17.
« Que si, à cause du péché d'un seul, la mort a régné par un seul homme; ceux qui reçoivent l'abondance de la grâce et de la justice régneront bien plus dans la vie par un seul aussi qui est Jésus-Christ ».
Ainsi la mort, à cause du péché d'un seul, a régné par un seul homme : pourquoi ? sinon parce qu'en lui tous ont péché, et qu'ainsi la mort les tient enchaînés, quand même ils n'ajouteraient pas à cette tache leurs péchés personnels ? Autrement, il ne serait pas vrai que par un seul et pour le péché d'un seul la mort ait obtenu l'empire ; elle régnerait, au contraire, pour plusieurs péchés de plusieurs hommes et par le fait de chaque pécheur.
D'ailleurs, attribuez à la seule imitation d'un triste devancier la perte de tout le genre humain ; dites que c'est en ce sens, et pour l'avoir suivi dans la voie du péché, que le péché d'un seul leur a donné la mort : alors, lui aussi et bien plus qu'eux-mêmes, est mort pour la faute d'un autre criminel, car le démon n'avait-il pas précédé notre premier père dans la voie du péché, jusqu'à lui conseiller même cette offense de Dieu ? Adam, au contraire, n'a rien conseillé à ses imitateurs ; bon nombre de ceux à qui vous donnez ce nom d'imitateurs ici, ne savent ni son existence ni son crime, ou n'y ajoutent aucune foi. Supposé donc que l'Apôtre en ce passage eût voulu parler d'un péché d'imitation, et non pas de propagation, combien il eût été plus logique à lui de donner ici, comme je l'ai dit déjà, la première place au démon, et d'affirmer que par lui seul la mort et le péché ont passé dans tous les hommes ? Car si l'on peut être imitateur d'un coupable sans qu'il vous ait rien conseillé qui ressemble à son crime, sans même connaître sa personne en aucune manière, combien plus serait-il logique de désigner Adam comme imitateur du démon qui a su lui persuader le péché ?
L'Apôtre ajoute : « Ceux qui reçoivent en abondance la grâce et la justice ». Qu'est-ce à dire? sinon que d'abord une grâce de pardon leur est accordée non-seulement pour cette faute où ils ont été pécheurs avec le reste des hommes, mais encore pour les péchés qu'ils y ont ajoutés par eux-mêmes ; et qu'ensuite à eux encore, une justice leur est donnée si forte et si puissante qu'ils ne céderont plus aux violences mêmes du démon, tandis qu'Adam a cédé à de simples conseils?
« Ceux-là », conclut-il, « régneront bien plus dans la vie ». En quel sens ? car la mort domine le plus grand nombre des hommes, et son empire les entraîne à l'éternel châtiment. Evidemment, nous ne pouvons appliquer ce texte, comme le précédent, qu'aux seuls hommes qui passent d'Adam à Jésus-Christ, c'est-à-dire de la mort à la vie. Oui, leur règne dans la vie sera supérieur au triste règne de la mort sur eux: celui-ci n'aura duré qu'un temps et aura fini; celui-là sera éternel et ne finira point.