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Contre Fauste, le manichéen
CHAPITRE XXIII. DANS L'USAGE DES CHOSES ORDINAIRES DE LA VIE, LES MANICHÉENS DIFFÉRENT BEAUCOUP DES CATHOLIQUES ET SONT AU-DESSOUS MÉME DES PAÏENS.
Fauste, ne sachant ce qu'il dit, prétend encore que nous n'avons rien changé aux moeurs des Gentils. Mais comme le juste vit de foi[^3]; que la fin du précepte est la charité qui vient d'un coeur pur, d'une bonne conscience et d'une foi non feinte[^4] ; que, pour former la conscience des fidèles, ces trois choses demeurent : la foi, l'espérance et la charité[^5] : comment celui qui n'a pas ces trois choses pourrait-il avoir les mêmes moeurs que celui qui les possède ? Car nécessairement celui qui croit, espère, aime autre chose, doit vivre différemment. Si nous paraissons avoir en commun avec les Gentils l'usage de certaines choses, comme la nourriture et la boisson, les maisons, les vêtements, les bains; et, pour ceux d'entre nous qui sont mariés, des femmes à épouser et à conserver, des enfants à mettre au monde, à nourrir, à laisser pour héritiers : bien différente cependant est la manière d'user de ces choses chez celui qui en rapporte l'usage à une autre fin, et chez celui qui en rend grâces à Dieu sans avoir de lui aucune idée mauvaise ou erronée. Car bien que, au sein de votre erreur, vous mangiez le même pain que les autres hommes, que vous viviez de fruits et de l'eau des fontaines, que vous soyez vêtus de laine et de lin tissés de la même manière, vous ne menez cependant point la même conduite, non précisément en mangeant, en buvant ou en vous habillant autrement que les autres, mais parce que vous avez d'autres sentiments, d'autres croyances, et que vous rapportez toutes ces choses à une autre fin, à savoir à vos erreurs et à votre vanité. De même, quoique nous usions de ces choses et d'autres encore de la même manière que les païens, nous ne vivons cependant pas comme les païens, parce que nous ne les rapportons pas à la même fin, mais à la fin du précepte légitime et divin, à savoir la charité qui vient d'un coeur pur, d'une bonne conscience et d'une foi non feinte. Quelques-uns, pour s'en être écartés, se sont égarés en de vains discours. Parmi ceux-là vous tenez évidemment le premier rang, vous qui ne voyez pas, qui ne réfléchissez pas que la différence de foi entraîne aussi une différence de conduite dans la possession et l'usage des mêmes choses, tellement que, quand vos auditeurs ont des femmes, ont des enfants quoique malgré eux, leur amassent ou leur conservent un patrimoine, mangent de la viande, boivent du vin, vont aux bains, moissonnent, vendangent, font un négoce, exercent les fonctions publiques, vous les regardez comme vos disciples et non comme des païens, quoique leur conduite semble plus se rapprocher de celle des païens que de la vôtre. En effet, le genre de vie de certains païens ressemble plus au vôtre qu'à celui de quelques-uns de vos auditeurs, puisque, dans leurs cérémonies sacrilèges, ils s'abstiennent du vin, de la chair et des femmes; néanmoins, bien qu'ils fassent ce que vous faites, vous admettez, plutôt qu'eux, dans vos rangs des auditeurs qui usent de toutes ces choses et en cela s'éloignent de vous ; et vous regardez plutôt comme membre de votre secte une femme qui met au monde des enfants, pourvu qu'elle croie à Manès, qu'une Sibylle qui ne se marie même pas. Mais, dites-vous, il y a beaucoup de chrétiens appelés catholiques qui sont adultères, ravisseurs, avares, ivrognes, ou entachés de tout autre vice condamné par la saine doctrine. Eh ! dans votre petit, dans votre très-petit nombre, la plupart ne sont-ils pas tels, et n'y en a-t-il pas quelques-uns parmi les païens qui ne le sont pas? Dites-vous pour cela que ces païens valent mieux que vous ? Et cependant, à raison de ces vaines et sacrilèges erreurs de votre secte, ceux d'entre vous qui n'ont point de ces vices sont au-dessous des païens qui les ont. Il est donc clair que la saine doctrine, qui est la seule catholique, reste tout entière, bien qu'un grand nombre prétendent lui appartenir et ne veulent point être guéris par elle. Car il faut bien admettre ce petit nombre d'élus, que le Seigneur indique en particulier au milieu de cette vaste, de cette immense multitude répandue dans le monde entier[^1] : cependant ce petit nombre de saints et de fidèles (il faut souvent le répéter), cette quantité de grains si petite par comparaison à l'énorme quantité de paille, forme par elle-même une telle abondance de froment qu'elle l'emporte sans comparaison sur tous vos justes et vos réprouvés, les uns et les autres également réprouvés de la vérité. Nous ne sommes donc pas un schisme des Gentils, dont nous différons beaucoup en mieux; vous n'en êtes pas un non plus, parce que vous en différez beaucoup en pire.
