27.
Tout à coup, revêtant toutes les grâces de l'élégance et de l'urbanité, vous vous écriez : « Si la chasteté des infidèles n'est pas la chasteté. pourquoi ne pas aller jusqu'à dire que le corps des païens n'était pas un corps, que les yeux des païens n'étaient pas doués du sens de la vue; que le froment qui naît dans le champ des païens n'est pas du froment, et beaucoup d'autres choses semblables, dont l'absurdité serait telle qu'il se soulèverait de partout un rire universel ? » Ce n'est pas le rire, mais les larmes, que provoque votre rire dans toutes les personnes capables de comprendre, comme on voit le rire des frénétiques arracher des sanglots à leurs amis. Contrairement à la doctrine formelle des saintes Ecritures, vous niez que l'infidélité soit une véritable fornication spirituelle ; ou bien, vous soutenez que la chasteté véritable peut se concilier avec cette fornication spirituelle ; et vous riez et vous n'êtes pas fou? Pourquoi, comment cela peut-il se faire? Non, il n'y a ici ni chasteté véritable ni véritable raison. Je l'affirme, la véritable chasteté est incompatible avec la fornication, et il y a folie à soutenir cette extravagance et à en rire. A Dieu ne plaise que nous disions du corps des païens que ce n'est pas un corps, et autres choses semblables l Que la vertu dont l'impie se glorifie ne soit pas la véritable vertu, faut-il en conclure que le corps, créé par Dieu, ne soit pas un corps véritable ? Mais nous pouvons dire que le front des hérétiques n'est pas un front, si par ce mot nous désignons la pudeur, et non pas cette partie de la tête créée par Dieu. Mais quoi ? Dans ce livre que vous vous flattez de réfuter, n'ai-je pas prouvé, par avance, et affirmé hautement que cette parole : « Ce qui n'est pas selon la foi est péché », ne s'applique, à l'égard même des infidèles, ni aux biens de l'esprit, ni aux biens du corps, lesquels sont tous l'oeuvre de Dieu? Or, parmi ces biens, je trouve les objets sur lesquels vous plaisantez;.le corps, les yeux et les autres membres. On peut y ajouter également le froment qui naît dans le champ des païens, et dont la création est l'oeuvre de Dieu, et non pas des païens. Pourquoi, dans votre énumération, n'avez-vous pas cité ces quelques paroles que pourtant vous avez lues dans mon livre : « L'âme et le corps, et tous les biens naturels de l'âme et du corps, sont partout des dons de Dieu, même dans les pécheurs, car c'est Dieu, et non pas l'homme, qui en est l'auteur. Mais s'il s'agit de leurs oeuvres, elles tombent sous le coup de cette sentence
Tout ce qui n'est pas selon la foi est péché1 ». Si vous aviez daigné vous souvenir de cette courte explication que j'avais donnée, je pense que vous n'auriez pas porté la mauvaise foi jusqu'à soutenir que nous étions de taille à dire que le corps des païens n'est pas un corps, que les yeux des païens ne sont pas doués du sens de la vue, et que le froment, « qui croit dans le champ des païens, n'est pas du froment ». Permettez donc que, vous traitant comme un homme profondément endormi ou volontairement oublieux, je vous redise encore : « L'âme et le corps, et tous les biens naturels de l'âme et du corps, sont partout des dons de Dieu, même dans les pécheurs, car c'est Dieu, et non pas l'homme, qui en est l'auteur. Mais s'il s'agit de leurs oeuvres, elles tombent sous le coup de cette sentence : Tout ce qui n'est pas selon la foi est péché ». Vos paroles et votre rire insensés vous assimilent donc à un frénétique; mais quand je vous vois laisser passer inaperçues et oublier des paroles que vous aviez rappelées. peu de temps auparavant, et qui étaient gravées en toutes lettres dans le livre auquel vous vous flattez de répondre, ce n'est plus de la frénésie que je trouve en vous, mais une véritable léthargie.
Du Mariage et de la conc., liv. 1, n. 4. ↩
