V.
S'agit-il des Gentils, de ces adorateurs des idoles qui sont pour nous à une distance infinie ? L'Apôtre nous enseigne par son exemple que si nous devons corriger ce qu'il y a en eux de dépravé, ce n'est qu'à la condition d'applaudir à ce qu'il peut encore y avoir de bien en eux. Saint Paul s'adressant aux idolâtres, voire même aux panégyristes du culte des idoles, formulait sur eux sa pensée en ces termes: «Ils connaissaient Dieu, mais ils ne l'ont pas glorifié comme Dieu et ne lui ont pas rendu grâces; loin de là, ils se sont évanouis dans leurs pensées d'orgueil, leur coeur s'est obscurci, et est devenu insensé. En se disant sages ils sont devenus fous, et ils ont travesti la gloire du Dieu incorruptible en le représentant à l'image corruptible de l'homme, des oiseaux, des quadrupèdes et des serpents ». Telles furent en particulier les idoles des Egyptiens, chez qui l'idolâtrie revêtit les formes les plus variées et les plus honteuses. Toutefois, malgré leur dégradation, l'Apôtre ne leur refuse pas la connaissance de Dieu ; bien plutôt il la leur concède en ces termes : « Ils connaissaient Dieu, mais ils ne l'ont pas glorifié comme Dieu ». Supposé qu'il eût entrepris de détruire en eux cette connaissance, sous prétexte qu'elle ne devait être qu'un mensonge, puisque ces hommes étaient sacrilègement impies, ne pourrait-on pas l'accuser d'être l'ennemi de la vérité ? Ce qu'il leur reproche, c'est d'avoir défiguré la vérité pour y substituer leur propre mensonge: « Ils ont, dit-il, travesti la gloire de Dieu, en lui donnant la ressemblance de l'image corruptible de l'homme » . En d'autres termes, ils ont donné à Dieu une forme toute différente de la sienne, et n'ont pas donné de lui aux hommes la connaissance qu'ils en avaient. En effet., c'est d'eux encore que l'Apôtre a dit : « Ils ont changé en mensonge la vérité de Dieu, ils ont honoré et servi la créature de préférence au Créateur, qui est béni dans tous les siècles ». Tout ce qu'une créature possède de vérité, lui vient de Dieu ; mais cette vérité n'est pas Dieu lui-même la preuve en est qu'on peut la changer en mensonge et adorer comme dieux le soleil, la lune, les corps célestes et les corps terrestres. Ce que l'Apôtre leur reproche, c'est d'avoir changé la vérité en mensonge , c'est là le crime qu'il déteste et qu'il voudrait effacer ; quant à ce qu'il peut encore y avoir de vrai dans leur doctrine, malgré les faussetés sans nombre au sein desquelles cette vérité est comme ensevelie, il l'approuve, le confirme et l'atteste. En effet, il avait dit au début de cette même épître : « La colère de Dieu se révèle du haut du ciel sur l'impiété et l'in« justice avec laquelle les hommes enchaînent la vérité dans l'iniquité1 ». Pouvait-il affirmer plus clairement qu'il reconnaît la vérité partout où elle se trouve, quoiqu'il gémisse de la voir retenue dans l'iniquité ?
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Rom. I, 18 -25. ↩