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Rom. I, 17.
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I Tim. I, 5.
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I Cor. XIII, 13.
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Matt. XX, 16.
Edition
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Contra Faustum Manichaeum libri triginta tres
23.
Qui etiam dicit nihil nos mutasse de moribus gentium nesciens, quid loquatur. Cum enim iustus ex fide vivat finisque praecepti sit caritas de corde puro et conscientia bona et fide non ficta maneantque ad formandam vitam fidelium tria haec: fides, spes, caritas, unde fieri potest, ut pares cum aliquo mores habeat, qui haec tria cum illo paria non habet? Qui enim aliud credit, aliud sperat, aliud amat, necesse est, ut aliter vivat. Etsi usus quarundam rerum similis videtur nobis esse cum gentibus, sicut cibi et potus, tectorum, vestimentorum, lavacrorum, et qui ex nostris coniugalem vitam gerunt, uxorum ducendarum et habendarum, filiorum gignendorum, nutriendorum, hereditandorum, longe tamen aliter his rebus utitur, qui ad alium finem usum earum refert, et aliter, qui ex his deo gratias agit, de quo prava et falsa non credit. p. 566,19 Sicut enim in ipso errore vestro cum eo pane vescamini, quo ceteri homines, et fructibus vivatis et fontibus, lana et lino similiter texto amiciamini, nec in his tamen parem ducitis vitam, non aliud edendo aut bibendo aut induendo, sed aliud sentiendo et credendo et ad alium finem ista omnia referendo, finem scilicet vestri erroris atque vanitatis, ita nos et in his et in aliis, quae similiter sumimus, non similiter cum gentibus vivimus easdem res non ad eundem finem referendo, sed ad finem legitimi divinique praecepti, caritatem de corde puro et conscientia bona et fide non ficta, a quibus quidam aberrantes conversi sunt in vaniloquium, in quo sane principatum tenetis p. 567,1 non intuentes, non considerantes in eisdem habendis agendisque rebus tantum ad diversam vitam valere, si diversa sit fides, ut cum auditores vestri et uxores habeant et filios quamvis inviti suscipiant eisque patrimonia congerant vel custodiant, carne vescantur, vinum bibant, lavent, metant, vindemient, negotientur, honores publicos administrent, vobiscum eos tamen, non cum gentibus computetis, cum facta eorum gentibus videantur similiora quam vobis. Nam et quorumdam facta gentilium cum magis vobis propinquent quam quibusdam auditoribus vestris – nonnulli quippe in sacrilegis sacris suis et a vino et a carnibus et a concubitu temperant – potius auditores vestros his omnibus utentes et in eo vobis dissimiles in Manichaei grege numeratis, quam istos eadem, quae facitis, facientes, p. 567,14 potiusque feminam, quae in Manichaeum crediderit, vestram dicitis etiam parientem quam Sibyllam nec saltem nubentem. At enim multi christiani catholici vocantur et sunt adulteri, raptores, avari, ebriosi et quicquid aliud sanae doctrinae adversatur. Quid autem? Inter vos, in tam exiguo ac paene nullo numero vestro, nonne plerique sunt tales, et quidam in paganis non sunt tales? Num ideo paganos, qui tales non sunt, dicitis meliores vobis, cum tamen propter sacrilegam vanitatem sectae vestrae etiam qui in vobis tales non sunt, paganis etiam talibus deteriores sint? Unde manifestum est non ideo derogari sanae doctrinae, quae sola catholica est, quia multi eius nomine censeri volunt et per illam sanari nolunt. Agnoscenda est enim paucitas illa, quam dominus praecipue commendat in ingenti atque innumerabili multitudine toto orbe diffusa, p. 567,29 quae tamen paucitas sanctorum atque fidelium, quod saepe commendandum est, tamquam granorum in comparatione multitudinis palearum paucitas dicitur, per se autem ipsam tantam massam frumenti facit, ut omnes probos et reprobos vestros, quos pariter veritas reprobat, incomparabili multitudine superet. Ecce non sumus gentium schisma, a quibus plurimum distamus in melius, sed nec vos hoc estis, quia plurimum ab eis distatis in peius.