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Les confessions de Saint Augustin
CHAPITRE XI. VIVES PERPLEXITÉS D’AUGUSTIN.
18. Et je ne pouvais, sans un profond étonnement, repasser dans ma mémoire tout ce long temps écoulé depuis la dix-neuvième année de mon âge, où je m’étais si vivement épris de la sagesse, résolu d’abandonner à sa rencontre les vaines espérances et les trompeuses chimères de mes passions. Et déjà j’accomplissais mes trente ans, embourbé dans la même fange, avide de jouir des objets présents, périssables, et qui divisaient mon âme. Je trouverai demain, disais-je; demain la vérité paraîtra, et je la saisirai. Et puis, Faustus va venir, il m’expliquera tout. O grands maîtres de l’Académie ! on ne peut rien tenir de certain pour régler la vie. Mais non, cherchons mieux; ne désespérons pas. Voici déjà que les absurdités de l’Ecriture ne sont plus des absurdités; une interprétation différente satisfait la raison. Arrêtons-nous sur les degrés où, entant, mes parents m’avaient déposé, jusqu’à ce que se présente la vérité pure.
Mais où, mais quand la chercher? Ambroise n’a pas une heure à me donner, je n’en ai pas une pour lire. Et puis, où trouver des livres? quand et comment s’en procurer? à qui en emprunter? Réglons le temps; ménageons-nous des heures pour le salut de notre âme. Une grande espérance se lève. La foi catholique n’enseigne pas ce dont l’accusait la vanité de mon erreur. Ceux qui la connaissent condamnent comme un blasphème la croyance que Dieu soit borné aux limites d’un corps humain; et j’hésite à frapper pour qu’on achève de m’ouvrir? La matinée est donnée à mes disciples : que fais-je le reste du jour? pourquoi cette négligence? Mais trouverai-je un moment pour rendre visite à des amis puissants, dont le crédit m’est nécessaire? pour préparer ces leçons que je vends? pour donner quelque relâche à mon esprit fatigué de tant de soins?
19. Périssent toutes ces vanités, périsse tout ce néant; employons-nous à la seule recherche de la vérité. Cette vie est misérable et l’heure de la mort incertaine; si elle nous surprend, en quel état sortirons-nous d’ici? Où apprendrons-nous ce que nous y aurons négligé d’apprendre? ou plutôt ne nous faudra-t-il pas expier cette négligence? Et si la mort allait trancher tout souci avec ce noeud de chair? Si tout finissait ainsi? Encore s’en faut-il enquérir. Mais non; blasphème qu’un tel doute! Ce n’est pas un rien, ce. n’est pas un néant qui élève la foi chrétienne à cette hauteur d’autorité par tout l’univers. Le doigt de Dieu n’aurait pas opéré pour nous tant de merveilles, si la mort du corps absorbait la vie de l’âme. Que tardons-nous, que ne laissons-nous là l’espoir du siècle, pour nous appliquer tout entier à chercher Dieu et la vie bienheureuse? .
Mais attends encore; n’est-il plus de charme dans ce monde? a-t-il perdu ses puissantes séductions? n’en détache pas ton coeur à la légère. Il serait honteux de revenir à lui après l’avoir quitté. Vois, à quoi tient-il que tu n’arrives à une charge honorable? Que pourrais-tu souhaiter après? N’ai-je pas en effet des amis puissants? Quel que soit mon empressement à limiter mes espérances, je puis toujours aspirer à une présidence de tribunal; et je prendrai une femme dont la fortune sera suffisante à mon état, et là se borneront mes désirs. Combien d’hommes illustres et dignes de servir d’exemples, ont vécu mariés, et fidèles à la sagesse!
20. Ainsi disais-je; et les vents contraires de mes perplexités jetaient mon coeur çà et là; et le temps passait; et je tardais à me convertir à vous, Seigneur mon Dieu; je différais de jour en jour de vivre en vous, et je ne différais pas un seul jour de mourir en moi-même. Aimant la vie bienheureuse, je la redoutais dans son (413) séjour, et en la fuyant je la cherchais. Je croyais que je serais trop malheureux d’être à jamais privé des embrassements d’une femme; et le remède de votre miséricorde, efficace contre cette infirmité, ne venait pas à ma pensée, faute d’en avoir fait l’épreuve; car j’attribuais la continence aux propres forces de l’homme, et cependant je sentais ma faiblesse. J’ignorais, insensé, qu’il est écrit : « Nul n’est chaste, si vous ne lui en donnez la force ( Sagesse, VIII, 21). » Et vous me l’eussiez donnée, si le gémissement intérieur de mon âme eût frappé à votre oreille; si ma foi vive eût jeté dans votre sein tous mes soucis.
