés de ton maître: ou bien il faut que tu saches que je commande qu'on te verse dans la chaudière. » Alors elle répondit en disant : « Puisse ne jamais exister un pareil juge qui commande de se soumettre au libertinage. » [4] Rendu furieux, il ordonne qu'on la dévête et qu'on la jette dans la chaudière. Mais elle élève la voix en disant : « Par la tète de ton empereur que tu crains, s'il a été décidé par toi de me punir de la sorte, ordonne qu'on me laisse descendre peu à peu dans la chaudière, afin que tu voies quelle patience me donne le Christ que tu méconnais. » Et descendue peu à peu. durant l'espace d'une heure, elle rendit l'âme quand la poix lui fut venue jusqu'au cou.