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Les esprits qui nous excitent à les servir et à les adorer comme des dieux, ressemblent aux hommes remplis d'orgueil qui voudraient également obtenir de nous de semblables hommages. Supporter ceux-ci est un péril moins grand que d'adorer ceux-là. Car la domination d'un homme sur un homme finit avec la vie de l'un ou de l'autre. Mais l'esclavage imposé par l'orgueil des mauvais anges, est plus redoutable à cause du temps qui suit la vie présente. Il est de plus facile à chacun de le comprendre : le despotisme de l'homme laisse à l'homme la liberté de sa pensée, mais c'est pour notre esprit même que nous redoutons la tyrannie des mauvais anges, et notre esprit est pour nous le seul moyen de chercher et de contempler la vérité. Si donc il faut nous soumettre à toutes les puissances données aux hommes pour le gouvernement des empires, et que nous rendions à César ce qui est à César, à Dieu ce qui est à Dieu1, nous n'avons pas à craindre d'être ainsi liés après notre mort. De plus, autre est la servitude du corps, autre est celle de l'âme. Or quand les justes, dont toute la joie sur la terre est en Dieu, le font bénir par leurs couvres, ils applaudissent à ces actions de grâces. Vient-on à les louer eux-mêmes ? ils répriment ce désordre : s'ils ne le peuvent, au moins ne font-ils jamais bon accueil à ces louanges, et ils cherchent à en détromper les auteurs. Tels sont aussi les bons anges ; et même ces fidèles ministres de notre Dieu ne sont-ils pas plus purs et plus saints encore? Pourrons-nous donc craindre de les offenser en évitant à leur égard tout culte superstitieux? C'est pour nous détourner nous-mêmes de tout culte superstitieux, qu'ils dirigent nos coeurs vers le Dieu unique et véritable et qu'ils les relient à son amour; d'où vient, je crois, le mot religion2.