Edition
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Confessiones (CSEL)
Caput 11
Et ego maxime mirabar satagens et recolens, quam longum tempus esset ab undevicensimo anno aetatis meae, quo fervere coeperam studio sapientiae, disponens, ea inventa, relinquere omnes vanarum cupiditatum spes inanes et insanias mendaces. et ecce iam tricenariam aetatem gerebam, in eodem luto haesitans aviditate fruendi praesentibus, fugientibus et dissipantibus me, dum dico: cras inveniam; ecce manifestum apparebit, et tenebo; ecce Faustus veniet et exponet omnia. o magni viri Academici! nihil ad agendam vitam certi conprehendi potest? immo quaeramus diligentius et non desperemus. ecce iam non sunt absurda in libris ecclesiasticis, quae absurda videbantur, et possunt aliter atque honeste intellegi. figam pedes in eo gradu, in quo puer a parentibus positus eram, donec inveniatur perspicua verita. sed ubi quaeretur? quando quaeretur? non vacat Ambrosio, non vacat legere. ubi ipsos codices quaerimus? unde aut quando conparamus? a quibus sumimus? deputentur tempora, distribuantur horae pro salute animae. magna spes oborta est: non docet catholica fides, quod putabamus et vani accusabamus. nefas habent docti eius credere deum figura humani corporis terminatum. et dubitamus pulsare, quo aperiantur cetera? antemeridianis horis discipuli occupant; ceteris quid facimus? cur non id agimus? sed quando salutamus amicos maiores, quorum suffragiis opus habemus? quando praeparamus quod emant scholastici? quando reparamus non ipsos relaxando animo ab intentione curarum? pereant omnia et dimittamus haec vana et inania: conferamus nos ad solam inquisitionem veritatis. vita misera est, mors incerta est; subito obrepat -- quomodo hinc exibimus? et ubi nobis discenda sunt quae hinc negleximus? ac non potius huius neglegentiae supplicia luenda? quid, si mors ipsa omnem curam cum sensu amputabit et finiet? ergo et hoc quaerendum. sed absit, ut ita sit. non vacat, non est inane, quod tam eminens culmen auctoritatis Christianae fidei toto orbe diffunditur. numquam tanta et talia pro nobis divinitus agerentur, si morte corporis etiam vita animae consumeretur. quid cunctamur igitur, relicta spe saeculi, conferre nos totos ad quaerendum deum et vitam beatam? sed expecta: iucunda sunt etiam ista, habent non parvam dulcedinem suam: non facile ab eis praecidenda est intentio, quia turpe est ad ea rursum redire. ecce iam quantum est, ut inpetretur aliquis honor. et quid amplius in his desiderandum? suppetit amicorum maiorum copia: ut nihil aliud multum festinemus, vel praesidatus dari potest. et ducenda uxor cum aliqua pecunia, ne sumptum nostrum gravet, et ille erit modus cupiditatis. multi magni viri et imitatione dignissimi sapientiae studio cum coniugibus dediti fuerunt. Cum haec dicebam et alternabant hi venti et inpellebant huc atque illuc cor meum, transibant tempora, et tardabam converti ad dominum; et differebam de die in diem vivere in te, et non differebam cotidie in memet ipso mori: amans beatam vitam timebam illam in sede sua, et ab ea fugiens quaerebam eam. putabam enim me miserum fore nimis, si feminae privarer amplexibus, et medicinam misericordiae tuae ad eandem infirmitatem sanandam non cogitabam, quia expertus non eram; et propriarum virium credebam esse continentiam, quarum mihi non eram conscius, cum tam stultus essem, ut nescirem, sicut scriptum est, neminem posse esse continentem, nisi tu dederis. utique dares, si gemitu interno pulsarem aures tuas et fide solida in te iactarem curam meam.