XVII.
Mais, laissant de côté Alexandre avec les syllogismes qu'il apporte dans la discussion, et aussi avec les |420 psaumes de Valentin, dont s'appuie de temps en temps son étrange audace, comme s'ils venaient d'une autorité respectable, renfermons la discussion dans cette question unique: Jésus-Christ a-t-il pris sa chair dans le sein d'une vierge? afin qu'il soit tenu pour certain que sa chair est véritablement humaine, si elle a été formée d'une substance humaine, quoique cette démonstration ait été clairement fournie ailleurs, et par le nom d'homme que portait cette chair, et par la nature de ses propriétés, et par le sentiment qu'elle a eu de ses souffrances, et par les douleurs de sa passion. Il faut donc justifier avant, tout la raison pour laquelle il était nécessaire que le Fils de Dieu naquît d'une Vierge. Celui qui allait consacrer un nouvel ordre de naissance a dû naître d'une manière toute nouvelle: Isaïe prophétisait que le Seigneur annoncerait par; un signe cette merveille. Quel est ce signe? « Voilà qu'une Vierge concevra et enfantera un Fils. » Une Vierge a donc conçu et enfanté Emmanuel, ou « Dieu avec nous. » La voilà cette naissance toute nouvelle, où l'homme naît dans Dieu, où Dieu est né dans l'homme, prenant une chair de semence antique, sans antique semence, afin de la régénérer avec une semence nouvelle, c'est-à-dire spirituellement, en lavant toutes ses souillures passées. Mais cette nouveauté tout entière, comme les autres événements, a été figurée par la loi ancienne, la sagesse éternelle nous préparant d'avance au mystère d'un Dieu naissant d'une Vierge. La terre était vierge encore; la main de l'homme ne s'y était point fait sentir; nulle semence n'avait été jetée dans son sein: c'est de cette terre que Dieu forma l'homme, ainsi que nous le lisons, un lui donnant une âme vivante. Que si le premier Adam a été formé de terre, il suit que le second, ou le nouvel Adam, comme parle l'Apôtre, a dû être produit par Dieu d'une terre, c'est-à-dire d'une chair de qui la pureté n'avait reçu nulle atteinte, et recevoir de lui l'Esprit qui vivifie. Mais, pour que ce nom d'Adam ne me devienne pas inutile, pourquoi |421 l'Apôtre a-t-il appelé le Christ de ce nom, s'il n'a pas été homme d'une substance terrestre? Ici encore la sagesse me montre Dieu recouvrant, par une opération contraire, son image et sa ressemblance, dont s'était emparé le démon. Eve était vierge quand elle ouvrit son âme à la parole qui allait élever l'édifice de la mort. C'était donc aussi dans une vierge que devait descendre le Verbe de Dieu qui allait; élever l'édifice de la vie, afin que le même sexe qui fut l'instrument de notre perte devînt l'instrument de notre salut. Eve crut au serpent; Marie crut à Gabriel. Le péché qu'avait commis la première en croyant, la seconde l'effaça en croyant. Mais Eve n'a point conçu dans son sein par la parole du démon. Je me trompe; elle a conçu. Car la parole du démon fut pour elle une semence fatale qui la réduisit à obéir dans la soumission et à enfanter dans la douleur. Enfin, elle a mis au monde un démon fratricide1. Marie, au contraire, a engendré un Fils qui devait un jour sauver Israël, son frère selon le sang, et son meurtrier. Dieu fit donc descendre dans le sein de la femme son Verbe, frère miséricordieux, destiné à effacer le souvenir du frère parricide. Il fallait que le Christ sortît pour le salut de l'homme de la chair où était entré l'homme déjà condamné.
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Cain. ↩