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Comment donc, malgré votre science, vous laissez-vous prendre à ces vaines ressemblances, qui vous font regarder comme des vertus véritables des oeuvres extérieures, qui ne sont en réalité que des vices ? La constance est une vertu qui a pour vice contraire l'inconstance ; et cependant l'obstination qui touche de si près à la constance et semble l'imiter, n'est autre chose qu'un vice véritable. Puissiez-vous être exempt de ce vice, quand vous aurez reconnu la vérité de mes paroles; alors du moins, sous prétexte de montrer de la constance, je n'aurai plus à redouter de vous voir vous obstiner dans l'erreur. De là, nous pouvons conclure que les vices, non-seulement sont contraires aux vertus, comme la témérité est contraire à la prudence, mais encore que ces vices ont avec les vertus une certaine similitude extérieure, à laquelle on peut se laisser prendre. C'est ainsi qu'on peut rapprocher de la prudence, non pas la témérité ou l'imprudence, mais l'astuce ou la ruse, laquelle ne laisse pas d'être un vice, quoique nous lisions dans l'Ecriture ces mots auxquels on doit donner une interprétation favorable, « Soyez rusés comme des serpents1 », tandis que l'on doit interpréter dans le sens mauvais ces autres paroles : « Le serpent était le plus prudent des animaux2 ». Il serait dit : facile de désigner parleur nom propre chacun de ces vices qui ont une si grande affinité avec les vertus; mais, après tout, peu importe leur nom, l'essentiel c'est de les éviter.
