14.
N'ayez pas de contestations ou terminez-les promptement, de peur que la colère ne devienne de la haine et d'un fétu ne fasse une poutre et ne rende l'âme homicide. Ce n'est pas seulement aux hommes que s'adresse cette parole de l'Evangile : « Celui qui hait son frère est homicide 1 ; » cette prescription regarde la femme autant que l'homme que Dieu créa le premier. Quiconque parmi vous en aura offensé une autre par injure, médisance, ou même par un injuste reproche, n'oubliera pas de lui donner satisfaction au plus vite, et celle qui a été blessée pardonnera sans discussion. Si deux soeurs se sont réciproquement offensées, elles se pardonneront réciproquement à cause de vos prières, car plus vos prières sont fréquentes, plus elles doivent être saintes. Celle qui est enclin à la colère et qui se hâte toujours de demander pardon à la personne qu'elle reconnaît avoir blessée, vaut mieux que celle qui s'emporte plus rarement et ne se presse pas de demander pardon. Celle qui ne veut pas pardonner à sa soeur ne doit pas espérer recevoir l'effet de l'oraison; mais celle qui ne veut jamais demander pardon ou qui ne le demande pas du fond du coeur, n'a plus de raison de vivre dans un monastère, quoiqu'on ne l'en chasse pas. Abstenez-vous donc de paroles dures; s'il s'en échappe de votre bouche, ne craignez pas de tirer le remède de la même bouche qui a fait la blessure. Quand la nécessité de la discipline vous force d'adresser des paroles dures à des inférieures qu'il vous faut reprendre, si vous sentez que vous ayez passé la mesure à leur égard, on n'exige pas de vous que vous leur demandiez pardon, de peur qu'un excès d'humilité ne compromette l'autorité nécessaire au gouvernement de la communauté : mais cependant vous en demanderez pardon à Celui qui est le maître de vous toutes, à ce Dieu qui connaît l'étendue de votre amour pour celles que vous reprenez avec peut-être trop de sévérité. C'est une affection toute spirituelle et non point charnelle qui doit régner entre vous : il y a des badinages et des jeux de femme à femme que la pudeur ne permet point; les veuves et les vierges du Christ établies dans une sainte profession doivent se les interdire; car les familiarités de ce genre doivent être évitées même par les femmes mariées et les jeunes filles appelées au mariage.
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I Jean, III, 5. ↩