Übersetzung
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Traité de la musique
6.
Ne te semble-t-il pas aussi que les joueurs de flûte, de cithare ou de tout autre instrument ne sont que des rossignols? — L’E. Pas tout à fait. — L. M. Et en quoi diffèrent-ils du rossignol? — L’E. En ce qu'il y a un certain art, à mon sens, chez le musicien, tandis que le rossignol n'est guidé que par la nature. — L. M. Ce que tu dis a quelque vraisemblance: Mais faut-il décorer du nom d'art ce qui n'est chez eux, qu'un effet de l'imitation? — L’E. Pourquoi pas? Car l'imitation joue un si grand rôle dans les arts, qu'ils disparaîtraient presque avec elle. Les maîtres s'offrent en modèle et c'est là ce qu'ils appellent enseigner. — L. M. L'art, sans doute, relève à tes yeux de la raison, et procéder avec art, c'est procéder avec raison : N'est-ce pas ton avis? — L’E. Oui. — L. M. Par conséquent, sans la raison, il n'y a point d'art. — L’E. C'est un point que je t'accorde encore. — L. M. Crois-tu que les animaux, qui n'ont l'usage ni de la parole, ni de la raison, comme on dit, soient capables de procéder avec raison? — L’E. En aucune façon. — L. M. Tu vas donc reconnaître ou que les perroquets, les pies, les corbeaux sont des animaux raisonnables ou que tu as trop légèrement donné le nom d'art à l'imitation. On sait en effet que les oiseaux apprennent, à l'école de l'homme, à produire certains chants, certains sons, et qu'ils n'y arrivent que par l'imitation. As-tu une autre opinion? — L’E. Je ne saisis pas très-bien la conséquence de ton raisonnement, ni ce qu'elle peut avoir de décisif contre ma réponse. —- L. M. Je t'avais demandé si les joueurs de cithare, de flûte et autres gens de ce métier possédaient l'art musical, quoiqu'ils ne dussent qu'à l'imitation les effets qu'ils produisaient sur leurs instruments. Ils possèdent l'art, m'as-tu répondu; ce qui est si vrai, as-tu ajouté, que presque tous les arts seraient en péril si l'on en retranchait l'imitation. On peut donc conclure de tes paroles, qu'on procède avec art, lorsqu'on atteint un but par imitation, quand bien même on ne devrait pas à l'imitation la connaissance de l'art. Or, si l'imitation se confond avec l'art, et l'art avec la raison, imitation et raison sont la même chose; mais l'animal sans raison ne fait pas usage de la raison; il ne possède donc pas l'art, et comme il est capable d'imiter, l'art ne peut se confondre avec l'imitation.
L’E. J'ai avancé que les arts relevaient, en général, de l'imitation : Je n'ai pis appelé l'art une pure imitation. — L. M. Eh bien ! les arts qui relèvent de l'imitation ne relèvent-ils pas également de la raison? — L’E. A mon sens, ils se rattachent à ces deux principes. — L. M. Je le veux bien, mais la science, sur quel principe repose-t-elle : sur l'imitation ou sur la raison ? -L’E. Sur toutes deux. — L. M. A ce titre, tu accorderas la science aux oiseaux, puisque tu ne leur refuses pas le don de l'imitation. — L’E. Pas le moins du monde. Car j'ai avancé que la science dépendait de l'imitation et de la raison, non de l'imitation seule. — L. M. Voyons, penses-tu qu'elle puisse relever de la raison seule ? — L’E. Peut-être. — L. M. Ainsi donc lu distingues entre l'art et la science; car la science, d'après toi, peut dépendre de la raison seule, tandis que la raison s'unit à l'imitation dans l'art. — L’E. Je ne vois pas que cette conclusion soit rigoureuse, car je n'ai pas dit que tous les arts, mais qu'une foule d'arts relèvent à la fois de la raison et de l'imitation. — L. M. Comment ! Appelleras-tu science ce qui dépend de ces deux principes, ou réserveras-tu ce nom à ce qui ne relève que de la raison? — L’E. Et pourquoi donc ne pourrai-je appeler science l'union de la raison et de l'imitation?
Edition
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De musica (PL)
6.
Sed quid tibi videtur? qui vel tibiis canunt vel cithara, atque hujusmodi instrumentis, numquidnam possunt lusciniae comparari? D. Non. M. Quid igitur distant? D. Quod in istis artem quamdam esse video, in illa vero solam naturam. M. Verisimile dicis; sed ars tibi videtur ista esse dicenda, etiamsi quadam imitatione id faciunt? D. Cur non? Nam video tantum valere in artibus imitationem, ut, ea sublata, omnes pene perimantur. Praebent enim se magistri ad imitandum, et hoc ipsum est quod vocant docere. M. Videtur tibi ars ratio esse quaedam, et ii qui arte utuntur, ratione uti: an aliter putas? D. Videtur. M. Quisquis igitur ratione uti non potest, arte non utitur. D. Et hoc concedo. M. Censesne muta animalia, quae etiam irrationalia dicuntur, uti posse ratione? D. Nullo modo. M. Aut igitur picas et psittacos et corvos rationalia esse dicturus es animalia, aut imitationem nomine artis temere vocasti. Videmus enim has aves et multa canere ac sonare quodam humano usu, et nonnisi imitando facere: nisi tu aliter credis. D. Quomodo hoc confeceris, et quantum contra responsionem meam valeat, nondum plane intelligo. M. Quaesiveram ex te, utrum citharistas et tibicines, et hujusmodi aliud genus hominum, artem diceres habere, etiamsi id quod in canendo faciunt, imitatione assecuti sunt. Dixisti esse artem, tantumque id valere affirmasti, ut omnes pene tibi artes periclitari viderentur imitatione sublata. Ex quo jam colligi potest, omnem qui imitando assequitur aliquid, arte uti; etiamsi forte non omnis qui arte utitur, imitando eam perceperit. At si omnis imitatio ars est, et ars omnis ratio; omnis imitatio ratio: ratione autem non utitur irrationale animal; non igitur habet artem: habet autem imitationem; non est igitur ars imitatio. D. Ego multas artes imitatione constare dixi, non ipsam imitationem artem vocavi. M. Quae igitur artes imitatione constant, non eas censes ratione constare? D. Imo utroque puto eas constare. M. Nihil repugno, sed scientiam in quo ponis; in ratione, an in imitatione? D. Et hoc in utroque. M. Ergo scientiam illis avibus dabis, quibus imirationem non adimis. D. Non dabo: ita enim dixi [Col. 1087] in utroque esse scientiam, ut in sola imitatione esse non possit. M. Quid? in sola ratione videtur tibi esse posse? D. Videtur. M. Aliud igitur putas esse artem, aliud scientiam. Siquidem scientia et in sola ratione esse potest, ars autem rationi jungit imitationem. D. Non video esse consequens. Non enim omnes, sed multas artes dixeram, simul ratione atque imitatione constare. M. Quid? scientiam vocabisne etiam illam, quae his duobus simul constat; an ei solam partem rationis attribues? D. Quid enim me prohibet vocare scientiam, cum rationi adjungitur imitatio?